20 ans de business travel de A à Z
Pour décrypter les grandes tendances du business travel des 20 dernières années, nous avons fait appel à Brigitte Jakubowski, directeur de JK Associates Consulting,le pionnier des cabinets de conseil du secteur, et choisi de traiter cette rétro/prospective sous forme d'abécédaire ludique...
Je m'abonneA comme... Agences de voyages
Impossible de faire l'impasse sur cet acteur clé de l'univers du voyage d'affaires ! " Il y a 20 ans, aucune entreprise ne pouvait réserver un billet d'avion sans passer par une agence de voyages, mais cette période est révolue ", rappelle Brigitte Jakubowski, directeur général de JK Associates Consulting. Et pour cause : avec l'avènement de l'open booking, les voyageurs d'affaires peuvent acheter leurs billets on line sans l'aide de quiconque. " Une révolution qui conduit les agences à se réinventer au-delà de leur savoir-faire initial et ce, en proposant un panel de solutions complémentaires : intégration informatique, conseil, outils de tracking et de reporting, etc. " Ce qui nous invite à poser une question : quel rôle joueront-elles dans les 20 prochaines années ?
B comme... Big data
Voilà un point sur lequel les travel managers sont désormais attendus au tournant, à l'heure du cloud computing : la gestion du big data (littéralement, "les grosses données") et, par conséquent, le pilotage et la sécurisation des données voyageurs hébergées
en mode SaaS. Avez-vous pensé à proposer en interne un usage plus fructueux et plus sûr de vos données voyages stratégiques ?
ou comme... BSP
BSP, pour "bank settlement plan" ou "billing and settlement plan", est un système créé par IATA (Association internationale du transport aérien), qui encaisse le montant des billets d'avion vendus par les agences de voyages pour les reverser aux compagnies aériennes membres. Il concerne 390 participants qui proviennent de 71 pays couvrant 150 pays ou territoires. " Une véritable institution dans l'univers du business travel, dont le rôle est resté le même en l'espace de 20 ans ", note Brigitte Jakubowski.
C comme... Cartes de paiement
Sans elles, impossible d'optimiser l'ensemble de la chaîne de valeur du business travel ! Si l'usage des cartes de paiement s'est largement généralisé durant les 20 dernières années, c'est parce qu'elles servent à centraliser toutes les dépenses avant le voyage, essentiellement les billets d'avion et de train (pour les cartes logées), ou encore à affecter toutes les dépenses nomades qui surviennent pendant un déplacement : hôtel, location courte durée, restaurant, taxi... (pour les cartes corporate). Capitalisant sur leur succès dans le secteur du voyage d'affaires, les cartes de paiement partent désormais à la conquête de nouvelles familles d'achats, telles le Mice (meetings, incentives, conferences and exhibits).
ou comme... Code share
Pratique à double tranchant qu'il est impératif de connaître, le code share, généralisé avec la naissance des alliances aériennes (SkyTeam, Star Alliance, etc.), permet le partage d'un code "trajet" par deux transporteurs aériens. Ainsi, le voyageur peut acheter son billet à l'une des compagnies et voyager sur l'autre. Un levier achat de taille pour faire profiter à vos collaborateurs d'un Paris-Shanghai opéré par Air France (mais acheté moins cher sur une compagnie chinoise !). Cependant, à éviter coûte que coûte si vous êtes perdant au change, comme dans le cas où vous achetez un billet auprès d'Air France mais voyagez sur une compagnie espagnole partenaire au service médiocre dont nous tairons le nom.
Lire aussi : Les nouveaux contours de la travel policy
E comme... E-billet
" Voilà une innovation capitale de ces 20 dernières années, car elle atteste d'un phénomène de taille : l'impact fort de la dématérialisation sur l'évolution des pratiques de mobilité ", résume Brigitte Jakubowski. Grâce à un nouveau canal de réservation, l'e-billet facilite la vie des voyageurs d'affaires. De quoi mettre aux oubliettes les billets papiers, " mais aussi les traditionnels "vouchers", ces bons d'échange d'une prestation de transport ou d'hébergement déjà payée, presque disparus avec l'avènement des réservations on line ".
