Trois leviers pour optimiser vos achats de transport colis et palettes
Dans une logique d'optimisation, mieux vaut, pour le service achats, éviter de s'en tenir à la seule négociation des tarifs. D'autres leviers tout aussi, voire plus, efficaces peuvent être actionnés en soutien du service supply chain.
Je m'abonne"Le sujet de la stratégie transports est une préoccupation centrale dans les entreprises aujourd'hui. Il ne l'était moins il y a encore quelques années", constate Sébastien Bouyx, senior manager chez Accenture Stratégy et expert en achat de transport.
Une évolution confirmée par Bénédicte Secroun, directrice générale associée du réseau Euklead (cabinet conseil en stratégie opérationnelle). "Le transport est un poste important dans les frais généraux. Nous voyons émerger de vraies stratégies d'optimisation car les entreprises sont conscientes que ce poste de coût est générateur de valeurs".
Porté par les nouvelles habitudes créées par le e-commerce, le niveau d'exigence est tel que le transport est en effet devenu un facteur différenciant. Adapter sa stratégie est donc incontournable. Plusieurs leviers peuvent être actionnés.
1) Établir un appel d'offres performant
L'optimisation du poste achat de transport commence par un appel d'offres répondant parfaitement aux attentes du chargeur. "Un bon appel d'offres doit permettre de consulter au moins 15 à 20 prestataires", préconise Bénédicte Secroun. La première étape consiste pour l'acheteur à identifier les bons transporteurs. Puis de leur présenter un état des lieux précis et complet des besoins pour éviter les achats spot, souvent trop couteux : mono-colis, messagerie, affrètement, expressiste.... maritime, terrestre, ferroviaire, aérien ? Il s'agit d'aller chercher le meilleur, par segment.
"Pour établir le cahier des charges, il est indispensable de faire un historique de ses flux, sur au moins un an : l'origine et la destination, le poids des colis (poids moyen et dispersion), le volume, la saisonnalité...C'est chronophage mais indispensable pour segmenter efficacement. Il est également indispensable de collecter les besoins du métier", conseille Sébastien Bouyx. L'appel d'offres doit par ailleurs absolument tenir compte de la "promesse client". Pour cela, l'acheteur doit répondre à la question suivante : quel est le niveau de service que nous voulons offrir à nos clients en termes de rapidité, de services complémentaires... ?
La difficulté consiste à placer le curseur exactement au niveau souhaité, en veillant à ne pas demander de "surqualité". Matthieu Erly, fondateur de ColisConsult, souligne que : "L'acheteur BtoB doit interroger ses services utilisateurs : a-t-on vraiment besoin d'un service express pour tous nos flux ? Si on fait le parallèle avec le transport aérien de personnes, cela reviendrait à dire que tous les salariés voyageraient systématiquement en business class, quelle que soit leur fonction et la durée du trajet. Impensable... ? et pourtant !"
Bénédicte Secroun glisse : "dans cette démarche, l'acheteur se positionne souvent comme un médiateur entre les services logistiques et les services commerciaux de l'entreprise. Ensemble, ils doivent déterminer le coût acceptable par rapport au niveau de service souhaité". Délai de livraison, traçabilité, qualité de la livraison du dernier kilomètre, gestion des retours, développement durable... Autant de points de vigilance dont on ne peut faire l'économie, en particulier en BtoC.
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"En e-commerce, l'acheteur doit prêter une attention toute particulière à la qualité de la livraison car il s'agit de la partie émergente d'un site. Il faut également s'assurer de la capacité du prestataire à gérer les grosses périodes d'activité", insiste Xavier Mallet, directeur général de Colissimo. "Dans ce domaine, il est indispensable aussi de s'intéresser à la capacité du prestataire d'assurer une livraison à l'international dans de bonnes conditions".
