Les indicateurs d'une organisation achats indirects mature
D'une entreprise à une autre, l'organisation des achats indirects peut avoir un niveau de maturité très variable. Elle peut être rapidement évaluée par un état des lieux sur la structure de l'équipe, son ancienneté et les outils achats existants.
Je m'abonneStructure de l'équipe achats indirects
Le premier critère en termes de maturité est l'existence d'une équipe achats indirects à part entière.
Une organisation achats indirects indépendante, où les acheteurs sont dissociés du management hiérarchique business, leur permet d'agir de manière libre et d'exercer pleinement leurs rôles d'influenceurs ou de "gate keeper" en phase de décision finale. En effet, on peut encore trouver, dans certaines entreprises, des acheteurs intégrés dans les structures business et qui reportent directement au directeur de département par exemple. Ceci a pour effet de limiter leur impact stratégique et leurs leviers d'intervention en cas de désaccord avec la décision business.
Une organisation mature, qui regroupe en une seule équipe tous les acheteurs, permet également une gestion optimale inter- catégories et donne au responsable achats une vision exhaustive de l'ensemble du périmètre des achats indirects de l'entreprise. Elle rend possible ainsi la mise en place d'une stratégie à 360° intégrant toutes les catégories et met en lumière les différentes interactions entre elles (exemple : catégories voyage et ressources humaine; marketing et événements, etc..).
Lire aussi : Spaser : les acheteurs publics en ordre de marche
Ancienneté de la structure
Identifier depuis combien de temps les achats indirects sont organisés en tant qu'équipe structurée et indépendante est un indice supplémentaire pour évaluer la maturité des achats indirects d'une entreprise. Plus la mise en place de cette organisation est ancienne, plus il y a de chances pour que les clients internes soient familiarisés avec le processus achats indirects et qu'ils aient confiance en celui-ci.
Cela se traduira opérationnellement par une facilité dans la collaboration business/ acheteur et dans l'avancement des projets. Dans ce contexte mature, l'acheteur pourra investir directement la majeure partie de son temps et énergie dans l'approche stratégique (état des lieux, leviers de négociation, identifications fournisseurs alternatifs, action commune business/ achat vers les fournisseurs, etc..) et génératrice de résultats, plutôt que dans la mise en place du partenariat déjà existant dans ce cas.
En effet, dans une organisation nouvelle, l'acheteur devra prendre son bâton de pèlerin et déployer beaucoup d'énergie à convaincre ses clients internes, à créer le rapport de confiance, à les informer du fonctionnement et de la valeur ajoutée de la fonction achats indirects.
Le partenariat est indispensable à la réussite d'un projet, l'acheteur pourra difficilement mener à terme une négociation seul, sans une partie business impliquée et à ses côtés tout au long du projet. D'où la nécessité qu'un temps soit pris pour mettre en place un partenariat solide.
Outils mis en place
La politique achats et le paramétrage de son outil informatique (plateforme "procure to pay" digitalisant le process de la "commande au paiement") sont les outils clef des acheteurs au sein d'une organisation mature.
La politique achats
La politique achats définit les règles sur lesquelles les acheteurs vont s'appuyer dans leur communication auprès de leurs clients internes (seuil de dépenses à partir duquel l'acheteur doit être impliqué, ou nombre minimum de fournisseurs à inclure dans un appel d'offres, etc...).
L'outil informatique : "P2P"
L'outil informatique ou plateforme "P2P" est le second et non moins essentiel outil achats. Son niveau de paramétrage peut également varier d'une entreprise à une autre. Il a deux fonctions essentielles d'un point de vue des achats indirects stratégiques :
-Renforcer le politique achats - Le paramétrage de la plateforme permet l'envoi par exemple de notifications à l'acheteur lorsqu'une commande dépasse le seuil de dépenses défini dans la politique Achats ou lorsqu'une commande avec un fournisseur hors panel a été identifiée. Grâce à ces informations l'acheteur prendra les actions/ communications nécessaires auprès du client interne pour piloter au mieux son portefeuille et le respect de la politique Achats
-Rapport d'extraction - Les rapports d'extraction (Excel, etc..) disponibles à partir de cet outil permettront à l'acheteur de réaliser des analyses très fines de l'ensemble de dépenses par catégorie et par fournisseur. Ces rapports représentent une mine d'or pour l'acheteur qui pourra définir sa stratégie et son plan d'actions après avoir identifié les postes de dépenses clefs à rationaliser, l'état de son portefeuille achats (catégorie avec panel ouvert ou fermé, fournisseurs avec ou sans contrat, etc....)
Ainsi l'existence au sein de l'entreprise de ces deux outils, la politique achats et la plateforme "P2P", donneront à l'acheteur la possibilité d'avoir une action d'autant plus stratégique sur la maîtrise de son portefeuille que le niveau de définition de ces outils sera fin:
-en amont : informations en interne des règles (via politique achats), identification des postes de dépenses de son portefeuille (via rapports d'extraction)
-en aval : notifications lorsque commandes passées hors politique achats
Lire la suite en page 2: Contrôle du respect de la politique achats
Contrôle du respect de la politique achats
Le respect de la politique achats est fortement lié au contrôle interne de sa bonne application. Selon les entreprises, ce niveau de contrôle est plus ou moins sévère. Il peut aller d'un contrôle ponctuel à un contrôle systématique, par exemple, comme nous l'avons vu précédemment, par l'envoi de notifications à l'acheteur via le paramétrage de l'outil "P2P".
Cependant pour les organisations les plus matures nous pouvons identifier encore un niveau plus élevé lorsque le département "compliance" est nommé pour réaliser le travail de contrôle, délestant ainsi les acheteurs de cette fonction qui peut avoir un impact négatif et générer des tensions dans leur partenariat avec le business.
Nous avons vu l'importance d'établir un partenariat solide entre les achats et le business dans la réussite des projets. L'implication de la compliance comme partie tiers de ce partenariat permet de le préserver ainsi l'image de l'acheteur par rapport au business. L'acheteur garde donc le rôle d'informer des règles et de communiquer lorsque de déviations identifiée mais pas de sanctionner.
Cinq questions clefs :
Le niveau de maturité d'une organisation achats indirects peut donc très rapidement être identifié en posant quelques questions clefs lors d'un entretien d'embauche par exemple :
1) Comment est structurée votre équipe achats indirects ?
2) Depuis combien de temps cette organisation est-elle en place?
3) Quelles sont les règles principales de votre politique achats?
4) Quelle est le rôle du département "compliance" vis-à-vis du respect de la politique achats, notamment ses actions en cas de "non-conformité"?
5) Pouvez-vous me parler de votre plateforme informatique/ outils de commandes et de son niveau de paramétrage ?
Ces cinq questions donneront un état des lieux réaliste sur l'état de maturité de l'organisation achats indirects de cette entreprise.
Enfin, pour conclure et aller encore plus loin, nous commençons à voir dans les organisations les plus matures l'attribution d'un budget marketing permettant de doter les achats de canaux et supports performants et ludiques (vidéos professionnelles, présentations faite par les agences) pour communiquer en interne sur les politiques des catégories, best practices ou résultats obtenus, ceci dans le but d'augmenter toujours plus l'impact des messages et l'adhésion du business.