Crédit mobilité & multi-mobilités : mouton à cinq pattes de la sobriété énergétique des flottes ?
En mettant en place pour leurs salariés des solutions de mobilité durable alternatives ou complémentaires à la voiture de fonction, les entreprises réduisent le coût énergétique de consommation de carburant de leurs véhicules. Une sobriété énergétique qui passe aussi par l'électrification de la flotte avec l'acquisition de véhicules électriques dont la consommation d'électricité coûte trois fois moins cher que celle des carburants fossiles.
Je m'abonneAutopartage, covoiturage domicile-travail, trajets intermodaux voiture/transport en commun, vélos et trottinettes électriques en location... Une variété de nouvelles mobilités durables et partagées alternatives à la voiture de fonction s'offre aujourd'hui aux salariés. Selon la dernière enquête de la plateforme européenne de mobilité, Freenow, menée auprès de 500 professionnels français sur l'avenir de la voiture de fonction, plus de la moitié des salariés (59 %) seraient prêts à renoncer à leur voiture de fonction au bénéfice d'un budget de multimobilités. Et si leur entreprise leur donnait le choix, 41 % d'entre eux sans voiture de fonction choisiraient un budget mobilités plutôt qu'une voiture de fonction.
LA SOBRIÉTÉ ÉNERGÉTIQUE DES FLOTTES ENCOURAGÉE PAR DES MESURES GOUVERNEMENTALES
Face au défi de la transition énergétique et de l'évolution du contexte réglementaire (LOM, ZFE...) l'intégration des nouvelles mobilités dans les flottes d'entreprise n'est plus une option. Les politiques de mobilité deviennent un enjeu majeur de sobriété énergétique pour les entreprises et la seule réponse à la variété des modes de déplacements des collaborateurs. Cette tendance est d'ailleurs encouragée par les pouvoirs publics. Dans le cadre de son Plan de sobriété énergétique annoncé le 6 octobre, le gouvernement a pris plusieurs mesures concernant les flottes d'entreprise. Il mise notamment sur le forfait mobilités durables dont il a relevé le plafond d'exonération fiscale à 800 euros par an et par collaborateur contre 600 euros auparavant et sur le report modal de l'avion ou de la voiture vers le train. Sans oublier la suppression des trajets inutiles (en incitant au télétravail) et une aide au covoiturage d'une prime de l'ordre de 100 euros dont pourra bénéficier chaque nouvel inscrit à une plate-forme de covoiturage. Si le gouvernement promeut ainsi la mobilité durable en entreprise, il souhaite surtout que les entreprises s'y engagent. Il a ouvert une plateforme d'engagement en ligne en faveur de la sobriété énergétique. Dans sa charte de 15 actions à mener, trois concernent la mobilité des salariés (mobilité douce, forfait mobilités durables et optimisation des déplacements professionnels). Déjà plus de 30 entreprises du CAC 40 se seraient engagées selon le gouvernement.
68 % DES ENTREPRISES METTENT EN PLACE LE FORFAIT MOBILITÉS DURABLES
Les entreprises l'ont bien compris. À l'heure de la sobriété énergétique, elles misent sur de nouveaux modes de déplacement dits doux ou durables, alternatifs à la voiture de fonction pour réduire fortement la facture énergétique de consommation de carburant de leur flotte. Selon un sondage Opinion Way réalisé en juin dernier pour Ecomob.club, un Think Tank de décideurs d'entreprises et d'administration sur l'écomobilité, 68 % des entreprises interrogées ont déjà mis en place ou déploient le forfait mobilités durables pour leurs salariés. Le groupe Télécoms Orange a ainsi instauré ce forfait orienté sur le covoiturage domicile-travail en coopération avec l'opérateur Klaxit et sur la location de vélos à assistance électrique. « Le covoiturage de nos salariés fonctionne bien sur certains sites importants éloignés des grandes villes et sur des zones d'activités où sont regroupées plusieurs entreprises » indique Anne Bertrand, sa directrice de la gestion des véhicules.
UNE COMMUNAUTÉ DE « VÉLO TAFFEURS » POUR ALLER AU TRAVAIL À BICYCLETTE
De même, dans le cadre de sa politique RSE, le spécialiste du traitement des données des entreprises, Luminess basée à Mayenne (Mayenne) a monté un partenariat avec le même Klaxit pour sceller un accord avec la communauté de communes de Mayenne et la région Pays-de-la-Loire afin d'aider financièrement les covoitureurs. Concrètement, le conducteur perçoit de la région une aide de 0,1 euro par km et par passager véhiculé, alors que le passager en reçoit 0,5 euro par trajet. Luminess a étendu ce dispositif sur son site lensois en coopération avec Klaxit et la région Hauts-de-France. « Au total, une cinquantaine de collaborateurs utilisent le covoiturage domicile-travail » précise Judith Mehl, sa directrice de l'engagement et de la communication. Luminess s'appuie aussi sur une communauté de « vélos taffeurs », pour promouvoir la pratique de la bicyclette pour se rendre au travail. « Nous avons mis en place un système qui finance ces salariés à vélo. Cette aide s'élève à 50 euros par an pour ceux qui roulent de 400 à 1 000 km, à 75 euros par an pour les parcours entre 1 000 et 1 500 km et à 100 euros par an pour ceux qui roulent à vélo plus de 1 500 km annuellement », détaille-t-elle.
