[Billet d'humour] "The future is already here - it's just not evenly distributed"
Ils en étaient tout fier de leur IA, les petits gars de Microsoft ! Mais ils ont dû l'arrêter au bout d'une journée. Et pourquoi ? Parce que Tay avait été exposée à des messages racistes et homophobes, et qu'elle en avait déduit statistiquement que c'était la vérité.
Je m'abonneMes ami(e)s, je ne sais pas si vous êtes comme moi en ce moment, mais je suis bombardé de brochures sur le futur des Achats : "procurement of the future", "future of procurement", "procurement 4.0", et j'en passe et des meilleures.
Et à chaque fois, on me parle d'Intelligence Artificielle dans les achats, avec de premières applications qui tournent déjà dans la réalité : analyses de contrats, réponses automatisées à des e-mails de fournisseurs, etc. Et le pire, c'est que ça marche !
Mais comment que c'est-y que ça marche, au fait ? Il faut bien sûr des algorithmes de Traitement Automatique du Langage Naturel (TALN), déjà c'est la base... Comme par exemple le modèle BERT de Google (dont la version française a été aimablement intitulée CamemBERT, chacun appréciera). Et puis après, on va aller chercher des règles probabilistes pour suggérer des réponses. Un peu comme Alexia ou Cortana (vous avez remarqué que l'IA est souvent féminine, au fait) ?
Alors, ça m'a rappelé l'histoire de Tay, une Intelligence Artificielle "conversationnelle" lancée par Microsoft sur Twitter en 2016. Ils en étaient tout fier de leur IA, les petits gars de Microsoft ! Mais ils ont dû l'arrêter au bout d'une journée. Et pourquoi ? Parce que Tay avait été exposée à des messages racistes et homophobes, et qu'elle en avait déduit statistiquement que c'était la vérité. Au bout d'une journée de ce traitement, Tay twittait des messages comme : "le génocide, c'est trop cool"...
Le "deep learning", c'est l'exploitation de "data lakes" au travers d'algorithmes statistiques pour en retirer des règles et des réponses. Donc, ce n'est pas le futur, mais plutôt l'exploitation des données passées. L'IA a un lourd biais à reproduire le passé tel qu'il lui est exposé, en fait !
Alors, imaginons un peu notre Tay à nous dans les achats, exposée à des règles statistiquement vraies comme : "une société qui a plus de 7 ans d'existence a plus de chance de perdurer", "la part des sociétés industrielles en France dans le PIB a été divisée par 3 depuis 30 ans", "référencer un nouveau fournisseur comporte toujours une part de risque supplémentaire"...
En parlant de statistiques, vous pensez que notre Tay-des-Achats-à-nous aura quelle probabilité de répondre "oui" à une jeune PME industrielle qui veut se faire référencer ? Ça a l'air d'être de la science-fiction, bien sûr... Mais avec la crise sanitaire, on est en train de redécouvrir l'intelligence artificielle pour prévenir les risques de supply chain. Ne rêvez pas trop : "the future is already here - it's just not evenly distributed" (William Gibson).
Par Firmin de Montalembert.... un directeur achats Groupe anonyme, qui dissimule généralement son espièglerie sous un masque de grand sérieux
Lire les précédentes chroniques de Firmin:
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