Voyages d'affaires : la sécurité au service de la sérénité
Les affaires se font aujourd'hui dans le monde entier. Et pas question de rater un business dans un pays sous prétexte qu'il est dangereux! Mais pas question non plus de faire courir des risques aux voyageurs d'affaires : des solutions existent pour allier business et sécurité.
Je m'abonneUne opportunité exceptionnelle se profile au Nigeria ? Pas question de la rater, même si elle se situe dans un pays à risque! Ce qui ne veut pas dire partir bille en tête : la sécurité des collaborateurs en déplacement est sous la responsabilité de l'employeur, tant sur le plan civil que pénal (voir encadré en page 2).
Par ailleurs, un salarié qui se sent en sécurité travaille mieux. "Le fait de savoir que quelqu'un s'occupe d'eux fait qu'ils effectuent leur mission en toute sérénité", rapporte Carinne Saulet, VP Global Product Management chez CWT (Carlson Wagonlit Travel).
Des agences de voyage impliquées dans la sécurité
Les offres des agences de voyage incluent bien souvent la sécurité. A l'instar de CWT, qui a noué des partenariats avec International SOS et iJET et qui propose dans son offre de base l'envoi d'alertes et le "traveler tracking" afin de localiser les collaborateurs. "Une offre plus complète comprend un briefing des voyageurs en amont, des alertes plus complètes, un tracking plus détaillé et un support lors du voyage", précise Carinne Saulet.
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Informations, envoi d'alertes, localisation, assistance sur place... Les offres des agences de voyages sont toutes à peu près les mêmes. Et sont appréciées par les entreprises. "BCD Travel nous informe tout de suite en cas de tempête de neige, d'alertes attentats, de crashs, etc., énumère Annie Guillon, Travel Manager chez Mondelez. En fonction des billets pris, nous savons si des collaborateurs sont concernés ou non." Ce qui permet ensuite de décider d'actions correctives.
BCD Travel s'implique même dans la mise en place d'un programme de gestion des risques au sein de ses entreprises clientes et vient de rédiger un livre blanc à ce sujet. "Très souvent, il n'y a pas de cellule de risque au sein des entreprises", constate Cédric Lefort, senior director Global Business Solutions EMEA chez BCD Travel.
Attention à ne pas confondre assurance et services de sécurité ! Si l'assurance permet de financer les rapatriements, les sociétés spécialisées dans la sécurité des voyageurs apportent de l'aide en cas de problème.
Hôtels et chauffeurs sélectionnés en amont
Les services d'experts de la sécurité des voyageurs vont plus loin. International SOS, par exemple, met à disposition de ses clients un responsable sûreté joignable 24h/24 et 7 jours/7 via téléphone ou e-mail. Un abonnement à cette offre revient, pour un expatrié au Niger par exemple, à un coût compris entre 250 et 500 euros par an suivant la taille de l'entreprise et les services souscrits. L'accès à un réseau de prestataires de sécurité et d'hôtels est également compris dans l'abonnement ; des prestataires de confiance qu'International SOS visite régulièrement et qui peuvent procéder, par exemple, à une évacuation.
Chez Orange, les hôtels où descendent les voyageurs sont également sélectionnés en amont. "Dans les pays à risque, on s'assure auprès de la filiale sur place qu'il n'y a pas de problèmes", ajoute Hélène Billon, directrice Facilities & Mobility Management chez Orange. A noter également que des spécialistes comme International SOS proposent des formations aux entreprises.
La difficile localisation des voyageurs
Selon une étude BCD Travel, 56% des entreprises ne savent pas où sont leurs collaborateurs pendant leurs voyages d'affaires. Or, comment venir en aide à un collaborateur si on ne sait pas où il est ? "Il y a une réelle difficulté à maîtriser l'information : des collaborateurs peuvent être en déplacement professionnel sans qu'on puisse récupérer les données de réservation parce qu'ils ont privilégié une compagnie aérienne pour son programme de fidélisation", observe Michel Dieleman, président de l'Association française des Travel Managers (AFTM). La plupart des outils de localisation se base en effet sur le dossier de réservation.
Une solution avancée par Michel Dieleman : "faire en sorte que l'outil de traitement des notes de frais soit interfacé avec l'outil de réservation". Orange a décidé d'implémenter l'année dernière un outil simple d'utilisation pour inciter les collaborateurs à toujours l'utiliser pour leurs réservations de voyages. Pari gagné puisque 96% des transactions ont désormais lieu via cet outil.
L'éditeur de logiciels Concur a, quant à lui lancé un module qui permet de géolocaliser les collaborateurs qui l'acceptent et de leur envoyer des messages. De quoi localiser les collaborateurs qui ont réservé leurs voyages hors des circuits de l'entreprise. "Par ailleurs, des catastrophes peuvent concerner des collaborateurs qui ne sont pas considérés comme en déplacement professionnel", ajoute Emmanuel Vergé, directeur marketing de Concur. Une idée que partage Michel Dieleman : "On a tendance à focaliser sur les pays dits "à risques" en éludant les risques inhérents à tout déplacement, même sur le territoire national, et pourtant la responsabilité d'entreprise s'y exerce pleinement".
Quid de la responsabilité de l'employeur?
"L'obligation de sécurité de l'employeur est visée à l'article L. 4121-1 du Code du travail qui prévoit que l'employeur doit prendre "toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs", rappelle Me Emmanuel Daoud, avocat associé au sein du cabinet Vigo. Une obligation encore plus contraignante lors de déplacements à l'étranger puisque la jurisprudence considère que l'employeur doit assurer la sécurité de son salarié y compris pour les actes de la vie courante.
Lorsque la responsabilité de l'employeur est reconnue, la victime ou ses ayants droit bénéficient d'une indemnisation complémentaire. "Ce qui peut atteindre des montants considérables puisque l'employeur sera condamné à rembourser les sommes payées par la sécurité sociale au salarié mais également à indemniser l'intégralité du préjudice subi par le salarié", précise Me Daoud. A titre d'exemple, suite à l'attentat de Karachi, l'employeur a été condamné à payer au total plus de 765 000 euros aux victimes. "Dans l'hypothèse d'une condamnation pénale, les peines pourront aller jusqu'à 3 ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende pour un homicide involontaire", rapporte Me Daoud.
Il semble par ailleurs compliqué de mettre en cause les différents prestataires qui ne sont soumis qu'à une obligation de moyens, contrairement à l'employeur qui a une obligation de résultats. "Une action est toutefois offerte à l'employeur sur le terrain de la responsabilité contractuelle. Il lui appartiendra de démontrer que la société a manqué à ses obligations contractuelles. Pour faciliter cette démonstration, il est important que l'employeur établisse un contrat écrit et précis avec la société de sécurité privée", conseille Me Daoud.