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DossierLa boîte à outils du droit social pour les directions achats

Utilisation du téléphone de fonction, suspension de permis, pratique religieuse... La gestion des RH en entreprise soulève des questions très variées. Retrouvez dans ce dossier des fiches pratiques répondant aux problématiques de droit social que tout manager est amené à rencontrer.

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La boîte à outils du droit social pour les directions achats

1 Comment mener un entretien de recadrage

Un entretien de recadrage est une pratique managériale visant à rappeler un certain nombre de règles, que le salarié aurait pu enfreindre. Attention, ce type d'entretien ne relève pas d'une obligation légale et se distingue de l'entretien disciplinaire: il n'a pas pour objectif de déboucher sur une sanction, et la convocation se fera oralement.

2 Rester objectif et s'appuyer sur des faits

Avant tout, il est nécessaire de clarifier l'objectif et les enjeux de cet entretien. Lors de l'entrevue, il est important de s'appuyer sur des faits précis, sans jugement de valeur ni généralisation. Le manager veillera à conserver un esprit bienveillant et à préciser les conséquences des écarts constatés.

Le but de l'entretien ne sera pas de "faire la morale" au collaborateur, mais de lui exposer la problématique et de le laisser s'exprimer, afin d'aboutir avec lui à une solution. Il est recommandé de consigner les échanges par écrit, et d'assurer un suivi des décisions prises lors de cet entretien.

Ces quelques conseils sont inspirés de l'ouvrage "Dix entretiens incontournables en entreprise". Retrouvez ici les bonnes feuilles consacrées à l'entretien de recadrage, pour plus de précisions sur son déroulement.

Face à un collaborateur qui cumule les retards, les oublis ou qui ne respecte pas les obligations liées à sa mission, un entretien de recadrage peut être nécessaire. Comment mener cet échange? Quelques conseils inspirés de l'ouvrage "Dix entretiens incontournables en entreprise".

3 Surveillance des collaborateurs: les règles à respecter

En matière de surveillance des salariés, l'employeur est tenu à des obligations de loyauté (il n'a pas le droit de "piéger" un collaborateur), de transparence et de proportionnalité (à titre d'exemple, placer une caméra derrière chaque poste de travail ne respecterait pas ce principe). Ainsi, des preuves recueillies par le biais d'un stratagème qui aura permis de prendre le salarié en faute ne seront pas valables. La finalité de la surveillance doit également être précisée et respectée: si un dispositif a été déclaré à une fin d'amélioration des process (par exemple la géolocalisation pour optimiser les tournées des livreurs), il ne pourra être utilisé pour prouver qu'un salarié ne respecte pas son temps de travail, par exemple.

Les salariés doivent être informés, individuellement et collectivement, de:

  • l'existence de tout dispositif de vidéosurveillance ou de géolocalisation
  • de la finalité poursuivie par la mise en place de ces systèmes
  • de la (les) personne(s) référente(s) en la matière

    4 Les règles en matière de vidéosurveillance

    La vidéosurveillance sera avant tout mise en place dans un objectif de sécurité, par exemple pour prévenir le vol de marchandise. Le dispositif pourra être utilisé pour contrôler le temps de travail des collaborateurs, mais uniquement si l'employeur respecte les principes de loyauté et de proportionnalité, ainsi que l'intimité des salariés.

    Les images recueillies pourront être conservées pour une durée maximale d'un mois. Bien entendu, il est interdit de filmer certains lieux sensibles: toilettes, vestiaires, douches... Enfin, il est nécessaire de consulter le CHSCT de l'entreprise avant de mettre en place tout système de contrôle de l'activité des salariés. Dans les petites entreprises, il est fortement recommandé de consulter les délégués du personnel.

    5 Les règles en matière de géolocalisation

    L'entreprise a le droit de mettre en place un dispositif pour situer ses véhicules de fonction et améliorer sa logistique, sous réserve de déclarer la mise en place de ce système auprès de la Cnil. À noter, avec l'entrée en application du Règlement européen de protection des données personnelles (RGPD) en mai 2018, cette obligation de déclaration initiale devrait être remplacée par l'obligation de pouvoir apporter la preuve, à tout moment, que l'entreprise respecte les règles de protection des données personnelles dans ses traitements (pour plus de détails sur le RGPD, consulter le dossier "RGPD: tout savoir sur le règlement européen qui chamboule vos traitements de données").

