Recherche
Mag Décision Achats
S'abonner à la newsletter S'abonner au magazine
En ce moment En ce moment

Isabelle Ragault-Rolland : "Les achats contribuent au verdissement du gaz"

Publié par le | Mis à jour le
Isabelle Ragault-Rolland : 'Les achats contribuent au verdissement du gaz'

Engagée dans la digitalisation, la direction achats approvisionnement et logistique de GRTgaz accompagne également l'entreprise dans sa mutation et le verdissement de son gaz face aux enjeux environnementaux de demain.

Je m'abonne
  • Imprimer

Vous avez été nommée au 1er mai 2021 directrice achats approvisionnements et logistique au sein de GRTgaz. Quel est votre périmètre achats ?

J'ai pris mon poste après un parcours dans l'industrie gazière, au sein de GRTgaz et précédemment de GRDF. J'ai exercé différentes fonctions dans des métiers techniques d'exploitation, d'ingénierie et d'expertise, ainsi que dans le domaine commercial. Aujourd'hui, je gère quatre pôles au sein de la direction achats, approvisionnement et logistique (D2AL) : le pôle achats ; le pôle véhicules et immobilier, pôle très opérationnel avec tout ce qui touche à l'environnement de travail et à l'immobilier, avec 180 sites en France et une flotte auto de 1500 véhicules ; le pôle logistique qui pilote la supply chain approvisionnant essentiellement la direction opérationnelle, la direction des projets (environ 320 M€ d'investissement) ainsi que la direction technique (maintenance spécialisée) ; depuis le 1er octobre, suite à une évolution d'organisation, je gère aussi un 4e pôle baptisé "transformation & digital". Au total, je dispose d'une équipe de 45 acheteurs pour un budget achats de plus de 680 millions d'euros.

Comment sont organisées vos équipes ?

Chaque pôle comprend des départements portant chacun une spécialité dans son domaine. Pour les achats, il y a différents types de profils d'acheteurs : des acheteurs opérationnels, des acheteurs référents et des acheteurs leaders. Nous fonctionnons beaucoup en mode projet avec des binômes entre un acheteur et un leader technique ou des trinômes avec un donneur d'ordre. Le tout est chapeauté par un décideur d'achats, qui est au niveau d'un Codir et connaît bien le domaine. En tant que directrice achats, approvisionnement et logistique, je suis garante de l'achat et de sa procédure. Je suis à la fois responsable des acheteurs au sein du pôle achats mais aussi fonctionnellement responsable des interlocuteurs métiers qui ne sont pas dans ma direction mais participent au process achats.

Enfin, des instances représentatives avec des représentants des différentes directions valident les stratégies achats. Par ailleurs, pour des montants d'achats élevés, la validation passe par la direction générale.

Quelle est votre feuille de route ?

Une feuille de route était écrite quand j'ai pris mes fonctions. Avec les équipes, nous travaillons à sa mise à jour. Elle s'inscrit dans un contexte de transformation et de performance économique qui relève du projet d'entreprise de GRTgaz baptisé "CAP24". Pour les achats, les mots d'ordre sont "simplifier et fluidifier". En particulier, il s'agit d'être toujours plus proches de nos bénéficiaires internes, répondre au mieux à leurs attentes et avoir une pertinence de notre stratégie achat auprès de nos 3600 fournisseurs.

Votre organisation achats a évolué au 1er octobre 2021. De quelle façon ?

Au 1er octobre, nous avons fait évoluer l'ensemble de l'organisation de la direction achats, approvisionnement et logistique. Les trois pôles historiques de la direction ont été organisés de manière à être clairement identifié par nos bénéficiaires. La nouveauté est la création d'un pôle transformation & digital qui témoigne de la digitalisation de nos process et de la fonction achats.

Quel est le rôle de ce pôle digital et transformation ?

Il a trois ambitions. Tout d'abord, avoir une vision globale de tous nos outils informatiques et SI, grâce à deux projets importants : d'une part, faire évoluer SAP pour l'ensemble de l'entreprise comme pour ma direction (l'impact est notamment pour les activités de la supply chain), d'autre part, j'aimerais avoir le GO pour faire évoluer le SI achats. Les deux autres ambitions visent à savoir quelles données mettre à disposition de nos bénéficiaires, ainsi que la mise à disposition d'analyses dans un but de performance. Du côté du pôle véhicules et immobilier, on voudrait récupérer les "irritants" de nos bénéficiaires de manière simple, avec un smartphone en prenant des photos par exemple. Cela reste encore en réflexion car nous disposons déjà d'outils en interne.

