Le rôle des achats dans la maîtrise des délais de paiement
En attendant un modèle de facture unique et le logiciel de gestion idoine, quelles peuvent être les initiatives des services achats et financiers pour améliorer le traitement des factures et leurs délais de paiement? Retours d'expérience du Crédit Agricole centre-est et de la Mairie de Paris.
Je m'abonneDans quelle mesure les achats sont-ils partie prenante dans le processus de maîtrise des délais de paiement? Quelles sont les actions que l'on peut mettre en place et pour quels impacts pour les directions achats et finance? Telles étaient les questions auxquelles les derniers Jeudis de l'expertise achats du CNA ont tenté de répondre. Encore une fois, ce fut l'occasion de partager bonnes pratiques et retours d'expérience, notamment grâce aux témoignages de François-Xavier Tesson, responsable comptabilité et fiscalité de la caisse régionale de Crédit Agricole centre-est, et Emmanuel Spinat, sous-directeur de la comptabilité à la Mairie de Paris. Il en ressort que quel que soit le secteur d'activité, privé ou public, les principaux chantiers à travailler pour maîtriser et améliorer ses délais de paiement tiennent en trois mots : dématérialisation, centralisation et automatisation.
Dans le cas du Crédit Agricole, trois raisons ont poussé la caisse régionale à travailler la problématique des délais de paiement : "malgré un volume d'achats relativement faible (152 M€ en 2017 pour environ 20 000 factures par an) nous avons voulu améliorer nos délais de paiement d'abord pour répondre à nos engagements RSE, en tant que banquier il est important pour nous de tenir nos engagements sur ce point. Ensuite dans une logique de performance améliorée grâce à un processus de gestion plus transverse. Enfin dans l'objectif de contribuer au développement économique de nos territoires", explique François-XavierTesson.
Depuis 2016, le service comptabilité et fiscalité de la caisse régionale du Crédit Agricole centre-est a travaillé à dématérialiser le circuit de validation des factures notamment par la mise en place d'une plateforme digitale d'approvisionnement avec un système de lecture automatique des factures. Ce qui a contribué à simplifier les circuits de validation pour la caisse régionale qui a 50 délégataires différents répartis sur 12 directions. De cette expérience François-Xavier Tesson a retenu deux enseignements : "dans un projet de transformation comme celui-là mieux vaut revoir le processus de fond en comble et ne pas chercher à calquer le nouveau sur l'ancien". L'autre point à ne pas négliger est l'accompagnement des collaborateurs. "C'est indispensable. Nous avons mis en place des réunions tous les lundis matin pour exposer les problèmes et tenter d'y répondre. En 2017, nous avons accentué le suivi sur les délais de paiement en faisant du Name & Shame et du Name & Fame en interne pour challenger les directions entre elles."
Et cela a plutôt bien marché. Résultat : en deux ans les délais de paiement ont été diminué de 6 jours. L'objectif pour 2018 d'industrialiser le traitement des factures. "Nous souhaitons développer un dépose facture en extranet et misons sur un déploiement progressif. De même nous allons creuser la question des blocages de factures dans le SI achat. Nous avons commencé à travailler sur le sujet avec nos fournisseurs sur les achats immobiliers et déjà défini trois situations intermédiaires."
De son côté, la Mairie de Paris a mis en place en 2017 le plus important service facturier de France avec plus de 160 agents pour traiter l'ensemble des dépenses de la Capitale. Celles-ci s'élevant à 10 Md€ en 2017 pour un volume de 330 000 factures annuelles. "Un tel dispositif existait au niveau de l'Etat mais pas au niveau local", précise Emmanuel Spinat, sous-directeur de la comptabilité à la Mairie de Paris. Pour la ville l'objectif est double : optimiser toute la chaîne de la dépense et réduire les délais de paiement. "Nous avons mis en place un comité de suivi des délais de paiement avec nos directions et créé un service relations et échanges financiers dédié à la gestion des réclamations fournisseurs ce qui nous a permis d'arriver à un délais moyen de paiement à 20 jours en 2017."
La dématérialisation de la commande publique se déploie, les évolution de la plateforme Chorus Pro sont positives. "A ce jour environ 40% des factures prises en charge par la Ville de Paris le sont par voie électronique, détaille Emmanuel Spinnat. Les grands groupes respectent le processus dématérialisé à 61%, les ETI à 46% seulement mais celles-ci progressent vite. En revanche entre entités publiques on se heurte encore à des difficultés." Pour la période 2018-2020, la Mairie de Paris entend aller encore plus loin dans le processus d'automatisation de gestion des dépenses et doit continuer à faire évoluer les mentalités et les méthodes de travail. "Nous allons notamment travailler sur l'amélioration du process d'approvisionnement et de la gestion des petites factures en simplifiant le circuit de validation." Car aujourd'hui, 20% des 330 000 factures annuelles s'élèvent à moins de cent euros.
Dans le privé comme dans le public, "dépoussiérer" les process de traitement des factures est possible. Mais il est sûr que si le chantier en cours piloté par la Médiation des Entreprises pour définir un modèle unique de facture aboutit cela simplifiera grandement les choses. "Je ne doute pas que nous arriverons à proposer un modèle unique de facture simplifié, assure Pierre Pelouzet qui envisage déjà la suite. La prochaine étape sera d'aller voir les éditeurs de logiciels et de travailler avec eux au développement d'un outil de traitement des factures idoine et facilement intégrable dans n'importe quel système d'informations." De quoi bousculer le marché des solutions et les acteurs en place.
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