Politique voyages : pour une meilleure compliance appliquez les méthodes de conduite du changement
Convaincre plutôt que contraindre est certes plus long et plus difficile mais cela permet d'obtenir une adhésion plus globale et plus solide à une idée, à un programme. Et pour y parvenir plus facilement pourquoi ne pas utiliser la méthode de change management.
Je m'abonneSi les entreprises ont toujours eu besoin d'innover et de changer, le contexte actuel, et c'est particulièrement vrai dans le secteur de voyage d'affaires, fait que le changement s'opère plus vite et tout le temps. Changement de règlementation, évolution des usages, essor de nouvelles normes de tarifications... Les travel managers et les acheteurs sont contraints de revoir et d'adapter sans cesse leurs politiques voyages et sont au quotidien confrontés à la force d'inertie et aux habitudes en internes. La conduite du changement est un art complexe à maîtriser mais fort utile pour s'assurer l'adhésion des collaborateurs. "Comment accompagner le changement pour une transition en douceur" telle était l'approche proposée lors des dernières rencontres de l'AFTM qui pour ses dix ans a voulu ouvrir le champ des possibles en invitant non pas un expert du secteur mais Sabrina Murphy, fondatrice du People's Lab, l'incubateur d'intrapreneuriat de BNP Paribas.
Une histoire d'émotions
"Le changement est lié aux émotions et dans le voyage d'affaires les émotions et l'humain sont très présents, c'est donc peut-être encore plus compliqué d'impulser le changement dans ce secteur. Pour autant je ne crois pas à la disruption totale (mot très en vogue en ce moment), c'est trop déroutant", explique Sabrina Murphy. Mieux vaut appréhender le changement progressivement donc. Mais comment embarquer tout le monde dans la dynamique? Car le souci majeur des travel managers est d'obtenir de tous les collaborateurs l'adhésion et le respect de la politique voyage de l'entreprise, la fameuse compliance. "Vous pouvez mettre plus de process, plus de cadre, plus d'IT mais les chances de réussir une transition par la contrainte sont faible. D'autant que cela va finir par coûter cher opérationnellement, c'est donc un mauvais calcul", estime-t-elle.
Le changement est poussé par l'envie et non par la contrainte. "L'envie est le moteur, à vous de trouver les raisons pour lesquelles vos collaborateurs vont avoir envie d'adhérer, conseille Sabrina Murphy. D'ailleurs il est important de ne pas parler de l'outil en premier mais de la vision et des valeurs portées." Nous sommes donc toujours dans le monde des émotions. Trouver des sponsors en interne permet bien sûr de lever plus facilement les freins qui se présenteront. Mais cela sous-entend aussi de laisser un peu de place à ces soutiens dans le projet. Vous n'êtes plus seul à porter le projet. "On passe de l'individuel au collectif, il faut donc être à l'écoute du collectif, souligne Sabrina Murphy. Si vous attendez des gens qu'ils agissent il faut être en proximité avec eux et faire en sorte qu'ils se sentent concernés."
Maîtriser la communication
On en vient donc à l'épineuse question : comment bien communiquer pour éviter le rejet? Si les travel managers et les acheteurs en général sont habitués à faire preuve de beaucoup de pédagogie en interne, Sabrina Murphy leur a partagé ses astuces tirées de son expérience pour bien communiquer en interne. Car si une bonne communication conduit au succès d'un projet, une mauvaise communication peut signer son échec. Règle n°1 : ne pas communiquer trop tôt! "Attendez d'avoir du tangible avant de communiquer. Si vous le pouvez, testez votre idée avant et en tous cas demandez-vous toujours pourquoi vous voulez communiquer, ce que vous en attendez." Règle n°2 : définir à qui communiquer. On pense à tort qu'il faut communiquer le plus largement tout de suite, or selon Sabrina Murphy il est préférable de cibler la communication : "répertoriez les grandes communautés au sein de votre entreprise en faisant un schéma heuristique par exemple."
Quant à savoir s'il faut solliciter le service communication interne la réponse est plutôt oui mais pas trop tôt et en ne dévoilant pas tout. "Les associer un peu en amont sans leur dévoiler tous les détails peut avoir du bon. Le jour où vous aurez besoin d'eux pour relayer l'information, ils seront prêts et ne se sentiront pas utilisés." Enfin, pour communiquer auprès de sa hiérarchie rien ne vaut les données chiffrées et pour cela vous pouvez utiliser de nouveaux KPI. "Il faut se servir des KPI classiques sinon vous ne parlerez pas le même langage que votre hiérarchie mais pour un projet qui n'apportera pas d'impact mesurable immédiatement vous pouvez identifiez d'autres KPI. Par exemple outre le ROI, le ROTI (return on time investment) est un bon indicateur", conclut Sabrina Murphy.