Lire la suite en page 2 de cet article

Dans un contexte d'enjeux environnementaux, c'est essentiel pour votre coeur de métier d'innover au risque de devoir disparaître. Comment les achats contribuent-ils à la réflexion sur les nouveaux gaz ?

Arnaud Chaillou

Arnaud Chaillou

Face aux enjeux sociétaux et à un objectif de neutralité carbone en 2050, nous avons besoin de verdir notre gaz. Les achats contribuent accompagner ce mouvement de l'entreprise. La première vague de "verdissement" a consisté dès 2000-2005 à injecter sur le réseau de transport du biométhane produit à partir de déchets agricoles. Ce dernier a les mêmes caractéristiques que le gaz naturel mais il ne vient pas d'un puit en Mer du Nord ou en Russie. Actuellement, plus d'une vingtaine de sites d'injection de biométhane sont en service dans le réseau de GRTgaz et nous exploitons cinq installations de rebours (32 projets en cours). D'ici 2024, une centaine de postes de biométhane seront raccordés à notre réseau de transport et, au total, environ 700 postes seront raccordés en France.

Il s'agit d'un changement d'approche pour le métier car notre réseau est initialement fait pour transporter le gaz et le livrer vers les industriels et les réseaux de distribution. Dans ce nouveau cas de figure, il s'agit d'accueillir le gaz vert du producteur français. Il faut donc être innovant sur les équipements pour accueillir ces nouveaux gaz en créant des partenariats avec des fournisseurs. Actuellement, nous travaillons sur d'autres types de gaz comme l'hydrogène. Pour cela, nous réalisons des tests sur notre propre réseau comme avec le démonstrateur Jupiter1000 installé à Fos-sur-Mer dans les Bouches du Rhône. (NDLR : l'installation a pour but de transformer l'électricité renouvelable en gaz pour pouvoir la stocker. L'électricité en surplus sera en effet convertie en hydrogène mais aussi en méthane de synthèse).

GRTgaz possède également un centre de R&D baptisé FenHYx, récemment mis en service afin de tester la capacité des infrastructures gazières nouvelles et existantes à transporter de l'hydrogène. (NDLR : Cela s'inscrit dans un mémorandum signé le 30 septembre au Forum Hydrogen business for climate de Belfort sur des recherches autour de l'hydrogène).

Nous testons aussi des nouveaux matériels comme des chromatographes. Tous ces projets se traduisent par l'achat de tubes, de vannes et d'équipements capables de supporter cet hydrogène. Dans l'Est de la France, le projet mosaHYc vise à développer un réseau de canalisations d'hydrogène entre la France, l'Allemagne et le Luxembourg, à travers la conversion de 70 km de gazoducs existants et la création de 30 km de nouveaux hydrogénucs.

A horizon 2050, GRTgaz ambitionne de transporter sur son réseau 100% de gaz décarbonés et bas carbone, en majorité de l'hydrogène renouvelable et bas carbone et du gaz issu de la méthanisation. Il faut trouver la solution technique, trouver des partenariats et les monter dans une réflexion conjointe entre plusieurs acteurs du secteur.

Enfin, quels sont vos prochains défis achats ?

Digitaliser la fonction, accompagner l'entreprise dans le défi des nouveaux gaz décarbonés et bas carbone, témoigne d'une politique achats cohérente avec notre RSE et notre raison d'être, enfin renforcer notre performance économique et réduire significativement nos émissions de CO2.

Biographie d'Isabelle Ragault-Rolland

1993 : Isabelle Ragault-Rolland rejoint l'entreprise Gaz de France

2008 : elle devient responsable grands comptes au sein de la direction commerciale

2014 : elle rejoint la direction réseau IDF de GRDF

2018 : Isabelle Ragault-Rolland a réintégré GRTgaz comme directrice adjointe des projets et de l'ingénierie.

1er mai 2021 : elle devient Directrice Achats Approvisionnements et Logistique de GRTgaz.


GRT Gaz en bref

Janvier 2005 : création de GRTgaz qui reprend les activités transport de Gaz de France. L'entreprise est le principal gestionnaire de réseau de transport de gaz en France (Teréga assure le transport dans le sud-ouest de la France).

Juillet 2011 : Ouverture et augmentation du capital de GRTgaz à hauteur de 25% auprès de la Société d'Infrastructures Gazières, consortium public détenu par le groupe Caisse des Dépôts.

