Le coût, levier essentiel des négociations achats ?
A l'heure où l'optimisation des dépenses est dans tous les esprits, la question du prix reste au coeur des politiques achats. Pourtant, la nécessité d'intégrer d'autres éléments comme les critères d'écoresponsabilité complique les arbitrages et change les règles communément admises.
Je m'abonneQuelle importance faut-il accorder au coût d'une acquisition ? Longtemps considéré comme la pierre angulaire des directions achats, aux côtés des critères de qualité et de délais, sa place dans les prises de décision tend à évoluer. "Le prix, la qualité et le délai sont en interaction et parfois en contradiction les uns avec les autres, rendant nécessaires des arbitrages. Le nouveau contexte auquel s'ouvrent les achats en entreprise intègre un quatrième élément désormais déterminant : la RSE. L'aspect social et environnemental deviennent un positionnement stratégique particulièrement intéressant", a estimé Rodolphe Agay, gérant de la société Hanego, spécialisée dans la formation et le conseil en achat, négociation et management. Ce dernier s'exprimait lors d'un afterwork organisé le 17 novembre par MHALV sur le thème "Le coût est-il toujours le levier essentiel dans vos négociations achats ?"
Mais la RSE comme atout à part entière reste négligée et représente parfois une notion incompatible avec les priorités en place. Intégrer de tels critères inhérents à une vision de long terme dépend directement du type de capital de la société. "Une entreprise cotée en bourse est fréquemment guidée par les initiatives de court terme, les impacts trimestre par trimestre, à l'inverse d'une structure dépendant d'un capital familial où la vision sera davantage axée sur les enjeux de long terme, la nécessité de se transformer même si les retombées peuvent n'être perceptibles qu'après 18 à 24 mois", a-t-il ajouté.
Vers un changement de culture
Faire monter la RSE parmi les autres critères les plus essentiels passe par une bonne compréhension des réticences de son client interne, afin de lui proposer un choix plus pertinent par rapport à son champ de contraintes. "Avec des intégrations RSE, on offre un champ d'alternatives plus large, on se dote d'un panel de fournisseurs plus varié", a illustré Rodolphe Agay. Des leviers intéressants à actionner concernent par exemple le poids du critère "délai". "Si ce dernier n'est pas un paramètre essentiel du choix final parce que le besoin a été largement anticipé au regard des délais du marché, on peut choisir des moyens d'acheminement différents. L'avion ne s'impose plus, ce qui permet de valoriser un critère RSE sans pour autant porter atteinte au planning de son projet", ajoute Rodolphe Agay.
L'anticipation des achats est donc une piste déterminante : "le fait d'être dans l'urgence est doublement mauvais, car on va payer plus cher chez un fournisseur qui a du stock et choisir le mode de transport le plus rapide c'est-à-dire souvent le plus cher et le plus polluant." Il a cité en exemple la marque Le Slip français, en concurrence frontale avec l'industrie textile polluante à bas coût, et qui tire son épingle du jeu par le biais d'un positionnement où la RSE occupe le premier rang des priorités.