    Tout comme pour la vidéosurveillance, la finalité du traitement doit être précisée (et respectée!), et ce dernier doit être proportionnel et en adéquation avec le but recherché.

    6 La surveillance de l'utilisation d'Internet par les employés

    L'employeur peut filtrer l'accès au Web de ses salariés, notamment pour veiller à ce qu'ils ne consultent pas des sites frauduleux. En effet, l'entreprise peut être tenue responsable des pratiques illicites commises par ses salariés sur le Net. Il est également possible de bloquer l'accès à certains sites jugés non utiles pour l'activité de l'entreprise et préjudiciables à la productivité du salarié (réseaux sociaux, vidéos en ligne, etc.).

    Concernant la messagerie, les mails reçus sur la boîte professionnelle du collaborateur ont un caractère professionnel, à moins que l'objet ne mentionne explicitement leur caractère privé. L'employeur est en droit de conserver et consulter l'historique de navigation de ses collaborateurs pendant 6 mois maximum.

    Enfin, dans la sphère privée, l'employeur ne peut interdire à ses salariés d'utiliser les réseaux sociaux, mais il existe une jurisprudence sur les collaborateurs qui tiendraient des propos portant préjudice à l'entreprise.


    Vidéosurveillance, géolocalisation, navigation sur Internet... Les nouvelles technologies permettent une surveillance accrue des employés par l'entreprise. Mais quelles sont les limites? Peut-on utiliser les données ainsi recueillies pour sanctionner un salarié indélicat?

    7 Réagir face à une plainte pour harcèlement

    8 Quelle définition pour le harcèlement moral?

    Première difficulté face à une telle situation: la définition juridique de la notion. En effet,l'article L. 1152-1 du Code du travail mentionne le harcèlement moral sans définir cette notion, qui est surtout décrite par ses conséquences sur la victime. Le harcèlement en lui-même implique l'existence d'agissements répétés entraînant une dégradation des conditions de travail, que cette démarche soit volontaire ou non: en effet, il est possible d'être harceleur sans le vouloir!

    Le harcèlement moral est constitué quand il y a

    • Des agissements répétés à l'encontre du salarié
    • Une dégradation des conditions de travail du salarié
    • Un rapport de causalité entre ces deux éléments

    Les retours de congés longue durée (sabbatique, maternité) sont notamment des situations à risque. Voici quelques formes d'agissements de harcèlement qui ont été reconnus par la jurisprudence:

    • Ne plus confier de travail à un salarié et l'isoler
    • Employer un vocabulaire insultant
    • Imposer des objectifs irréalisables
    • Ne pas répondre aux demandes d'explication du salarié

    Ces agissements doivent être répétés pour que le harcèlement soit établi, mais attention: deux fois suffisent, même si beaucoup de temps sépare les deux occurrences. Bien souvent, la dégradation des conditions de travail se traduira par de nombreux arrêts maladie du salarié. Faire constater cette dégradation de l'état de santé par le médecin traitant et par la médecine du travail donnera plus de poids à la plainte.

    9 Quelle définition pour le harcèlement sexuel?

    Ce type de harcèlement est plus précisément défini depuis 2012 (voir l'article L. 1153-1 du Code du travail). Il recouvre deux types d'actes:

    • Des propos ou comportements à connotation sexuelle qui portent atteinte à la dignité de la personne, en raison de leur caractère dégradant ou humiliant
    • Toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but d'obtenir un acte de nature sexuelle

    10 Quelles actions mettre en oeuvre?

    Face à une plainte pour harcèlement, il est important de prendre au sérieux les paroles du salarié. Il convient de ne pas agir avec précipitation et d'essayer, autant que possible, de vérifier les faits.

    Si la plainte est portée à la connaissance du chef d'entreprise ou du responsable RH par les représentants du personnel, l'employeur doit mettre en place une enquête interne, qui sera confiée le plus souvent à une personne neutre (un salarié étranger au milieu professionnel des protagonistes). Celle-ci entendra les personnes concernées ainsi que les éventuels témoins, et veillera à formaliser par écrit ces entretiens, qui seront datés et signés.

    Si c'est l'inspection du travail qui a été saisie, l'employeur devra apporter son concours à l'enquête et tenir l'inspecteur informé de l'évolution de la situation.