F comme... Frais ancillaires
Haro sur les services annexes facturés par vos fournisseurs ! Check-in avant l'heure, excédent de bagages, restauration à bord... La maîtrise des frais ancillaires s'est imposée comme un vrai casse-tête pour les travel managers ces dernières années, et reste d'actualité pour les entreprises, face à un phénomène de généralisation grandissant.
G comme... GDS
Nul travel manager n'est censé ignorer la signification de l'acronyme GDS : "global distribution systems". Créées par les compagnies aériennes, ces bases de données centralisent l'ensemble des tarifs aériens disponibles et un panel de services (hôtels, location de voitures, etc.). " Un dinosaure qui perdure malgré les turbulences affectant le business travel au fil des ans ", confie l'experte, en faisant notamment référence au rachat, en 2010, par Google, d'ITA Software, pour concurrencer les bons vieux GDS. " Une opération qui a fait couler beaucoup d'encre, même si ce nouvel entrant n'a finalement pas mis à mal la suprématie de la technologie GDS. "
J comme... JK Associates Consulting
Profitons de la lettre "J" pour faire un petit clin d'oeil à notre experte, Brigitte Jakubowski, dont le cabinet, JK Associates Consulting, fête aussi ses 20 ans cette année ! Créé en 1994, donc, le cabinet a été l'un des pionniers en matière de business travel et s'impose encore aujourd'hui comme une référence du marché.
K comme... Karachi
Les acteurs du business travel n'ont pas oublié l'attentat survenu à Karachi, au Pakistan, en janvier 2004. Et pour cause : c'est l'arrêt Karachi, adopté par la suite, qui a largement renforcé les dispositions du Code du travail en matière de responsabilité pénale des dirigeants d'entreprise. Avec ce revirement de jurisprudence, les sociétés n'ayant pas pris les mesures suffisantes pour préserver la sécurité de leurs salariés en mission engagent désormais leur responsabilité : prise en charge des frais médicaux ou de rapatriement des collaborateurs sans pouvoir en obtenir le remboursement et surtout... des poursuites au pénal !
L comme... Low cost
" Alors qu'il y a dix ans à peine, personne n'aurait parié un kopeck sur le potentiel de croissance du low cost, ce marché a aujourd'hui modifié en profondeur le paysage du business travel ", lance Brigitte Jakubowski. Et pour cause : référencer des compagnies à bas coûts est devenu un réflexe pour toute société soucieuse d'optimiser ses dépenses de voyages. Les compagnies low cost elles-mêmes ciblent officiellement les entreprises, à l'instar d'EasyJet, qui fut l'un des premiers acteurs du marché à accepter de figurer dans les GDS des agences de voyages et qui présente désormais une offre corporate.
P comme... Politique voyages
Embryonnaires il y a encore 20 ans, les PVE (politiques voyages entreprises) " sont les fondements mêmes de ce qui régit aujourd'hui les voyages d'affaires et ce, à tous les niveaux ". De plus en plus sophistiqués, ces règlements intérieurs visent à gérer et à encadrer les déplacements professionnels : à quelles compagnies aériennes ou ferroviaires les collaborateurs ont-ils accès et pour quel type de déplacement ? Quelle est la classe de réservation à laquelle ils ont droit ? Vers quels types d'hôtels et de prestations doivent-ils s'orienter ? " Grâce à toutes ces règles, l'entreprise peut optimiser ses déplacements. Elles constituent donc un véritable prérequis au métier même de travel manager. "
ou comme... Profil voyageur
Cette expression jargonneuse constitue un autre fondement du business travel et un marqueur fort de l'évolution du secteur. Le profil voyageur permet de rassembler toutes les informations concernant les données d'un collaborateur (données RH, cartes d'abonnement, préférences, etc.), enregistrées dans un système d'informations.
