Commissionnement MICE : le manque de transparence nuit à la compétitivité
Gagner en visibilité sur les tarifs MICE pour être performants dans leurs négociations est le principal besoin exprimé par les acheteurs lors des derniers "Carrefour des experts Travel & MICE" organisé par GBTA France.
Je m'abonneSecteur très concurrentiel regroupant d'un côté des agences globales, des acteurs locaux et des nouveaux venus comme les meeting booking tools ou venue finders (chercheurs de sites) et de l'autre un nombre de prescripteurs différents très important (assistantes, responsables marketing, RH...), le MICE est une catégorie dont les dépenses restent difficiles à consolider pour les acheteurs. Non seulement au sein des entreprises ces dépenses fluctuent beaucoup selon le type d'événement et la période à laquelle ils se déroulent, mais en plus, les prix pratiqués souffrent, selon les acheteurs, d'un manque de transparence. En cause : les tarifs hôteliers et un système de commissionnement variables selon les saisons, les prestataires et les types de contrats (régional ou global).
Pour tenter d'y voir plus clair GBTA France a convié l'ensemble des acteurs de la chaîne de valeur : agence, venue finder, groupe hôtelier et acheteur. Admettant que les pratiques sur les commissions ont besoin d'être clarifiées Mathieu Bidamant, directeur EMEA global business development & strategy chez American Express Meetings & Event n'en a toutefois pas moins défendu l'usage : "Certains clients ignorent encore qu'il existe des commissions. Il est important d'intégrer cet aspect dans les discussions sur le mode de rémunération. Pour autant il n'existe pas de service gratuit et le commissionnement se justifie." Si la communauté des acheteurs, représentée par Karine Desvergnes, responsable achats chez AstraZeneka, n'a a priori rien contre les commissions, il faut néanmoins que celles-ci correspondent à un service réel. "Si l'agence a un rôle logistique dans la recherche et la réservation, je trouve normal de la rémunérer pour cela. A l'inverse, si le prestataire achète en masse, il est normal d'avoir un prix plus compétitif au regard des économies d'échelle réalisées", estime-t-elle.
Pour garantir son business modèle, le venue finder BizMeeting dispose quant à lui d'un double système de rémunération : la commission auprès du prestataire en tant qu'apporteur d'affaires et les frais de services auprès du client puisqu'il propose de prendre en charge la partie facturation et paiement. "Notre position est d'avoir une liste exhaustive de tous les lieux corporate qu'ils nous rémunèrent ou pas. Nous n'utilisons pas d'algorithme pour faire remonter en priorité les lieux les plus rémunérateurs pour nous", se défend Loïc Passemard, CEO associé fondateur de BizMeeting.
Il faut savoir que les commissions sont distribuées par les hôtels, les lieux atypiques tels les théâtres ou cinémas ne pratiquant pas ce type de rémunération auprès des intermédiaires, agences ou venue finders. Celles-ci s'échelonnent en général de 8 à 12% avec parfois des pratiques de sur-commissionnement. "Cela arrive ponctuellement dans le cadre du lancement d'un hôtel ou pour améliorer le taux d'occupation d'un hôtel en particulier, explique Véronique Holveck, directrice des ventes France pour le groupe hôtelier intégré Deutsche Hospitality. Sinon chez nous les commissions pratiquées sont de 10% et ce pour tout le monde qu'il s'agisse d'agence ou de plateforme." Donc dans 99% des cas le prix facial avant négociation sera la même partout, seule la force de négociation fera la différence.
Mais encore faut-il avoir une visibilité sur ce prix. "Avoir une commission sur un prix qui n'est pas affiché ne contribue pas à gagner la confiance des clients internes. De même, lorsqu'on utilise une technologie aujourd'hui nous n'avons pas toute l'offre qui apparaît dans l'outil. Il est difficile dans ces conditions de démontrer la performance économique de l'offre", souligne Karine Desvergnes. Pour Nathalie Levine, senior sourcing manager MICE chez Epsa cette opacité est due au caractère fluctuent des tarifs hôteliers inhérent au secteur. "Il est difficile pour un hôtelier de lancer un RFP tant il travaille à la carte. D'ailleurs il n'est pas certain qu'un tarif lissé sur l'année soit intéressant pour le client. En revanche ce qui est négociable de façon lissée sont les conditions de vente", explique-t-elle. Autrement dit tout ce qui n'intègre pas le prix de base : condition de paiement, condition d'annulation, flexibilité, etc.
Si, grâce à cette table ronde, on comprend mieux la construction tarifaire MICE, l'appréhension par les acheteurs de ces dépenses reste compliquée et de longue haleine. D'où une tendance de fond qui va à l'externalisation de la gestion des meetings pour les gros évènements et à l'adoption d'un modèle centralisé pour les évènements de moindre ampleur ou ponctuels.
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