Les managers connaissent-ils vraiment la stratégie de l'entreprise ?
Pour donner une vision à ses équipes et les faire adhérer à la stratégie de l'entreprise, les managers sont un maillon absolument indispensable. Mais connaissent-ils vraiment les priorités stratégiques de leur entreprise ? Pas si sûr, révèle une récente étude du MIT.
Je m'abonneEntre les stratégies élaborées par le comité de direction et leur application par les équipes sur le terrain, il y a parfois un décalage énorme. Une recherche du Massachusetts Institute of Technology (MIT) parue dans le dernier numéro de sa revue MIT Sloan révèle qu'un des problèmes est que la stratégie n'est souvent pas connue, non seulement des équipes terrain, comme on pourrait s'y attendre, mais pire encore, des cadres dirigeants! En effet, parmi les entreprises interrogées, seuls 28% des managers intermédiaires et des cadres supérieurs étaient capables de citer au moins trois des priorités stratégiques de l'entreprise.
Mais les entreprises peinent souvent à identifier le problème : l'étude cite ainsi une entreprise, décrite comme représentative des compagnies analysées, dans laquelle le P-DG se félicite que 97% des cadres affirment avoir une vision claire des priorités stratégiques. Or, une fois qu'on leur demande de citer les cinq axes majeurs, seul un quart est capable d'en citer au moins trois, et pire, un tiers n'est pas capable d'en citer ne serait-ce qu'une.
"Quand les dirigeants voient ces résultats, leur premier réflexe est de programmer plus d'assemblées générales ou d'envoyer une nouvelle série d'emails pour décrire la stratégie de l'entreprise", affirme le MIT. Pourtant, il est peu probable que cela s'avère efficace. L'institut de recherche a en effet découvert trois causes principales de non alignement.
Les cadres dirigeants n'ont pas conscience du problème
Les cadres supérieurs ont tendance à penser que tout le monde est sur la même longueur d'ondes quand il s'agit de la stratégie d'entreprise, mais c'est loin d'être systématique. L'étude a analysé plusieurs critères pour vérifier si les entreprises avaient bel et bien un ensemble partagé de priorités, si celles-ci étaient bien comprises, et si elles avaient une influence sur la fixation d'objectifs et l'allocation de ressources. Or, quel que soit le critère, les cadres les plus haut placés évalueront leur entreprise de façon plus positive. Par exemple, s'ils doivent évaluer la capacité de l'entreprise à aligner sa stratégie et ses priorités concrètes, les cadres dirigeants vont donner une note supérieure d'un tiers à celle des managers et des autres cadres supérieurs.
Il est donc crucial de faire prendre conscience aux plus hauts cadres que l'alignement de toute l'entreprise sur les objectifs stratégiques est souvent loin d'être une réalité.
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Les dirigeants ne sont pas d'accord entre eux sur les priorités stratégiques
"Le manque d'alignement stratégique commence souvent au sommet", note l'étude du MIT. Le comité de direction devrait donc se mettre d'accord sur un ensemble d'objectifs valables pour l'entreprise dans son ensemble, et non se fixer ses propres objectifs en fonction de ses priorités personnelles. Or, dans les entreprises étudiées, seule la moitié des cadres dirigeants arrive à se mettre d'accord sur la simple définition des objectifs communs. Ainsi, souvent, la moitié de ces cadres peut lister les priorités stratégiques de l'entreprise. L'autre moitié n'en cite que quelques-uns, voire pas du tout, quand elle ne donne pas des priorités qui n'ont jamais existé.
Plutôt que de se lancer dans des réunions générales, le P-DG doit donc prendre le temps de s'intéresser à chaque membre de l'équipe dirigeante personnellement pour qu'ils s'alignent avec la stratégie, avant d'envisager de communiquer à plus grande échelle.
Les cadres de direction communiquent mal
L'alignement stratégique se dégrade au fur et à mesure que l'on descend dans la hiérarchie, et les managers sont de moins en moins capables de citer les priorités stratégiques, mais le taux de déclin est inattendu : c'est entre l'équipe dirigeante et les cadres supérieurs que le taux de connaissance se dégrade le plus, puisque si 51% de l'équipe dirigeante peut citer les priorités stratégiques, seuls 22% des cadres leur reportant directement en sont capables, soit deux fois moins. A titre de comparaison, les managers intermédiaires qui rendent compte aux cadres supérieurs sont 18% à connaitre les priorités stratégiques : l'écart avec leur supérieur direct est beaucoup plus faible.
Pourcentage des dirigeants capables de citer au moins trois priorités stratégiques de l'entreprise
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Un résultat pas si étonnant, selon l'étude : l'équipe dirigeante a une vision transversale de l'entreprise, quand ses N-1 ont tendance à voir l'organisation à travers le prisme du département dont ils ont la charge. De plus, l'équipe dirigeante ne prend pas forcément le temps nécessaire d'expliquer la stratégie aux cadres ni comment les objectifs de leur service doit s'accorder avec la vision d'ensemble de l'organisation.
Les cadres dirigeants doivent donc faire acte de pédagogie auprès de leurs N-1, et notamment expliquer en quoi les différents objectifs sont importants à la fois pour le service et pour l'ensemble de l'entreprise, et comment mieux articuler les deux niveaux.
Etude réalisée par le Massachusetts Institutes of technology auprès de 4012 personnes dans 124 entreprises, entre janvier 2012 et juillet 2017, publiée dans le numéro de février 2018 de MIT Sloan.
Lire l'étude sur le site du MIT (en anglais)
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