PASSER DE LA CAR POLICY À LA MOBILITY POLICY
Soucieux d'accompagner leurs clients dans leur stratégie de réduction du coût énergétique de leurs véhicules, les loueurs longue durée se positionnent également sur les mobilités alternatives à la voiture de fonction. « On constate beaucoup d'intérêt et de demandes de nos clients sur des solutions de nouvelles mobilités. Le contexte de la sobriété énergétique donne une nouvelle justification et un nouvel élan à cette tendance » souligne Pascal Vitantonio, directeur de la stratégie et du développement chez ALD Automotive, loueur de véhicules multimarques. Le loueur a ainsi lancé auprès des entreprises, sa solution digitale ALD Move de gestion de la multimobilités, vouée à faciliter les déplacements quotidiens des salariés grâce à la mise en place du forfait mobilités durables et du crédit Mobilité. « Avec ALD Move, nous proposons aux clients de passer de la Car Policy à la Mobility Policy, autrement dit de passer de la gestion des déplacements en voiture de fonction à celle de la multimobilité », explique-t-il. Quelques centaines de salariés d'entreprises clientes ont déjà adhéré à l'outil d'ALD pour leurs déplacements domicile-travail en covoiturage ou à vélos électriques.
LE CRÉDIT MOBILITÉ MONTE EN PUISSANCE AU SEIN DES FLOTTES
« De plus en plus d'entreprises proposent aussi le crédit Mobilité à leurs collaborateurs. Ce dispositif consiste soit à attribuer un plus petit véhicule de fonction électrique que le véhicule thermique auquel le salarié peut prétendre et lui accorder en compensation un crédit mobilité pour ses déplacements personnels..., soit à supprimer son véhicule de fonction et lui octroyer en compensation une grosse enveloppe de crédit Mobilité pour sa mobilité professionnelle et personnelle », rappelle Audrey Martin, consultante chez Traxall, gestionnaire de flotte externalisée pour grands comptes. Avec l'ambition de devenir leader de la mobilité durable en ligne avec son plan stratégique « Arval Beyond », Arval France, le loueur multimarques de véhicules, vise de son côté 25 000 utilisateurs de mobilités durables complémentaires au véhicule de fonction en 2025. « Nous proposons à nos clients une offre de mobilités multimodales pour l'ensemble de leurs salariés comme l'autopartage, la location de vélo, le vélopartage, les trottinettes partagées, la location de 2 roues, toutes réunies sous notre application mobile Arval Mobility App », précise Jonathan Chesneau, son directeur des solutions de mobilité.
L'AUTOPARTAGE POUR OPTIMISER L'USAGE DES VÉHICULES ET EN RÉDUIRE LA CONSOMMATION ÉNERGÉTIQUE
Les entreprises adoptent aussi d'autres solutions pour réduire le coût énergétique de carburant de leur flotte. Bon nombre d'entre elles mettent en place des solutions d'autopartage, des véhicules souvent électriques que se partagent plusieurs collaborateurs pour leurs déplacements quotidiens. « On croit beaucoup à l'autopartage qui permet à la fois d'optimiser l'utilisation des véhicules et de réduire leur consommation énergétique de carburant. Avec déjà 3 600 véhicules électriques en autopartage, on vise près de 5 000 voitures partagées, soit 40 % de notre flotte, en 2025 » affirme Anne Bertrand. Chez Orange, on incite aussi les salariés au télétravail pour limiter les déplacements superflus. Enfin, poussés à « verdir » leur flotte par des réglementations nationales et européennes, les entreprises accélèrent l'acquisition de modèles électriques et hybrides rechargeables pour remplacer leurs véhicules diesel. Une opportunité de plus pour renforcer la sobriété énergétique de leurs parcs de véhicules.
LE TCO DES VÉHICULES ÉLECTRIQUES COMPÉTITIFS FACE À CELUI DES VÉHICULES THERMIQUES
Le coût total de détention (ou Total Cost Ownership, TCO) des véhicules électriques rivalise avec celui des véhicules essence et diesel. Pour Audrey Martin consultante chez Traxall « le TCO d'un véhicule électrique est même inférieur à celui d'un modèle thermique grâce à des dispositifs fiscaux avantageux sur l'avantage en nature du véhicule de fonction dont la charge patronale et salariale est divisée par deux, aux aides à l'achat comme le bonus écologique de 4000 euros qui compense en partie le surcoût d'un modèle électrique, à la possibilité de sortir le prix des batteries des amortissements non déductibles et de rouler plus de 20 000 km par an avec un coût de consommation d'électricité trois fois moindre que celui des énergies fossiles ». Même en tenant compte de l'investissement de l'entreprise dans des bornes de recharge à domicile ou sur site « qui représente en moyenne une centaine d'euros par mois et par véhicule » selon Bertrand Lamarche, directeur conseil chez Traxall, le TCO d'un modèle électrique est plus compétitif que celui d'un homologue essence ou diesel. Avec des autonomies qui s'allongent (400 à 500 km), les véhicules électriques s'avèrent également pertinents pour de gros rouleurs qui font 200 km à 300 km par jour. La motorisation diesel ou essence reste néanmoins appropriée à des trajets de grande distance.