    11 Quelles seront les sanctions?

    Lorsque le salarié a porté plainte à tort, il ne peut être sanctionné, à moins qu'il n'ait agi de mauvaise foi (ce qui sera difficile à prouver). Une médiation, voire une mutation peuvent être envisagées.

    Si les faits sont avérés, l'employeur peut sanctionner le harceleur de façon proportionnée, en respectant les règles disciplinaires. Le plus souvent, la sanction sera le licenciement.

    Enfin, si le doute persiste (et c'est souvent le cas, malheureusement), le droit profite au harceleur désigné. L'employeur peut alors tenter de proposer une mutation concertée, ou alors des formations, notamment en management, avec une sensibilisation renforcée aux risques psychosociaux.

    Attention, car en cas de harcèlement, la responsabilité de l'entreprise peut être engagée.

    Lire l'article complet consacré au harcèlement: "Harcèlement : comment réagir face à une plainte"


    Une plainte pour harcèlement ne doit pas être prise à la légère. Face à une telle accusation, l'inertie de l'entreprise sera très mal vue des juges. Quelle réaction adopter?

    12 Gérer le fait religieux en entreprise

    En matière de gestion du fait religieux en entreprise, le cadre législatif est strict: la loi définit et restreint les droits et devoirs de l'employeur sur la question. Ainsi, il est interdit d'imposer, de façon arbitraire et générale, des mesures limitant la religion au sein de l'entreprise. La pratique de la religion constitue une liberté constitutionnelle, et la liberté de conviction est protégée par de nombreux textes internationaux, communautaires et nationaux (notamment la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ou encore le préambule de la Constitution française de 1946).

    13 Des restrictions possibles, notamment via le règlement intérieur

    Cependant, des exceptions existent. Les textes restreignent la liberté de religion dans le cas où elle entrave la bonne réalisation de la mission pour laquelle le salarié a été embauché, l'organisation du département ou de l'entreprise, ou encore l'efficacité de l'équipe.

    Par ailleurs, la Loi El Khomri (article L. 1321-2-1 du Code du travail) permet d'inscrire dans le règlement intérieur de la structure le principe de neutralité et de restreindre la manifestation des convictions du salarié, "si ces restrictions sont justifiées par l'exercice d'autres libertés et droits fondamentaux ou par les nécessités du bon fonctionnement de l'entreprise et si elles sont proportionnées au but recherché". Par exemple, des conditions particulières d'hygiène et de sécurité légitiment que l'employeur impose des limites à la liberté de culte.

    Signes religieux en entreprise: quelle jurisprudence?

    La question du port du voile en entreprise a notamment fait débat ces dernières années. La Cour de justice de l'Union européenne a rendu en mars 2017 des arrêts pour deux affaires portant sur cette question. Il en ressort que l'entreprise peut, sous certaines conditions, interdire à ses salariés le port d'un signe religieux ostentatoire. La "volonté d'afficher une image de neutralité vis-à-vis de ses clients" a été notamment retenue dans le cas d'une réceptionniste licenciée pour avoir refusé d'enlever son voile. Dans ce cas précis, seuls les salariés qui entraient en contact avec les clients étaient concernés. Mais dans l'autre dossier, concernant une ingénieure d'étude qui avait refusé d'enlever son foulard après la plainte d'un client, les juges ont estimé qu'en l'absence d'une règle interne prohibant le port visible de signe politique, philosophique ou religieux au sein de l'entreprise, "considérations subjectives" du client ne sauraient constituer une "exigence professionnelle essentielle et déterminante".

    14 Miser sur le dialogue

    Pour aider les entreprises privées, le gouvernement a publié en janvier 2017 un Guide du fait religieux dans les entreprises privées. L'occasion de rappeler l'importance du dialogue sur ce sujet sensible: les requêtes des salariés devront être traitées au cas par cas, sans discrimination ni privilège. Autoriser des temps pour la prière ou des ajustements d'horaires en période de jeûne est comparable à accepter les pauses cigarettes ou les aménagements pour les pères et mères de famille. Et si l'employeur refuse la demande d'un collaborateur qui souhaite s'absenter pour une fête religieuse, par exemple, son refus doit impérativement être justifié par la nécessité avérée de la présence du salarié concerné.

    Informer, sensibiliser et inciter les collaborateurs au dialogue permettra de prévenir les situations de blocage sur ce sujet.

