Energies alternatives: un engouement à mesurer
Si les communes s'équipent de plus en plus en panneaux solaires ou chaufferies bois, les retours d'expérience montrent que de multiples critères doivent être intégrés en amont. Malgré quelques coûts cachés, le retour sur investissement semble néanmoins intéressant.
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Dans les collectivités locales, le vent ou le soleil deviennent de véritables substituts au pétrole. Si la flambée du prix de l'or noir, l'an dernier, a fait germer une foule de nouveaux projets autour des énergies renouvelables, la tendance est amorcée depuis de nombreuses années. Selon l'Ademe, l'agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, les panneaux solaires, les chaudières bois ainsi que les éoliennes sont les énergies vertes les plus utilisées en France, tandis que la géothermie monte progressivement en puissance.
Très populaire en France, l'énergie solaire présente de multiples avantages. En effet, les panneaux solaires peuvent produire de l'électricité - il s'agit, dans ce cas, de panneaux photovoltaïques - ou de la chaleur, surtout utilisée pour l'eau des sanitaires ou des piscines municipales (on utilise alors des panneaux thermiques). En outre, «il est plus simple d'obtenir des aides financières de l'Union européenne ou de l'Ademe pour un projet solaire que pour du bois ou des éoliennes», observe Maud Lelièvre, déléguée générale d'Ecomaires, l'association des maires pour l'environnement et le développement durable. Autre atout important: le photovoltaïque est peu onéreux en termes d'entretien. Un contrôle annuel de l'état général de l'installation (support, régulation, câblage), ainsi que la vérification de l'état de charge des batteries de stockage, suffisent en général. La seule difficulté consiste «à trouver le bon équilibre entre la surface installée et la production envisagée», insiste Michèle Debayle, chargée de mission Ademe Limousin. Cela suppose de connaître et répertorier ses besoins en amont, de tenir compte de l'ensoleillement des lieux, etc.
Au final, l'équation peut se révéler très intéressante, tant du point de vue écologique, bien sûr, que financier. L'installation, en 1982, de 1 300 m² de capteurs solaires thermiques sur le toit de la piscine municipale pour chauffer les deux millions de litres d'eau du bassin a, par exemple, permis à la commune de Montmélian (Savoie) de réaliser «22% d'économies dès la première année par rapport aux factures antérieures de gaz», affirme Nicolas Podeur, responsable du service énergie. Le retour sur investissement a été réalisé au bout de six ans. Depuis, le système est également utilisé pour le chauffage de la mairie. Le contrat d'entretien n'a pas révélé de coûts cachés. «Nos panneaux solaires ont 27 ans et ils sont toujours en place», se réjouit Nicolas Podeur. La ville a calculé que, chaque année, elle évite le rejet de 210 tonnes de gaz à effet de serre dans l'atmosphère.
Autre énergie en vogue depuis bientôt cinq ans: le bois, le plus souvent utilisé pour le chauffage. Mais cette technique reste en général une solution d'appoint, son coût demeurant élevé. «Se chauffer au bois revient, en moyenne, à 60 euros par mégawatt-heure, contre 28 euros pour le fioul et 35 euros pour le gaz et l'électricité nucléaire», précise Maud Lelièvre (Ecomaires). Plusieurs raisons expliquent cette différence. D'une part, les chaufferies au bois restent un produit cher, d'autre part, la concurrence sur le marché français demeure faible. «Les principaux constructeurs sont scandinaves ou autrichiens. Ils sont peu implantés chez nous, tandis que les fabricants f rançais ne sont pas nombreux, regrette Francis Pellevoizin, responsable des services énergies et parc automobile de la ville de Blois. Nous sommes tributaires de ces sociétés et de leurs délais, sachant que la demande est encore rare.» Ces difficultés n'ont pas empêché la commune du Loir-et-Cher de se convertir au bois. Elle a ainsi mis en service sa chaufferie en janvier 2008, pour alimenter tout un quartier de la ville. Le projet a coûté 4,4 millions d'euros et permet chaque année d'éviter le rejet de 5 000 tonnes de CO
Selon Maud Lelièvre (Ecomaires), le coût d'installation d'une chaufferie au bois est compris entre 3 et 4 millions d'euros. Mais pour avoir une bonne visibilité sur le coût global d'un projet de ce type, elle conseille d'en «examiner également les coûts de production, aussi bien sur le plan de l'installation de la chaufferie que de son fonctionnement». Elle rapporte ainsi le cas d'une collectivité qui, pour acheminer le bois, a dû faire construire... une route!