Afin d'optimiser l'appel d'offres et être certain de ne pas avoir de mauvaise surprise, l'idéal est d'établir sa propre grille de demande de prix. Les transporteurs ont en effet des modalités tarifaires hétérogènes. Il est facile de s'y perdre. Pour faciliter ces opérations d'appel d'offres, il existe des plateformes digitales dédiées comme Ticontract du groupe Transporéon. "Une fois le travail de préparation d'appel d'offres effectué, notre outil permet de diviser par trois la charge de travail des acheteurs. Tout le monde répond en même temps, dans une forme imposée. Cela a l'avantage d'offrir une analyse des données plus poussée et plus rapide !", promet Stéfanie Assel, senior key account manager de Ticontract.
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2) Construire une relation durable avec ses prestataires
L'idéal après un premier tour d'appel d'offres est de mener une discussion de gré à gré. "Outre la discussion du tarif, cela permet à l'acheteur de s'assurer que le transporteur a bien intégré le cahier des charges. Certains sont complexes, et pas toujours très clairs...", sourit l'expert d'Accenture. Tous les professionnels s'accordent sur le sujet : on ne choisit pas son prestataire uniquement sur un prix de base. On le retient pour la qualité annoncée et un service précis. Plus le volume est important, plus le tarif est intéressant. Il faut donc veiller à ne pas retenir un nombre trop important de prestataires afin de ne pas disperser les commandes, tout en s'assurant néanmoins une porte de sortie en cas de défaillance de l'un d'entre eux.
Quant à la négociation en elle-même, elle ne doit pas mener à une prestation trop peu couteuse, au risque de provoquer un turn over important des prestataires, chronophage pour l'ensemble des équipes concernées. "Dans le transport routier national, les marges sont aujourd'hui inférieures à 3%, les négociations de tarifs sont donc très limitées", explique Gilles Béchet, directeur opérations et supply chain pour Bartle, cabinet de conseil en transformation. "En revanche, sur le transport maritime et ferroviaire, ainsi que sur le transport à valeur ajoutée, il y a probablement encore des tarifs à négocier".
Dans tous les cas, l'expert de Bartle conseille de mettre en place des contrats longs, deux à trois ans, permettant aux transporteurs d'avoir une visibilité suffisante afin d'installer les outils nécessaires à l'amélioration régulière de la prestation. "Lorsqu'il s'agit de nouveaux prestataires, je préconise de travailler pendant 3 ou 4 mois sans appliquer les systèmes de bonus/malus généralement prévus dans les contrats. Le transporteur a besoin d'un peu de temps pour caler son organisation. Il est contre-productif d'être trop coercitif", suggère Sébastien Bouyx. Gilles Béchet renchérit : "les meilleurs contrats de transport sont ceux intégrant des critères clairs et générant des réductions de coût pour les deux parties !".
La nécessité de construire une relation de confiance est de plus en plus forte, en raison d'un rétrécissement de l'offre. "Nous sommes actuellement sur une période favorable aux transporteurs. Par conséquent, côté achats, nous sommes moins sereins", soupire Lionel Naudy, responsable transport pour l'enseigne But (enveloppe transport de 20 millions d'euros). "Une pénurie de transporteurs se fait sentir. Non seulement cela permet aux prestataires d'imposer leurs prix mais aussi de choisir de privilégier tel ou tel client en période de surcharge. Il faut donc impérativement faire en sorte d'être ce client privilégié, en nouant une véritable relation de partenariat avec eux".
Vision partagée par Alain Willaey, responsable des achats transport de Nexans Europe, et actuellement en plein renouvellement de son appel d'offres triennal. "Je me suis interrogé sur l'opportunité de relancer un appel d'offres puisque depuis septembre 2017, nous sommes confrontés à un manque de prestataires. Les transporteurs font leur choix et choisissent les missions les plus faciles". Un travail important a ainsi été mené depuis un an pour séduire les prestataires. "J'ai demandé à la supply chain de travailler à la palettisation de nos produits. Mission accomplie. Nos produits sont désormais traités par la messagerie comme des produits standards. Et puis, nous avons travaillé sur l'élargissement des horaires de chargement et déchargement. Cela leur facilite la tâche, nous sommes désormais un client attractif".