2017 : GRTgaz fait l'acquisition de la société Elengy, précédemment filiale directe d'Engie, et le deuxième plus grand opérateur européen de terminaux GNL, avec 3 terminaux.

En juillet 2021 : Engie annonce la vente d'une participation supplémentaire de 11,5% du capital de GRTgaz à la Société d'Infrastructures Gazières (groupe Caisse des Dépôts).

Comment travaillez-vous avec vos fournisseurs ?

Comme toutes les directions achats avec des référencements, des panels... Nous mettons en place des business reviews pour rencontrer nos fournisseurs et faire un point chaque année. De manière générale, certaines grosses directions comme la Direction des Projets qui a un budget de 320 millions d'euros d'investissement (avec 80% d'achats) ont en leur sein des contract managers. Ces derniers n'appartiennent pas à ma direction mais font partie du métier achats. Nous travaillons étroitement avec eux et voulons renforcer une animation pour les contracts managers de toutes les directions pour s'assurer que ce qui a été décidé au début est bien mis en oeuvre. Notre feuille de route est claire : renforcer le suivi des contrats en interne, poursuivre une politique d'achats responsables et développer les partenariats avec les fournisseurs.

Où achetez-vous ?

Nos fournisseurs se trouvent essentiellement sur le territoire français et 25% de nos dépenses achats sont réalisés auprès de PME françaises. Toutefois, certains achats se font également à l'étranger - en Europe essentiellement - comme les robinets ou les tubes qui transportent le gaz dans le cadre d'une structure commune avec le transporteur de gaz belge. Pour d'autres produits comme les turbines à gaz de nos stations de compression, ce sont plutôt des achats à l'international, comme aux Etats-Unis.

Quel est votre plus gros risque fournisseur ?

Notre plus gros risque est également notre priorité numéro un : il s'agit de la sécurité. Nous mettons en place de nombreuses rencontres avec nos fournisseurs pour partager sur ce sujet. Il s'agit non seulement de la sécurité liée au gaz mais aussi celle qui relève des accidents de travail sur nos sites.

Que recouvre votre politique achats responsables ?

Elle s'inscrit dans notre raison d'être : "Ensemble, rendre possible un avenir énergétique sûr, abordable et neutre pour le climat". Nous avons acheté près d'1,6 millions auprès d'ESAT et d'EA (entreprises adaptées), notamment dans le cadre du débroussaillage et de la maintenance de nos sites. De plus, nous avons été sollicités pour signer la nouvelle version de la charte relations fournisseurs responsables. Nous l'avions déjà signée en 2015 et nous souhaitions aller plus loin. Cette nouvelle charte est centrée autour des thématiques carbone-sécurité-innovation. Cela s'inscrit dans la politique RSE de GRTgaz qui a la volonté de devenir neutre en carbone d'ici 2050.

Nous avons également travaillé sur le sujet de la dématérialisation en lien avec la direction financière avec la mise en place d'une réduction de nos délais de paiement, du reverse factoring (solution de financement permettant d'obtenir le paiement anticipé des factures à des conditions privilégiées) dès 2017... Nous travaillons aussi sur des documents légaux afin d'éviter tout travail dissimulé grâce à une plateforme e-attestations.

Parlons innovation. Comment la portez-vous ?

L'Open Innovation via l'appel à projets est né au sein de la direction achats, approvisionnement et logistique en 2016. Le comex a décidé l'année dernière de créer une direction innovation dédiée qui travaille en transverse et intègre les salariés de la D2AL anciennement impliqués dans l'Open Innovation.

A titre d'exemple, il y a 2 ans, le projet Celia a été mis en place via l'Open Innovation. Ce projet s'intéresse à la logistique du dernier kilomètre : cela consiste à mettre en place des containers qui font office de consignes sur les lieux de dépôts où travaillent des responsables de secteurs. Ces derniers étant également responsables de la maintenance, ils ne peuvent pas attendre la livraison car ils sont souvent en déplacement sur les lieux d'intervention. Grâce à ce système de consigne, le livreur peut déposer à toute heure une palette dans le container sans entrer sur le site grâce à l'aide d'un code unique. Le responsable de secteur est averti de la livraison et peut la récupérer quand il revient de déplacement. Une quarantaine de containers ont par la suite été installés.

Lire la suite en page 3 de cet article

 
Je m'abonne

NEWSLETTER | Abonnez-vous pour recevoir nos meilleurs articles

La rédaction vous recommande

Retour haut de page