Banque de France, Maif, Swiss Life et Humanis : quelle est leur politique papier ?
Enjeux environnemental et économique, le papier ne bénéficie pas toujours d'une politique formalisée de consommation, d'achat durable et de recyclage au sein des entreprises. Quatre organisations, classées dans le baromètre PAP 50 de la banque et de l'assurance, livrent leurs (bonnes) pratiques.
Je m'abonneDiminution de la consommation de papier, achat de papier recyclé et labellisé FSC, régulation des impressions, ou, encore, recyclage : autant de bonnes pratiques conseillées par les organisations Riposte Verte et WWF, qui ont publié, fin décembre 2014, leur premier baromètre PAP 50 du secteur de la banque et de l'assurance. 37 entreprises, de tailles variées - de 600 à 56 000 ETP - ont accepté de faire partie du classement.
"Aucune organisation de ce secteur ne recueille un très bon score, c'est-à-dire au-dessus de 75, relève Cyril Hergott, directeur du développement de Riposte Verte, qui conseille et réalise, notamment, des audits pour les entreprises. Et la moyenne générale s'établit à 46 sur 100. Ces résultats s'expliquent par le fait que nous avons interrogé des entreprises qui n'ont pas encore mis en oeuvre de politique papier, et que, pour la majorité, c'est la première fois qu'elles répondaient à cette enquête. Nous espérons que le baromètre soit un support, et qu'il y ait un sursaut pour le prochain, prévu pour ce secteur en 2017", explique l'expert.
Quel type de papiers achetez-vous ? Quel est le pourcentage de papier recyclé ? 71 questions ont été posées aux entreprises et 32 preuves, demandées. "À l'issue du classement, nous fournissons à chaque entité, la liste de leurs bonnes pratiques, qu'elles ne connaissent pas toujours, et des recommandations", complète Cyril Hergott.
Le top 10
1 - AXA
2 - Banque de France / Natixis / MAIF / SMACL
6 - Crédit Agricole Assurances
7 - Crédit Agricole Consumer Finance
8 - BNP Paribas / Cetelem / MGEN
En tête du baromètre PAP 50, Axa France s'impose, avec un score de 73 sur 100, comme l'organisation du secteur de la banque et de l'assurance ayant la "meilleure" politique papier. Deuxième ex-æquo, la Banque de France, Natixis, la Maif, et la SMACL possèdent également une politique papier formalisée. En bas du classement, AG2R La Mondiale ou la BPI commencent à construire une démarche responsable de papier. Swiss Life et Humanis, classés respectivement 31e et 32e, ne sont pas exemptes de bonnes pratiques sur le sujet, mais possèdent une marge de progression. Ainsi, Décision Achats a recueilli les pratiques de consommation, d'achat et de recyclage de papiers de quatre organisations : la Maif, la Banque de France, Swiss Life et Humanis. Témoignages de responsables achats et de développement durable.
La Maif, "dans une démarche environnementale continue"
Marie Lapalle, secrétariat général, division coordination et responsabilité sociale de l'entreprise / développement durable : "Parmi nos bonnes pratiques, nous avons un suivi assez fin du papier bureautique consommé pour le siège, et hors siège, ce qui nous permet un reporting précis du papier utilisé. Nous avons, également, une bonne capacité à maîtriser notre consommation : nous avons notamment installé des copieurs partagés en haute performance, et paramétré les impressions en noir et blanc et recto verso par défaut. Il est prévu, en 2015, le passage de son badge sur les copieurs partagés pour lancer les impressions, afin de pouvoir limiter le gaspillage de papier des impressions oubliées, et imprimer n'importe où dans l'entreprise.
Consommation : 26 kg / employé
En termes de consommation de papier de bureau par salarié, celle-ci est réduite : 26 kg au siège et 22 kg hors siège*. Ainsi, entre 2012 et 2013, nous avons diminué de 10 % la consommation de papier bureautique et nous sommes stables sur la consommation de papier pour la documentation externe.
Riposte Verte et WWF nous recommandent notamment une meilleure maîtrise de la consommation de papier hors-bureautique, ainsi que la mise en place de processus pour consommer moins.