Après l'appel d'offres, il est utile de vérifier minutieusement les facturations. "Les tarifications sont tellement complexes que les erreurs sont très fréquentes", alerte Bénédicte Secroun. "Il faut faire du cost management pendant plusieurs mois lorsque de nouveaux contrats sont signés".
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"La livraison est le point tangible d'une relation virtuelle entre un e-commerçant et son client"- Bruno Sanlaville, fondateur de BSC, société de conseils en stratégie Transport et Logistique, spécialisée sur le dernier kilomètre.
Pourquoi parle-t-on si souvent, en e-commerce, de ce fameux dernier kilomètre ?
C'est le dernier maillon du triptyque ramassage-acheminement-livraison. Dans la pratique, le dernier kilomètre peut en réalité être de 100 mètres en zone urbaine ou de 20 kilomètres en zone rurale. On en parle si souvent car la hausse des volumes du e-commerce en a fait un point de friction. Ce dernier kilomètre cristallise les coûts pour le transporteur et les insatisfactions pour le client. Il est donc essentiel de le maîtriser. N'oublions pas que la livraison est l'élément tangible d'une relation virtuelle entre un e-commerçant et son client. Une livraison en retard, ou de mauvaise qualité, peut détourner un client de son fournisseur.
Quelles solutions de livraison privilégier ?
Je milite pour que les e-commerçants offrent le panel de livraison le plus large possible. Par voie postale, par voie express, ou en relais de proximité. C'est essentiel, le client du e-commerce est exigeant, le moindre grain de sable peut provoquer un abandon de commande. Dans ces conditions, le service achats doit aussi s'intéresser aux services périphériques du transporteur. Livraison le samedi, dimanche ? Dépôt en consignes ? Sur le lieu de travail ? Quelle relivraison ?
Quels sont les points de vigilance lors du choix du prestataire ?
La fiabilité, la possibilité de tracer les colis en temps réel, la rapidité de livraison... Autant de points qui peuvent faire la différence au moment du click de validation de la commande. Ou de non retour sur le site en question.
3) Optimiser sa supply chain
"Nous sommes arrivés à un point de négociation sur les transports aujourd'hui qui ne permet pas d'aller beaucoup plus loin. Le gain ne peut se faire désormais que sur l'opérationnel", analyse Alain Willaey (Nexans Europe). Gilles Béchet, du cabinet Bartle, est sur la même ligne : "Les gains sont plus importants dans l'optimisation de l'utilisation des transports que dans l'achat lui-même". En raison des notions de " poids volumétriques ", il peut être extrêmement pertinent de revoir ses emballages par exemple.
Autre outil d'optimisation : le digital. Il est souvent judicieux d'investir dans des solutions web ou logicielles pour tracker au plus près ses flux, adapter ses achats transport, solliciter le meilleur transporteur pour un envoi ou encore organiser plus efficacement ses tournées. "A service équivalent, le prestataire le plus intéressant n'est pas forcément le même sur toutes les tranches de poids", souligne Michel Waterschoot, sales manager Europe du Sud de la société Descartes. Son progiciel, un TMS (Transport management system), a pour vocation d'optimiser les coûts de transport, via différentes applications. "Si le chargeur a une flotte en propre, le TMS lui permet d'optimiser les tournées de livraison pour réduire le nombre de véhicules, d'heures supplémentaires ou de kilomètres parcourus. On sait qu'un déploiement de TMS permet, pour ¾ des entreprises, un gain d'au moins 5% des coûts de transports".
Enfin, dans une démarche de procédure d'optimisation de sa supply chain, se pose évidemment la question d'une externalisation éventuelle. La direction achats doit alors mener un travail très approfondi d'études des coûts. Accompagnée des autres services de l'entreprise, elle doit examiner les conséquences sur l'organisation interne et le service client. "A coût moindre ou équivalent d'une logistique interne, les clients bénéficient d'une logistique plus efficace. Grâce à notre volume d'achats de transport, et même avec notre marge de commissionnaire de transport, les clients font une économie de 5 à 10% sur leurs achats transport", assure Bertrand Chabrier, directeur du développement du prestataire logistique C-Log.
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