La dernière difficulté que soulève l'usage du bois tient dans les filières d'approvisionnement, encore inexistantes à grande échelle. «Les collectivités se contentent parfois d'un accord verbal avec les scieries locales, observe Michèle Debayle (Ademe). Il est préférable de conclure un contrat d'approvisionnement précisant les besoins.» Plusieurs matériaux peuvent ainsi être utilisés: écorces, sciures, broyats de déchets de bois, plaquettes... «Le producteur doit s'adapter au combustible et pas le contraire. Sinon, la chaudière risque de tomber en panne», avertit Michèle Debayle. Le contrat d'approvisionnement doit également indiquer les volumes nécessaires, qui sont souvent très importants. A Blois, ce sont ainsi 11 500 tonnes de déchets ligneux (écorces de bois) qui alimentent la chaufferie chaque année.
Francis Pellevoizin, ville de Blois
«La concurrence manque chez les fabricants de chaudières bois.»
De l'eau chauffée ou rafraîchie par le sol
Moins connues, les pompes à chaleur géothermiques extraient et exploitent la chaleur du sol. Ces appareils, utilisés pour le chauffage, sont souvent raccordés à des planchers chauffants mais également rafraîchissants. Le plancher se compose alors d'un réseau de canalisations insérées dans le sol dans lesquelles circule, selon la saison, de l'eau chauffée ou rafraîchie par la pompe. Ces installations sont souvent une réussite pour les collectivités. C'est le cas à Aiglemont, dans les Ardennes. Pour son nouveau pôle de santé, cette commune a installé, en 2007, de la géothermie en source profonde qui a nécessité de creuser 11 puits de 85 mètres de profondeur, pour alimenter une pompe à chaleur. «Le pôle nous a coûté au total 1,7 million d'euros, dont 170 000 euros pour la géothermie, qui seront amortis sur 22 ans, témoigne Philippe Decobert, le maire de la commune. Mais nous avons obtenu des subventions de la région, de l'Ademe, ainsi que le mécénat d'une banque et d'EDF.» Le coût mensuel de l'électricité au mètre carré s'élève à un peu plus de 2 euros, contre une dizaine d'euros auparavant. La ville s'est tout de même dotée d'une chaudière à gaz d'appoint en cas d'incident de la pompe à chaleur. Cette chaudière a été utilisée quelques jours l'hiver dernier, lorsque le thermomètre a dégringolé en dessous de - 20 °C.
Enfin, l'éolien constitue une autre ressource naturelle intéressante pour les collectivités, à condition de disposer d'un budget suffisant. En effet, un mégawatt installé coûte la première année entre 1,3 et 1,5 million d'euros, ce qui comprend l'achat du matériel, les travaux de génie civil et de raccordement. De plus, il n'est pas possible d'en installer n'importe où: il faut regarder le potentiel de vent, les possibilités de raccordement aux réseaux électriques, respecter des obligations de protection de l'environnement (monuments historiques, sites protégés, etc.). Sans compter l'opposition éventuelle des riverains au projet. La combinaison de ces facteurs, associée à un prix d'achat encore élevé du matériel, pèse sur la facture: cette énergie coûte entre 55 et 75 euros/MW, selon les estimations des professionnels.
Alain Soucours, directeur du service bâtiment à la ville des Mureaux
D'une manière générale, Maud Lelièvre (Ecomaires) préfère avertir les décideurs publics sur «la difficulté à estimer le coût réel de toute énergie verte. Outre les coûts d'installation et de fonctionnement, il peut exister également des coûts non intégrés, tels que le traitement des déchets. La question du démontage des éoliennes, par exemple, n est pas du tout incluse dans les calculs actuels.»
Maud Lelièvre, Ecomaires
«Outre les coûts d'installation et de fonctionnement, il peut exister des coûts non intégrés, comme le traitement des déchets.»
Témoignage:
«Un retour sur investissement en moins de cinq ans»
En 2003, la ville des Mureaux (Yvelines) décide de construire un pôle administratif pour regrouper une vingtaine de services jusque-là dispersés. Au même moment, l'Ademe lance un appel à projets pour construire des bâtiments à haute qualité environnementale (HQE). La commune se porte candidate. Le dossier ayant été retenu par l'Ademe, les travaux débutent en février 2004 et s'achève un plus tard. Pour ce bâtiment de 4 500 m2, la ville a opté pour une pompe à chaleur avec plancher chauffant, des panneaux thermiques solaires pour la production d'eau chaude et des dispositifs de récupération d'eaux de pluie. L'opération a coûté 6,62 millions d'euros HT, «soit 3,89% de plus que pour un bâtiment classique, explique Alain Soucours, directeur du service bâtiment. Mais nous avons obtenu 1,79 million d'euros HT de subventions.» Les contrats d'entretien coûtent 9 000 euros HT par an et comprennent plusieurs visites annuelles des techniciens pour vérifer l'état des panneaux thermiques, ainsi que les réglages et la maintenance de la pompe à chaleur. «Nous avons calculé que le retour sur investissement serait réalisé en moins de cinq ans.»
Les Mureaux
DEPARTEMENT: Yvelines
BUDGET 2009: 105 millions d'euros
NOMBRE D'HABITANTS: 32 000