Achats durables : 70 %
Sur les achats, 100 % de nos papiers de bureau sont, depuis 2008, des papiers recyclés. Nous faisons le choix de papier blanchi, sans chlore, au niveau du siège et hors siège, ainsi que du papier de 80 g / m.2. Pour la communication externe, 99 % des papiers achetés sont, soit 100 % recyclés, soit fibre FSC, soit du papier mixte FSC recyclé. Nous avons bien sûr mené des appels d'offres pour l'achat de papier et le coût n'a pas été une limite.
Pour les achats, la recommandation de PAP 50 est de porter notre attention sur l'achat d'enveloppes et de cahiers recyclés. Cela existe déjà un peu, car des cahiers composés de papier recyclé sont proposés dans les fournitures, mais la pratique n'est pas encore formalisée.
Recyclage : 100 %
Au niveau du siège social, le recyclage est très bon. 95 % des postes de travail sont équipés d'une poubelle spécifique à papier, et une poubelle "générale" est placée dans les couloirs. Nous stockons le papier au siège et le prestataire en charge du recyclage passe régulièrement le récupérer. Pour les sites hors siège social, 15 % de nos sites ont mis en place une politique spécifique de recyclage du papier, grâce à des relais développement durable de ces sites qui se sont impliqués pour trouver des prestataires locaux de recyclage du papier et garantissent la confidentialité de la destruction, et le travail avec des personnes en situation de réinsertion.
Le tri et le recyclage sont donc effectifs au siège et de nombreuses communications accompagnent cette démarche, comme des vignettes humoristiques de sensibilisation, par exemple. Pour passer à l'étape supérieure, nous devrons généraliser le recyclage du papier dans les sites hors siège social.
Le bilan
C'est la première fois que l'étude existe pour notre secteur, et rassembler tous les acteurs travaillant sur ces différents sujets pour centraliser les informations, et récupérer tous les documents de preuve de ces informations des documents administratifs n'a pas été une mince affaire. Mais, ce baromètre est positif, car il nous permet de faire un point et de prendre du recul sur notre politique papier. Nous sommes dans un mouvement, une démarche environnementale continue. Nous allons faire connaître les résultats en interne, c'est un facteur de fierté pour les collaborateurs.
Au cours de l'année 2015, nous allons également former tous les acheteurs, les graphistes et imprimeurs internes et les chargés de communication à l'intégration de l'environnement dans leur métier. Nous espérons que cette démarche va les responsabiliser, et nous aider à réduire l'achat et la consommation de papier. La durée de la formation sera de deux journées, à l'exception des chargés de communication (un jour)."
* 55 kg / ETP en moyenne française
Banque de France, "Dès 2007, nous avons engagé une politique de réduction de la consommation de papier"
Alain Christophory, chef du service du développement durable, direction des centres administratifs et du développement durable, et Pauline Schwartz, responsable du pôle Environnement : "Notre politique de développement durable a commencé par le sujet du papier, en 2007, et nous nous y intéressons toujours fortement. Notre première action a été de diminuer de 30 % la consommation de papier bureautique, entre 2007 et 2009. La démarche s'est accompagnée d'actions de sensibilisation, menée notamment via un intranet et l'envoi de newsletters sur le développement durable, ainsi que des formations proposées à l'ensemble des agents. L'idée : pérenniser les habitudes de consommation des 13 000 collaborateurs
Consommation : 26 kg / employé
Pour le siège, nous consommons 26 kg de papier par employé. Notre ambition de "consommer plus responsable" se poursuit aujourd'hui par un plan de réduction du parc d'imprimantes, mis en oeuvre en 2013, avec un objectif ferme, d'ici 2015 : la diminution de 20 % de ce parc et le déploiement d''équipements d'impression multifonctions mutualisés. L'impression en recto verso fait partie des bonnes pratiques préconisées à la Banque.
La Banque de France s'est également engagée dans des démarches de dématérialisation : l'usage quotidien est aujourd'hui sur du support dématérialisé.
Achats responsables : 0 %
Pour nos achats de papier, nous passons par l'UGAP : nous achetons du papier éco-labellisé, portant soit le label européen "La Fleur", soit le label écologique "Le Cygne nordique".
