Priorités des directions achats 2023: les 12 tendances du CNA et d'AgileBuyer
AgileBuyer et le Conseil national des achats (CNA) viennent de publier leur traditionnelle étude sur les tendances et priorités des départements achats. En 2023, peu de surprises : sont au rendez-vous l'inflation, les relocalisations, la gestion des risques fournisseurs et la RSE. Heureusement qu'en contrepartie de ces nombreux cailloux dans leur chaussure, les directions achats sont de plus en plus vues comme stratégiques.
Je m'abonne
82% des directeurs achats sont heureux
Pour Olivier Wajnsztok, directeur associé d'AgileBuyer, cabinet de conseil en achat opérationnel, qui a mené l'étude en partenariat avec le Conseil national des achats (CNA), le premier enseignement de cette étude est le fait que les acheteurs sont des gens heureux puisque 82% ont répondu l'être. « C'est une bonne nouvelle : malgré tous les problèmes auxquels ils doivent faire face, les acheteurs sont heureux de faire ce métier », analyse-t-il. Ce chiffre traduit avant tout une réelle passion pour ce métier.
A noter que plus l'entreprise est petite, plus les directeurs achats s'estiment heureux : si 81% des directeurs achats sont heureux dans les grandes entreprises de plus de 5 000 salarie´s, ce chiffre grimpe a` 92% pour les TPE.

Des fournisseurs pratiquent une inflation "opportuniste"
Si l'inflation est bien réelle, les augmentations des prix pratiquées par les fournisseurs ne le seraient pas toujours. C'est en tout cas ce que pointe l'étude, 81% des professionnels interrogés disant que certains de leurs fournisseurs pratiquent de l'inflation "opportuniste", c'est-dire des hausses de prix de manière non justifiée. « On parle de fournisseurs profiteurs. Il ne s'agit pas, comme l'année dernière, uniquement d'une relation déséquilibrée mais du fait que les fournisseurs appliquent une inflation opportuniste. Cela pose un gros problème dans le cadre d'une relation qui devrait être de confiance », pense Olivier Wajnsztok.
Pour y faire face, les acheteurs doivent s'assurer du bien-fondé des augmentations demandées en entrant dans les structures de coûts des produits achetés. Un vrai challenge pour les directions achats.

68% des directions achats sont couvertes à 50% et plus sur l'énergie en 2023
C'est un chiffre fort de l'e´tude : face a` la flambe´e des prix du gaz et de l'e´lectricite´ et les potentielles ruptures d'approvisionnement, 68% des directions achats sont couvertes a` 50% et plus sur l'e´nergie en 2023. « Même si beaucoup d'acheteurs disent avoir anticipé la hausse du coût de l'énergie, un tiers ne l'a pas fait. Ces derniers vont au-devant de grands risques », nuance Olivier Wajnsztok.
La hausse du coût de l'énergie induit un autre risque : l'impact sur la santé financière des fournisseurs qui risquent, notamment les entreprises moyennes, de ne pas se relever d'un tel surcoût. L'étude révèle que 38% des directions achats craignent la disparition de leurs fournisseurs strate´giques en raison de l'augmentation du prix de l'e´nergie.

Une lueur d'espoir du côté des pénuries
Si, en 2022, 59% des directions achats ont été confrontées à des pénuries critiques pour leur entreprise, Olivier Wajnsztok entrevoit une lueur d'espoir pour 2023 : « Les pénuries sont toujours à un niveau élevé mais sont moins importantes qu'en 2022. Certaines pénuries ont même disparu comme les containers », se réjouit-il. Ainsi, seules 30% des directions achats pensent que les pénuries vont augmenter en 2023 tandis que 50% disent qu'elles vont stagner et 20% diminuer.
Du côté des transports, le ciel est moins radieux : 71% des directions achats anticipent des difficulte´s de livraison avec leurs fournisseurs strate´giques en 2023. Un chiffre qui est en légère amélioration par rapport à 2022 (-8 points).

Les directeurs achats s'orientent vers le "friendshoring"
L'étude sur les priorités des directeurs achats révèle que presque la moitié des directions achats (49%) envisagent une relocalisation en 2023, en raison des crises successives. C'est 2 points de plus qu'en 2022. Une tendance qu'Olivier Wajnsztok qualifie de « friendshoring », un terme qu'il utilise pour décrire le fait de se fournir auprès de pays amis. « C'est une nouvelle notion : les personnes interrogées citent en premier la sécurisation comme bénéfice recherché à la relocalisation. On cherche à s'approvisionner dans des pays avec lesquels les relations sont stables afin de sécuriser les approvisionnements », analyse-t-il.
Si la se´curisation des approvisionnements est citée en premier parmi les objectifs de relocalisation (33%), le souci de l'impact environnemental arrive juste apre`s (24%) suivi du time to market (16%).

Le "Made in France" est toujours d'actualité
Le "Made in France" est un crite`re d'attribution business pour 65% des directions achats (contre 61% en 2022). Un sujet qui n'est plus seulement un effet d'annonce, comme il y a quelques années, mais qui devient un axe strate´gique de compe´titivite´ au sein des entreprises. En effet, 36% des directeurs achats rapportent que le pourcentage d'achats Made in France est un axe strate´gique de re´flexion de leur entreprise (5 points de plus qu'en 2022).
Autre bonne nouvelle pour le "Made in France" : 37% des directions achats avouent n'avoir aucune contrainte pour acheter des produits fabriqués en France, soit 9 points de moins qu'en 2022.