    Lire ici l'intégralité des articles consacrés au fait religieux en entreprise, d'où sont extraites les recommandations ci-dessus:

    "Comment gérer les pratiques religieuses en entreprise"

    "Le voile et l'entreprise: quels sont les droits et les limites ?"

    [Vidéo] Port de signes religieux au travail : la décision de la CJUE

    Sujet sensible, la question de la religion sur le lieu de travail génère parfois des blocages. Voici quelques recommandations pour gérer le fait religieux dans les entreprises privées.

    15 Téléphone de fonction: les règles à respecter

    Au même titre que pour les autres outils mis à la disposition du collaborateur par l'employeur (ordinateur, service de messagerie...), le téléphone portable de fonction est présumé être utilisé pour des échanges à caractère professionnel.

    Dès lors, à moins que la mention "personnel" ne soit expressément indiquée, l'employeur peut librement consulter les SMS échangés par ses salariés via cet outil. Or, si la mention "personnel" en objet d'un mail est une pratique courante, elle est beaucoup plus rare dans les SMS. Cependant, le cas échéant, l'employeur n'aura pas le droit de consulter librement le contenu des SMS identifiés comme "personnel".

    16 Usage personnel du téléphone professionnel: des sanctions possibles

    Par ailleurs, l'employeur est en droit de sanctionner un salarié s'il découvre que des numéros non professionnels ont été appelés via son téléphone professionnel. Il peut notamment établir l'abus en produisant le relevé détaillé de la ligne téléphonique.

    Le règlement intérieur peut préciser les règles d'utilisation du téléphone de fonction, et notamment l'interdiction de l'utiliser à des fins personnelles. Dans une telle situation, l'utilisation du téléphone à titre personnel peut justifier un licenciement, peu importe que le contenu des échanges ne soit pas porté à la connaissance de l'employeur.

    Lire ici l'intégralité de l'article dédié à l'usage du téléphone professionnel: "L'employeur peut consulter les SMS échangés par un de ses salariés avec son téléphone professionnel"

    Le salarié peut-il librement utiliser son téléphone de fonction pour des échanges personnels? Au vu de la jurisprudence, un usage strictement professionnel est recommandé..

    17 Suspension du permis de conduire d'un collaborateur: que faire?

    Pour certains collaborateurs, par exemple les commerciaux, qui ont besoin d'un véhicule dans l'exercice de leur fonction, la suspension ou le retrait du permis de conduire peut entraîner des difficultés pour l'entreprise. Quelles sont les possibilités de l'employeur face à une telle situation?

    18 Infraction pendant les heures de travail: le licenciement pour faute est possible

    Si l'infraction qui entraîne le retrait du permis est relevée pendant les heures de travail du collaborateur, le licenciement pour faute est envisageable. Selon l'infraction, il s'agira d'une faute simple ou d'une faute grave. Un excès de vitesse inférieur à 50 km/h ou encore un feu rouge grillé, par exemple, qui entraînent un retrait de point pouvant provoquer la perte du permis si le collaborateur n'avait plus que quelques points, constitueront une faute simple. La conduite en état d'ivresse, par exemple, constitue une faute grave.

    19 Que faire en cas d'infraction en dehors des heures de travail?

    Si l'infraction à l'origine du retrait de permis intervient en dehors des heures de travail, l'employé reçoit les sanctions pénales associées à son infraction, mais ne pourra pas être licencié pour faute. Cependant, l'employeur peut invoquer le trouble objectif au bon fonctionnement de l'entreprise pour justifier un licenciement. Mais uniquement si la fonction du collaborateur impliquait au préalable l'usage de son véhicule: si ce dernier n'effectuait que des déplacements ponctuels, l'employeur ne pourra justifier un trouble.

    Attention, l'employeur devra apporter la preuve que le retrait ou la suspension de permis de son collaborateur lui cause un préjudice réel. En effet, en cas de simple suspension du permis, le licenciement pourrait être jugé disproportionné par le conseil des prud'hommes.

    Lire l'intégralité de l'article dédié à cette question: "Gérer la suspension de permis de vos commerciaux"


    Le permis de conduire peut être indispensable pour certains métiers, notamment dans le domaine commercial. Dès lors, comment gérer le retrait de permis d'un collaborateur? Le licenciement peut être envisagé, mais uniquement si l'employeur peut prouver que cette situation lui cause un préjudice réel.

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