Ce papier n'est donc pas considéré comme "écoresponsable" (recyclé ou FSC, NDLR). Nous avons ici une marge de progrès pour répondre aux attentes de Riposte Verte et WWF, mais il est à noter que les labels écologiques (PEFC ou FSC) ne couvrent que certains aspects environnementaux comme la recyclabilité ou l'efficacité énergétique, alors que l'éco-label européen garantit un faible impact environnemental, tout au long du cycle de vie du produit (de l'extraction des matières premières à la fin de vie).
Recyclage : 100 % (au siège)
Nous menons une politique de gestion des déchets sur plusieurs plans : un guide et des formations, la tenue obligatoire d'un registre de suivi des déchets, dès 2012, la signature de contrats privilégiant le recyclage comme mode de traitement, et la mise en place de corbeilles de tri dans chaque bureau. Ainsi, nous recyclons plus que ce que nous achetons.
Le bilan
Le bon résultat du baromètre PAP 50 nous permet de sensibiliser davantage encore nos collaborateurs, et d'encourager chacun dans la poursuite des bonnes pratiques. Pour les succursales de la Banque, l'enquête a aussi permis de relancer le sujet du papier.
Outre le type de papier acheté, nos efforts doivent encore se porter sur la tenue d'actions de sensibilisation."
Swiss Life France, "une démarche de 0 % papier pour des collaborateurs en dynamique"
Arnaud de Varine-Bohan, responsable des achats groupe France de Swiss Life et Anne Pizet, chargée de communication développement durable et RSE ?: "La RSE est un vrai sujet d'entreprise et le papier en est un axe majeur. Notre principal impact est lié à l'utilisation de papier pour les collaborateurs, les clients et la communication. Une réflexion sur la politique papier a ainsi émergé en 2003 avec la mise en place du tri sélectif à Roubaix, puis son déploiement sur les sites de Levallois-Perret, Angers, Strasbourg, Nantes et Bordeaux.
Achats durables : 0 %
Nos réponses sur l'achat de papier n'ont pas été aussi détaillées que les questions demandées par le baromètre PAP50, d'où la mention zéro dans cette catégorie. En 2008, nous avons mené un appel offres pour des enveloppes recyclables, ce qui correspondait à notre premier critère. C'était indispensable, puisqu'avant 2008, nous avions plus de 13 millions d'envois par an. En explorant le marché, nous avons trouvé un fournisseur qui proposait non seulement des enveloppes recyclables, mais surtout des enveloppes en papier recyclé. Celles-ci sont blanches, car le fournisseur utilise un papier le plus propre possible et, bien sûr, recyclable. La fenêtre transparente est en amidon de maïs. Les prix étaient légèrement plus chers, de 2-3% que des enveloppes simplement recyclables, mais quand même moins chères que celles nous utilisions avant. Le "surcoût" était donc tout à fait absorbable par l'entreprise. Nous avons été le premier assureur à faire le choix des enveloppes 100% recyclées et recyclables.
Aujourd'hui, nous utilisons du papier FSC et du PEFC indistinctement pour 75% du volume global de notre consommation de papier tout site confondu. Le terme d'achat responsable semble réducteur ; par exemple, faire travailler une PME locale est un acte responsable.
Consommation : 119 kg/ employé (papier bureau + documents commerciaux)
En 2011, 600 tonnes de papier étaient consommés par an ; en 2012, 475 tonnes, et 348 tonnes en 2013. Quant au nombre de ramettes (500 pages) consommées, il était d'environ 28 000 tonnes en 2012, et 21 000 en 2013. Nous avons mis en place une démarche de 0 % papier pour des "collaborateurs en dynamique" (poste de travail portable) à Levallois, où travaillent 1000 collaborateurs (sur les 2000, en France). 220 d'entre eux sont déjà passés en dynamique, en 2014 ; 410 sont concernés et 590 supplémentaires devraient sauter le pas en 2015.
Nous avons donc mené une politique active pour diminuer la consommation de papier en interne, et en externe. Cela s'est traduit par l'implantation d'un parc de copieurs et d'imprimantes multifonction en réseau, avec l'impression en recto-verso et en noir et blanc par défaut. De plus, l'impression définitive est à l'initiative de l'utilisateur qui doit se déplacer à l'imprimante pour cliquer sur "imprimer". Les documents non-imprimés sont supprimés de la liste d'attente du copieur toutes les vingt-quatre heures. Ce dispositif contribue à économiser du papier, mais aussi du toner et de l'énergie. Aux achats, nous travaillons même à 99 % sans papier, avec des échanges de documents par mail ou par clé USB.