Les directions achats gèrent mieux leurs risques
En 2023, 71% des directions achats auraient un objectif en matière de gestion des risques fournisseurs. Olivier Wajnsztok constate de manière générale une meilleure gestion des risques de la part des directions achats. « Après trois crises successives - les gilets jaunes, le Covid et la guerre en Ukraine - , la gestion des risques est plus intégrée. Si bien que le risque fournisseurs vis-à-vis de Taïwan est anticipé », constate Olivier Wajnsztok. En effet, l'étude révèle que 26% des directions achats ont élaboré un plan d'achats spécifique en cas d'invasion de Taïwan par la Chine. Rappelons que Taïwan est un des premiers fournisseurs en termes de composants électroniques et de nombreux secteurs risquent d'en souffrir.

Des plans de réduction des coûts "défensifs"
Malgré l'inflation, les directions achats sont toujours attendues par leur direction générale sur la réduction des coûts, qui est citée en premier par les répondants à l'étude, devant la RSE et la contribution a` la gestion des crises. La réduction des coûts/contribution au résultat net reste d'ailleurs l'objectif premier des achats en 2023 pour 66% des répondants. Un chiffre en hausse de plus de 10 points par rapport à 2022 (cité à 55%). Une réduction des coûts qui s'apparente pour les directions achats plutôt à une maîtrise des coûts afin de ne pas voir les marges de l'entreprise trop grignotées par la hausse des prix. C'est ce qu'Olivier Wajnsztok surnomme des plans de réduction des coûts « défensifs ». « Il y a cinq ans, les plans de réduction des coûts étaient offensifs. Aujourd'hui, on cherche à limiter la casse », précise-t-il.

En 2023, 70% des directions achats ont des objectifs liés à la RSE
La RSE devient incontournable : 70% des directions achats ont en 2023 des objectifs liés à la RSE, ou, au développement durable. « L'envie de s'engager sur des sujets RSE est très forte, et notamment de travailler sur l'empreinte carbone. Mais le calcul de cette dernière, et notamment du Scope 3, est encore compliqué pour beaucoup de personnes interrogées », constate Olivier Wajnsztok. En effet, si pour 32% des directeurs achats, leur fonction contribue à la stratégie RSE de l'entreprise sur la mesure et la réduction de l'empreinte carbone, 68% des directions achats ne connaissent pas l'empreinte carbone de leurs achats. Un calcul pourtant essentiel pour se donner une trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre et réussir à limiter le réchauffement climatique à 1,5°C. Rappelons que, pour atteindre cet objectif, nous devons diviser nos émissions de CO2 par quatre.

Une fonction de plus en plus stratégique
La fonction achat est de plus en plus stratégique au sein des entreprises. En témoigne l'étude sur les tendances et priorités des départements achats qui révèle que 82% des directions achats disent avoir vu leurs responsabilités renforcées à la suite des crises successives (crise sanitaire, ruptures d'approvisionnement...). Ce rôle plus stratégique n'a pas pour autant fait évolué la place du directeur achat dans la hiérarchie des entreprises : l'étude révèle que 62% des directions achats sont au CODIR/COMEX et/ou rattache´es au pre´sident de leur entreprise, un chiffre étonnamment stable depuis 2021 qui, on l'espère, sera amene´ a` e´voluer au regard du ro^le strate´gique de la fonction achats pour contenir les cou^ts et se´curiser les approvisionnements dans le contexte actuel.

Les achats prennent le virage de la data
Les achats ont gagne´ en digitalisation. Ainsi, la data arrive en te^te des outils qui ont le plus d'impact sur les directions achats : la data achat consolide´e et la data analytics sont premières ex-aequo avec 22% de citations. Elles devancent les outils collaboratifs, qui sont de´sormais rele´gue´s a` la 3e place. Viennent ensuite l'automatisation des ta^ches (RPA, ...) a` 18% et bien loin derrie`re les marketplaces (8%), l'IA (6%) la blockchain (2%).
L'avenir est donc a` la data. Si bien que 23% des directions achats ont pre´vu de former leurs e´quipes au data mining ou au data analytics.

La moitié des directions achats subit une pénurie de main d'oeuvre
La fonction achats, au me^me titre que d'autres fonctions de l'entreprise, n'est pas e´pargne´e par la guerre des talents : la moitié des directions achats déclare subir une pénurie de main d'oeuvre. « Je ne connais pas de directeurs achats qui a ses équipes au complet », rapporte Olivier Wajnsztok. Cela est d'autant plus problématique que les directions achats ont prévu de recruter en 2023 : 33% des directions achats interrogées au cours de l'étude ont déclarer vouloir recruter en 2023, contre seulement 29% en 2022 et 12% en 2021. Les directeurs achats vont donc devoir trouver des arguments pour attirer les candidats. Une démarche RSE, si elle est sérieuse, peut être une piste intéressante pour capter certains profils.

Les tendances 2023 commentées et analysées par Olivier Wajnsztok - AgileBuyer
Retrouvez en exclusivité, cette émission spéciale "Tendances et priorités métiers des départements achats 2023".
Fin du diaporama
Sur le même sujet :
Sur le même thème
Voir tous les articles Stratégie achats