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Achats : vers une fonction stratégique, étendue et à forte intensité transformationnelle

Salaires, répartition géographique, parité, fonctions émergentes, management de transition, placement des jeunes diplômés... Photographie à 360° des tendances RH à l'oeuvre.

Publié par Geoffroy Framery le - mis à jour à
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Achats : vers une fonction stratégique, étendue et à forte intensité transformationnelle
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La fonction achats poursuit sa mue. Elle devient, selon les termes de Simon Le Bars, Practice Leader chez FYTE, « une fonction augmentée, à la croisée de la maîtrise budgétaire, du pilotage RSE et de la transformation digitale ». Cette réalité se vérifie dans les pratiques de recrutement comme dans la structuration des postes. Dans une étude publiée par Morgan Philips Executive Search et FYTE, un panorama actualisé et documenté des métiers achats est dressé à l'aune des missions conduites en 2024 et début 2025. Salaires, répartition géographique, parité, fonctions émergentes, management de transition : l'ensemble du spectre est couvert. Un exercice d'autant plus pertinent que la complexification de la fonction appelle une compréhension plus fine des compétences réellement mobilisées.

Une fonction au périmètre fonctionnel et stratégique élargi

La fonction Achats évolue désormais sur deux axes complémentaires. Le premier consiste en une spécialisation accrue autour de rôles techniques ou experts - Global Category Manager, Procurement Excellence Manager, PMO Décarbonation. L'autre versant, lui, concrètise une dimension transverse renforcée : les achats s'imbriquent dans les stratégies de transition énergétique, de digitalisation, de sécurisation du risque et de développement durable.

C'est cette évolution que résume Simon Le Bars : « La fonction Achats ne se limite plus à la négociation. Elle structure des stratégies qui doivent être à la fois performantes économiquement et responsables socialement. Cette double exigence impose des profils à forte valeur ajoutée, dotés d'une capacité à dialoguer avec le Comex sur des enjeux extra-financiers ».

Les fonctions émergentes à forte valeur ajoutée

La véritable transformation se joue cependant dans les fonctions dites « émergentes », dont le poids ne cesse de croître dans les organisations.

Avec une croissance de +119 % en un an, le poste de Procurement Excellence Manager devient incontournable. Chargé de structurer et d'optimiser les processus dans une logique d'amélioration continue, il est recherché dans tous les secteurs. Sa rémunération s'établit entre 65 et 85 K€, et son implantation s'étend largement en région (52 %). Autre signal fort, l'essor du PMO Décarbonation Achats, dont les effectifs ont bondi de 41 %. Preuve de la montée en puissance des préoccupations environnementales au sein des directions Achats, ce rôle combine pilotage stratégique et expertise ESG. Il est davantage occupé par des femmes (61 %) et reste bien implanté en dehors des grands centres urbains (52 % en région).

Les Global Category Managers, rémunérés entre 50 et 75 K€, restent également très convoités. Leur capacité à structurer des stratégies internationales sur des familles d'achats critiques leur confère une position centrale dans les grands groupes, notamment ceux organisés en matrices internationales. « Leurs niveaux de rémunération peuvent rivaliser avec ceux de certains responsables achats, reflet d'un périmètre d'action étendu et de la rareté du profil », explique Simon Le Bars.

Une fonction attractive mais à plusieurs vitesses

Si certaines catégories d'acheteurs - notamment dans l'IT, le software, l'énergie ou les prestations intellectuelles - continuent de bénéficier d'une forte tension salariale, le marché connaît globalement un ralentissement. Les revalorisations oscillent entre +2,5 % et +3,5 %, bien en deçà des +5 % enregistrés les années précédentes.

Dans le même temps, le turnover marque le pas, avec un taux de rotation ramené à 11 %, contre 12,5 % un an plus tôt. « Les jeunes diplômés, confrontés à une contraction globale du marché, peinent à intégrer directement les grands comptes, exceptions faites de certains programmes qui tirent leur épingle du jeu tel que le DESMA», analyse Simon Le Bars. En corollaire, les jeunes diplômés se tournent ainsi vers le consulting achats, souvent par défaut, pour débuter leur carrière.

À l'inverse, les acheteurs expérimentés spécialisés dans certaines commodités stratégiques (transport multimodal, EPCM, logiciels critiques) continuent de se voir proposer des niveaux de rémunération très élevés, tirés par leur rareté et la criticité de leurs expertises.

Un mercato sectoriel dynamique

Sur le plan sectoriel, le mercato entre secteurs industriels est plutôt actif. Le repli des volumes d'activité dans l'automobile, amorcé fin 2023 et accentué en 2024, se traduit par une réduction sensible des équipes achats, notamment chez les constructeurs français et les équipementiers. « Ces profils, reconnus pour leur rigueur et leur structuration, migrent aujourd'hui vers des secteurs en tension comme la défense, l'aéronautique, ou encore l'énergie, où la demande reste très soutenue », décrypte Simon Le Bars. La filière nucléaire, les industries de méthanisation ou de biogaz, tout comme la chimie, recrutent activement. À l'inverse, les juniors issus de formations achats, confrontés à une contraction globale du marché, peinent à intégrer les entreprises en direct et se tournent massivement vers les cabinets de conseil spécialisés, souvent faute de débouchés corporate immédiats.

Parité : progrès à la base, frein à la tête

Sur les postes d'acheteurs, la parité est presque atteinte (51 % de femmes), mais elle décroît à mesure que l'on grimpe dans la hiérarchie : 46 % de femmes au niveau manager, seulement 33 % aux postes de direction. Un constat récurrent, qui appelle des politiques RH plus volontaristes pour faire émerger les talents féminins au sommet.

Vers une nouvelle génération de leaders achats

Cette évolution vers des fonctions plus stratégiques, hybrides et tournées vers la transformation exige une nouvelle typologie de professionnels. « Capables de gérer à la fois des appels d'offres complexes, des indicateurs RSE, des projets de décarbonation ou d'e-procurement, ces profils doivent aussi porter une vision, dialoguer avec les parties prenantes internes et externes, et s'adapter à une organisation en mutation », développe l'expert RH côté achats.

Encore et toujours, attirer, fidéliser et faire évoluer ces talents à fort potentiel pour renforcer la résilience économique, environnementale et sociale demeure un impératif stratégique. « Les entreprises qui réussiront cette mue auront un coup d'avance », conclut Simon Le Bars.

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