Retour d'expérience CPO: de l'art de muscler sa supply chain chez Prada
La marque de luxe a fait de la traçabilité des fournisseurs une priorité. Comment la mettre en musique pour optimiser la résilience de la supply et anticiper les risques ? Éléments de réponse avec Lorenzo Brunello, chief procurement officer indirect chez Prada, à l'occasion d'Ivalua Now qui s'est tenu ces 11 et 12 mars.

Dans l'industrie du luxe, chaque détail compte. Derrière l'éclat des vitrines, un travail de fond s'opère pour garantir une traçabilité irréprochable des fournisseurs. Chez Prada, cette mission a récemment pris un tournant stratégique avec une refonte complète du processus de qualification. Objectif : ne laisser aucune zone d'ombre dans la chaîne d'approvisionnement.
Cartographie des fournisseurs : une traçabilité repensée
Chez Prada, pas question de tolérer la moindre faille. "La transparence et la qualité sont nos principaux objectifs", insiste Lorenzo Brunello, chief procurement officer indirect de la maison italienne. Pour y parvenir, la marque a revu en profondeur son processus de qualification des fournisseurs. Tout commence assez classiquement par une phase d'enregistrement - chaque prestataire doit dévoiler sa carte d'identité d'entreprise, ses certifications et ses pratiques commerciales. Vient ensuite l'onboarding, véritable sas d'entrée dans l'univers de la marque, où les fournisseurs prennent connaissance des standards imposés et des règles du jeu. Mais l'étape clé reste la qualification, taillée sur mesure en fonction du niveau de criticité du prestataire. "Un fabricant de cuir n'est pas soumis aux mêmes exigences qu'un fournisseur de services, et plus son rôle est stratégique, plus les contrôles sont stricts", relate le CPO.
Une approche qui permet de distinguer les fournisseurs critiques - ceux impliqués directement dans la fabrication - des autres. Mais l'enjeu va au-delà des achats directs. Prada s'attaque aussi à un défi de taille : la gestion des sous-traitants. Jusqu'ici, la couverture du panel de fournisseurs indirects de rang 1 et de rang 2 restait difficile à décrypter. Une opacité qui pouvait masquer certains risques en matière de qualité, d'éthique ou de conformité. C'est ici même qu'intervient un grand changement : "Avec le recours de plateformes digitales, nous avons désormais une vue complète des relations entre nos fournisseurs de premier, deuxième et même troisième niveau", s'exclame Lorenzo Brunello. En clair, en centralisant ces informations, la marque peut non seulement auditer plus efficacement ses prestataires, mais aussi anticiper les risques liés aux interdépendances de la supply chain.
Subsidiarité et empowerment managérial : donner les clés plutôt que contrôler
Révolutionner la gestion fournisseurs ne se limite pas à un changement d'outil. C'est toute une culture d'entreprise qui est en jeu. "Nous ne parlons pas de gestion du changement, nous parlons d'empowerment des équipes", insiste le directeur. Concrètement, Prada a revu son mode de fonctionnement. Désormais, chaque requester - autrement dit, chaque collaborateur qui fait appel à un prestataire - est responsable du suivi de son enregistrement et de sa qualification. "Les requesters doivent maintenant s'assurer eux-mêmes que leurs fournisseurs complètent le processus d'onboarding et de qualification", précise Lorenzo Brunello. Une refonte qui fluidifie les démarches et responsabilise davantage les équipes en interne.
Mais pour que cette nouvelle approche porte ses fruits, encore faut-il que chacun s'approprie ces nouvelles règles du jeu. Prada a donc mis en place un dispositif de formation sur-mesure à l'aide de vidéos courtes et de sessions interactives. Lorenzo Brunello explique : "Nous savons que personne ne lit les manuels, donc nous avons opté pour des formats plus engageants". L'idée ? Faciliter l'adhésion en simplifiant l'accès à l'information. Tout un programme qui semble déjà porter ses fruits.
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