Le deuxième axe est la dématérialisation entrante des courriers et la non-matérialisation des échanges. Nous dématérialisons la relation avec nos clients par des courriers disponibles sur leurs espaces personnels, pour les 70% des clients internautes (qui ont déjà consulté au moins une fois leur compte en ligne et qui ont changé le mot de passe). Nous dématérialisons aussi la souscription des contrats.
Recyclage : 30 %
Sur tous nos sites, nous plaçons des bacs de réception de papier dans tous les services."
Le témoignage d'Humanis, page 5
Humanis, "10 à 20 % des critères sont environnementaux ou sociaux selon les appels d'offres"
Vincent Cahour, directeur du développement durable : "Humanis est le fruit de la réunion, en janvier 2013, de trois groupes - Aprionis, Novalis Taitbout, et Vauban Humanis, qui n'avaient ni les mêmes pratiques, ni les mêmes outils à disposition. Sur la politique papier, notamment, nous allons nous attacher à harmoniser les pratiques de l'ensemble des collaborateurs. Modéliser notre politique, et mettre en place un outil de suivi, nous donnera ainsi une bonne vision d'ensemble et nous permettra de sensibiliser les gens en interne sur des points de vigilance. Il est important que les collaborateurs puissent voir directement l'impact de leurs réalisations.
Consommation : 34 kg / employé
Dans cette logique d'harmonisation, un appel d'offres est en cours pour la généralisation d'imprimantes départementales, à raison d'une pour quinze à vingt personnes. Le déploiement devrait démarrer en juin 2015 et sera soutenue par une campagne de sensibilisation. Sur certains de nos sites, des bonnes pratiques comme le recto verso par défaut, l'utilisation d'un papier moins grammé, ou l'impression sécurisée, est déjà effectif. Nous tenons également compte de l'écoconception des machines, et vérifions auprès des industriels le taux de réutilisation des pièces des imprimantes et copieurs multifonctions. Selon les sujets, de 10 à 20 % des critères des appels d'offre sont environnementaux ou sociaux.
Achats durables : 30 %
En 2015, un appel d'offres commun sur le papier doit également être mené. La qualité du papier recyclé est une priorité : le grammage et le taux de recyclage vont être prioritairement étudiés. Nous utilisons actuellement, en majorité, des papiers en provenance de forêts gérées durablement (FSC ou PEFC), qui garantissent la traçabilité du bois. La notion de taux de matière recyclée n'est pas suffisamment pris en compte, nous devons l'améliorer.
Les achats sont sollicités, car il existe une vraie volonté de réduire le nombre de fournisseurs, à la suite de la fusion des trois groupes. À cela s'ajoute le fait qu'au sein de chaque structure, plusieurs acteurs commandaient les mêmes produits. Les achats participent à l'optimisation des coûts, mais aussi du cahier des charges, et aident à être plus professionnels sur l'appel d'offre, l'établissement et le suivi des contrats.
Recyclage : 90 %
Du côté du recyclage, nous devons harmoniser le tri sélectif à travers nos sites. Nous recyclons 90 % du papier bureautique. Nous réalisons partiellement le recyclage des gobelets ou bouteilles en plastique, des canettes, des stylos, et envisageons celui des mégots de cigarette.
Le bilan
Nous réfléchissons à la mise en place d'un label de certification, comme HQE exploitation. C'est l'une des recommandations faites par WWF et Riposte Verte, avec la sensibilisation et la formation des collaborateurs, l'affichage d'une politique papier et le calcul de la consommation de papier bureautique. En ce sens, nous souhaitons communiquer de façon positive, en valorisant les résultats obtenus, par exemple. Ce peut-être à travers d'affiches ou de vidéos amusantes.
En participant au PAP 50, nous savions que nous n'étions pas exemplaires, mais il était important pour nous d'intégrer ce référentiel de benchmarking, et de bénéficier d'un suivi comparé par rapport aux autres acteurs de la banque et de l'assurance. Nous allons pouvoir suivre notre progression, et nous comptons bien parvenir dans le top 10 pour la prochaine édition."