"La RSE est une priorité du plan stratégique de la direction des achats du groupe Société Générale"
"En matière d'achats, les ambitions du Groupe se traduisent, pour les catégories d'achat pertinentes, par la recherche systématique de produits ou services innovants à plus-value environnementale, en se fondant sur une analyse chiffrée des impacts environnementaux", explique Françoise Guillaume.
Je m'abonneEn décembre dernier, la Société Générale a annoncé "renforcer ses engagements en faveur du climat Contribution à hauteur de 100 milliards d'euros au financement de la transition énergétique entre 2016 et 2020" en communiquant sur ses objectifs : "Renforcement de la politique sectorielle environnementale et sociale (E&S) pétrole et gaz", "désengagement du secteur des sables bitumineux dans le monde et du pétrole en Arctique", "renforcement des standards Société Générale sur le respect des droits des populations autochtones", "réduction de 25% des émissions de CO2 par employé à horizon 2020" et "Rôle moteur dans le développement durable et bas carbone de l'Afrique".
Une démarche volontariste qui s'inscrit dans le prolongement des engagements pris lors de la COP 21 en faveur du climat, et qui vise à aligner les activités de la banque d'ici à 2020 sur la trajectoire de l'Agence Internationale de l'Energie (AIE) pour limiter à 2°C le réchauffement climatique. Comment les achats participent-ils à cet "effort de guerre". Nous avons rencontré Françoise Guillaume, directrice des achats du Groupe Société Générale.
Société Générale a annoncé renforcer ses engagements en faveur du climat - Quel "mandat" particulier les achats ont-ils reçu ? Comment sont-ils impactés par cet engagement groupe ?
La direction des achats accompagne l'ensemble des lignes métiers dans la gestion de leurs activités afin que le Groupe Société Générale, dans son ensemble, agisse et interagisse de façon responsable avec son environnement.
Le Groupe a pris de nombreux engagements volontaires en faveur du climat qui visent à inscrire l'action de la Banque d'ici à 2020 sur une trajectoire compatible avec un scénario climatique de réchauffement limité à 2°C. Dans ce cadre, Société Générale s'est donné pour objectif de réduire son empreinte carbone à hauteur de 25% de ses émissions de CO2 par employé à horizon 2020 (par rapport à 2014). Afin de permettre au Groupe d'atteindre ses objectifs, la direction des ressources et de l'innovation (regroupant les directions achats, immobilier, une partie des DSI et l'innovation) s'est fixée des ambitions RSE liées aux économies d'énergie et la réduction des déchets. En matière d'achats, ces ambitions se traduisent, pour les catégories d'achat pertinentes, par la recherche systématique de produits ou services innovants à plus-value environnementale, en se fondant sur une analyse chiffrée des impacts environnementaux.
Les critères RSE ont-ils été renforcés dans les appels d'offres ?
Société Générale met en oeuvre depuis 2006 une politique d'achats responsables impliquant une mobilisation de toutes les parties prenantes de la chaîne de valeur (prescripteurs, acheteurs et fournisseurs). Cette politique repose sur la mise en oeuvre d'actions concrètes, incluant notamment l'intégration de critères environnementaux dans les appels d'offres lorsque cela est pertinent. Lors du lancement des appels d'offres, les fournisseurs sont évalués sur des critères concernant les caractéristiques environnementales des solutions qu'ils nous proposent.
Ces critères pèsent dans la composition de la note finale d'attribution de l'appel d'offres à hauteur minimum de 3% (sans limite de maximum) en fonction de la sensibilité des catégories d'achats aux risques RSE, et peuvent ainsi s'avérer déterminants dans l'attribution des marchés. Avec le lancement en 2016 de notre Positive Sourcing Program, cette pratique a été étendue à l'ensemble des achats pilotés par la direction des achats du Groupe. Notre objectif est de renforcer progressivement le poids des critères RSE et surtout d'étendre la pratique à l'ensemble de nos filiales en France et à l'international.
Comment les fournisseurs sont-ils évalués et "surveillés" ?
Au-delà du processus d'analyse KYS (Know Your Supplier) auquel sont soumis l'ensemble des fournisseurs ou prospects arrivant en étape de shortlist de nos appels d'offre, nous demandons à certains de nos fournisseurs (près de 320) d'avoir fait l'objet d'une évaluation de leur positionnement en matière de responsabilité environnementale et sociétale par un tiers indépendant (agence de notation extra-financière). Si les résultats de cette évaluation ne sont pas satisfaisants, les fournisseurs sont appelés à mettre en oeuvre un plan d'actions correctrices faisant l'objet d'un suivi régulier.
Les engagements environnementaux pris par le Groupe nourrissent, à la fois l'approche de la direction achats sur le sujet, mais aussi celles de nos fournisseurs, et permettent ainsi de faire progresser nos structures respectives dans ce domaine. Il s'agit d'un travail conjoint avec nos fournisseurs, inscrit dans la durée.
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Les acheteurs sont-ils objectivés sur leurs achats durables et responsables ? Et à quelle hauteur ?