R comme... RSE
Outils de calcul des émissions de CO2, programmes de compensation carbone, recours à des hôtels éco-responsables, etc. : les outils du voyage "vert" s'imposent comme la pierre angulaire de toute démarche RSE (responsabilité sociale des entreprises) réussie en matière de business travel. Cette tendance n'a cessé de transformer le secteur à petits pas ces dix dernières années. Mais au-delà des actions strictement écologiques (comme la réalisation d'un bilan carbone), la RSE prend aussi en compte des enjeux longtemps délaissés par les entreprises, comme l'amélioration du bien-être des voyageurs.
S comme... SBT
Ils se la jouent à l'anglaise. Pourtant, il n'y a qu'en France que les outils de réservation en ligne, véritables bras armés d'une politique de voyages optimisée, sont appelés "self-booking tools". " Outre-Manche, on parle davantage d'OBT, pour "on line booking tools" ", rappelle Brigitte Jakubowski. Quel que soit le terme utilisé, ces systèmes high-tech sont révélateurs des bouleversements technologiques qui ont révolutionné l'univers des agences de voyages en permettant une gestion dématérialisée et en un point unique des voyages d'affaires, via l'interfaçage des ordres de mission, des notes de frais, etc. Pour des raisons d'émission de billets, le SBT est toujours adossé à une agence de voyages. Sa version la plus aboutie est le end-to-end, capable de couvrir toute la chaîne de dépenses voyages.
T comme... Transaction fee
Vous n'avez certainement pas oublié qu'il y a 20 ans à peine, les agences de voyages étaient rémunérées pour partie par des commissions fournisseurs via un compte d'exploitation (management fee). " Le coût agence était alors bien souvent indolore pour les entreprises, car largement autofinancé par ces commissions ", rappelle Brigitte Jakubowski. La fin d'un tel système symbolise certainement le mieux la refonte en profondeur du modèle économique du business travel. Dès 2004, les agences ont commencé à transformer leur business model (transaction fee), se préparant ainsi à la suppression des commissions aériennes, devenue effective le 1er avril 2005. " C'est à partir de cette date que la notion de coûts agences a pris toute sa valeur. Car les entreprises ont alors dû dégager des lignes budgétaires pour payer l'agence de voyages, comme tout prestataire de services. Un déclic qui leur a fait prendre conscience de l'importance de maîtriser plus encore les dépenses de voyages pour dégager de nouveaux leviers d'économies ", analyse l'experte.
ou comme... Travel manager
Impossible de faire l'impasse sur ce métier-clé du business travel. D'autant qu'il s'agit certainement du vôtre ! Vous le savez, la profession de travel manager s'est largement professionnalisée durant les 20 dernières années. Mais les challenges qui vous attendent sont toujours nombreux. Autant de mutations à anticiper sereinement, sans vous laisser atteindre par les mauvaises langues qui sous-entendent que votre profession serait en voie de disparition. Prouvez le contraire !
Y comme... Yield management
Faut-il encore négocier les tarifs avec vos fournisseurs ? Avec la montée en puissance du yield management durant ces 20 années, rien n'est moins sûr. Cette technique commerciale, prisée par les compagnies aériennes, vise à maximiser les revenus tirés de la vente d'un billet par ajustement permanent des prix en fonction du taux d'occupation et de la demande. Un yo-yo tarifaire qui place les travel managers face à une offre des plus complexes. Et qui fait toujours débat au sein de la profession.
Et Z comme... Zombie
Difficile de trouver un mot du secteur commençant par Z. Nous vous proposons donc "zombie", clin d'oeil humoristique... ou pas. Car c'est l'état dans lequel pourraient se retrouver vos voyageurs si vous ne vous préoccupez pas de leur bien-être ! " En 20 ans, la montée en puissance du nombre des déplacements professionnels et l'accélération générale du rythme de travail dégradent largement le quotidien des voyageurs d'affaires. Un sujet que doivent absolument prendre à bras-le-corps les travel managers ", conclut Brigitte Jakubowski.