L'agilité des directions achats dans un monde globalisé
Les directions achats sont soumises à des impondérables géopolitiques qui influent sur leur performance. Les incertitudes et la complexité de l'environnement international se sont accentuées et il convient d'anticiper les situations afin de développer son business ou protéger son activité.
Je m'abonneLe renforcement de nouveaux acteurs mondiaux ou régionaux désireux de prendre une place plus importante dans le concert des nations, de plus en plus de situations internationales complexes et potentiellement explosives sont apparues.
Les menaces politiques, légales, technologiques, sociales ou environnementales impactent économiquement les Etats mais aussi les entreprises.
Dans ce contexte, il convient de mettre en place des solutions qui permettent d'anticiper et de s'adapter à des menaces aussi variées que le terrorisme, les embargos, les catastrophes naturelles ou les cybers attaques,...
L'information : clé de voûte de la décision
Les entreprises sont toutes soumises à la pression de certaines situations géopolitiques mais celles qui sauront les anticiper et en tirer profit prendront indéniablement une longueur d'avance sur leurs concurrents.
Le point de départ d'une action bien anticipée est l'information qui doit reposer sur des bases factuelles et analytiques et non influencées par des dogmes, lieux communs, par l'urgence ou l'émotion afin d'arriver à des conclusions objectives qui permettront une action pertinente.
De même, ces informations doivent être analysées selon le prisme de la stratégie de l'entreprise et de la criticité pour son business.
Cette stratégie se doit d'être flexible car certains évènements peuvent être particulièrement abrupts et soudains comme un embargo complet, décrété par de grandes puissances contre un pays en réponse à des actes précis.
Les sources d'informations à disposition des entreprises pouvant nourrir cette stratégie et contribuer à l'agilité de la société sont aussi diverses qu'hétéroclites : De think tank aux services économiques régionaux des ambassades, les chambres de commerce, Business France en passant par des journalistes ou experts, les canaux sont pléthoriques.
Néanmoins, il convient de sélectionner ces sources pour ne pas être noyé sous les informations, choisir les plus fiables pour avoir des informations sûres et formaliser les relations pour faciliter la gestion de ces contacts.
Pour ce faire, des partenariats privé-public comme avec des organismes tels que l'IFRI (Institut Français des Relations Internationales), l'EPHE (Ecole Pratiques des Hautes Etudes) ou l'IRIS (Institut des Relations Internationales et Stratégiques), encore avec des ambassades françaises dans des pays clés sont des solutions idéales.
Ces réseaux et organismes de réflexion peuvent fournir des rapports fouillés sur des zones géographiques précises, tout en étant suffisamment ouverts et pluridisciplinaires pour présenter des opportunités que l'entreprise partenaire n'aurait pas envisagées.
Il est bien-sûr également envisageable pour une entreprise de recruter une ou plusieurs personnes dont la mission est d'évaluer la pertinence de la stratégie et la politique du groupe en matière d'achat en fonction du contexte international.
De l'information à l'action
Risk manager : le consultant stratège de l'entreprise
La masse de données recueillie en interne ou en externe nécessite un traitement et une analyse afin d'apporter de la pertinence et une plus-value à l'entreprise ; c'est là qu'intervient le Risk manager.
Capable de gérer son panel de sources, de se tenir au courant des remous et soubresauts de l'actualité et savoir les analyser pour aider sa société à en tirer profit, sa place au sein des comités de direction l'aide à nourrir la vision de l'entreprise et d'éviter des externalités négatives.
Les analyses du Risk manager apporteront une vue plus ouverte et consciente de la stratégie et pourront se traduire par des ajustements de la politique achat.
Capable d'avoir une vue "macro" grâce à ces interactions avec les différentes directions mais aussi une vue "micro" grâce au suivi de la mise en application pratique de ses recommandations lui permet d'avoir une vue complète de l'entreprise et de son environnement.
Sa vision micro et macro de l'entreprise et de son environnement lui permettront de formuler de meilleures recommandations et des applications pratiques plus adaptées au terrain.
Gestion des risques fournisseurs
Dans un monde globalisé, la diversification des sources d'approvisionnement n'est plus un luxe mais une nécessité car si des pays ou des régions du monde sombrent dans le marasme économique, social, politique ou connaissent des fluctuations monétaires néfastes, il convient d'avoir des voies de repli afin de sécuriser son business.
La première option, pertinente mais potentiellement coûteuse, est de maintenir un réseau de fournisseurs partout dans le monde.
Cela inclut des coûts de gestion élevés et un sourcing dans des zones potentiellement à risques mais contrebalancés par un prix d'achat moindre, notamment dans les pays à bas coûts.
La deuxième option consiste à se fournir selon la stratégie achat établie et les préférences de l'entreprise tout en maintenant un panel actif plus large.
Le catalogue de fournisseurs actifs sera donc plus restreint ou plus localisé que dans la première option mais les prestataires potentiels pouvant répondre aux demandes de l'entreprise seront en capacité d'agir rapidement, grâce aux Request For Quotation ou Request For Informations et à une certaine proximité et connaissance mutuelle.
Cet effort de maintien de solutions de repli a des coûts de gestion relativement élevés et peut parfois sembler une perte de temps, mais s'avère être plus qu'utile lors de crises, celle du Covid par exemple, ou même comme levier de négociation lors de contractualisation avec des prestataires n'apportant plus de plus-value à l'entreprise.
Une partie moins évidente de prime abord mais particulièrement pertinente du travail du Risk manager est également de repérer des opportunités, notamment achat, dans des pays qui semblent prometteurs.
Grâce à ses contacts et ses connaissances, le Risk manager est en capacité de voir des possibilités dans les politiques menées par les pays pour attirer des entreprises.
Par Christophe Segot-Chicq : Analyste Sourcing chez SVP. Auparavant il a eu plusieurs expériences en tant qu'acheteur à la MGP et chez Galderma. Il a également été chef de projet chez L'Oréal, Nestlé-Purina et Mondelez.