La responsabilité est une des valeurs Société Générale faisant de la RSE une priorité du plan stratégique de la direction des achats. Tous les acheteurs participent dès leur arrivée à une formation spécifique en matière de RSE. Pour les catégories d'achat à fort enjeu RSE, cette dimension RSE est prise en compte dans la fixation des objectifs opérationnels individuels. Plus largement, le respect des engagements RSE étant intégré à la fiche de poste des acheteurs, il constitue de fait un des critères d'évaluation de la tenue de poste, qui est prise en compte dans l'évaluation de fin d'année. L'objectif est vraiment de responsabiliser l'ensemble des collaborateurs et de susciter la pro-activité dans la recherche des solutions les plus vertueuses d'un point de vue RSE.
Un reporting trimestriel du respect des engagements RSE avec le suivi de quelques indicateurs clés a été mis en place courant 2017 au niveau de chaque équipe.
Comment cet engagement se traduit-il dans les achats d'énergie opérés par la Société Générale pour son propre usage ?
Aujourd'hui, la quasi-totalité de l'électricité achetée en France par le Groupe est de l'électricité dite "verte". A l'horizon 2025, l'objectif est d'acheter 100% d'électricité verte sur le périmètre Groupe. Lorsque dans certains pays, cela ne sera pas techniquement possible, les émissions de CO2 seront compensées via des certificats carbone sur l'ensemble de l'électricité "non verte".
Le Groupe s'engage à renforcer, partout dans le monde, ses standards sur le respect des droits des populations autochtones, en ligne avec les standards internationaux. Ceci, impacte-t-ils les achats de la Société Générale dans leurs relations avec leurs fournisseurs ?
Etant donné la nature des achats effectués par le Groupe, cet engagement n'impacte pas en premier lieu la relation avec nos fournisseurs mais, nous restons vigilants. En effet, dans le cadre du travail que nous effectuons pour obtenir une nouvelle cartographie des risques RSE pour nos catégories d'achats, la problématique du respect des droits des populations autochtones est identifiée et prise en compte le cas échéant dans l'évaluation du risque sur les droits de l'Homme. Sur un dossier particulier, nous pourrions aussi nous appuyer sur les équipes d'évaluation des impacts environnementaux et sociaux des équipes commerciales en charge du financement des grands projets de nos clients.
Quelles actions concrètes appliquez-vous pour répondre à l'objectif réduction de 25% des émissions de CO2 par employé à l'horizon 2020 ?
Nous allons continuer à travailler sur les projets d'économies d'énergies, cela se matérialise par le développement des projets Green IT, l'amélioration de la performance énergétique des bâtiments, la réduction du papier et l'amélioration des performances environnementales de l'ensemble des produits et services achetés par le Groupe. Par exemple, en 2017, dans le cadre du renouvellement de la flotte automobile, les équipes achats ont intégré une démarche d'achat responsable dès les premières réflexions sur le projet. Une grille d'évaluation environnementale a été réalisée et une pondération RSE de 10% a été appliquée. Des véhicules électriques ont également été mis à disposition dans le catalogue, associé à des messages d'incitation forts autour de la mobilité électrique vis-à-vis de notre banque de détail.
Autre exemple, le projet de coffre-fort électronique, ayant pour but de dématérialiser les bulletins de salaire, a permis de réduire considérablement la consommation de papier (3,4 tonnes de papier et 7 tonnes de CO2 économisées chaque année).
Comment les gestionnaires du voyage d'affaires, du travel et des services généraux sont-ils amenés à travailler sur cet objectif - comment gèrent-ils cette taxe carbone interne ? Quelles autres familles d'achats sont impactées ? Et comment travaillent-elles pour répondre à cet objectif ?
La politique de consommation Groupe pour les déplacements professionnels a été redéfinie en 2017, conjointement par la direction des achats et la direction financière. Elle vise à maîtriser les dépenses liées aux frais de déplacements, mais aussi à réduire l'empreinte carbone du Groupe, notamment au travers d'actions comme l'incitation à la visio-conférence, ou l'utilisation du train chaque fois que possible et sur des destinations et durées prédéfinies.
Le Groupe a mis en place un dispositif d'incitation fondé sur une taxe carbone interne calculée en fonction des émissions de chaque entité du Groupe et redistribuée pour financer des initiatives internes d'efficacité environnementale. Les projets liés à la réduction de l'impact des transports sont éligibles à ce dispositif, tout comme les projets liés à la réduction des déchets et des consommations de papier, les économies d'énergie liées aux bâtiments et le Green IT. En 2017, 57 initiatives internes d'efficacité environnementale ont été ainsi récompensées.
Grâce au dispositif taxe carbone, 11 000 tonnes de CO2 sont évitées par an (soit l'équivalent de 11 000 A/R Paris - New York) depuis 4 ans.
La taxe carbone interne, mécanisme incitatif, permet aux équipes de prendre conscience des impacts environnementaux de leurs achats et les oriente dans leurs prises de décisions.Cette incitation permet au Groupe de diminuer progressivement le recours aux achats de biens et services énergivores au profit d'autres plus respectueux de l'environnement. Société Générale a notamment la volonté d'élargir son périmètre de reporting CO2, ce qui nous pousse à solliciter et accompagner de plus en plus nos fournisseurs dans la mesure de l'impact carbone de leurs produits ou de leurs prestations.