3M : Miser sur l'éthique vaut le coût!
A l'aune de tout ce qu'impliquent les récents changements réglementaires (Devoir de vigilance et Sapin II) heureuses sont les entreprises qui ont anticipé et investi dans la mise en place de procédure dédiées à l'éthique au sein de leurs organisations. C'est le cas de 3M. Explications.
Je m'abonneD'une démarche volontaire, la mise en oeuvre de politiques RSE est en passe de devenir une obligation. Et notamment tout ce qui touche à l'éthique des affaires prend aujourd'hui une place prépondérante dans les stratégies d'entreprises. A l'heure où l'éthique doit plus que jamais être intégrée dans la démarche et l'acte d'achat et devient non plus seulement une bonne pratique mais un devoir avec, en cas de manquement des conséquences légales et financières importantes, certains groupes ont depuis longtemps pris les devants.
C'est le cas de 3M, groupe industriel d'origine américaine évoluant sur 5 marchés (industrie, électronique & énergie, santé, sécurité, grand public), qui pour la cinquième année consécutive vient d'être reconnue comme l'une des 135 entreprises les plus éthiques au monde par l'institut Ethisphère. Cette année c'est l'une des rares entreprises de la catégorie industrie à avoir été distinguée. Il faut dire que depuis près de 20 ans, le groupe mondial porte des valeurs fortes tant d'un point de vue RSE qu'éthique. Une démarche affinée et améliorée au fil des années au point d'avoir désormais une véritable gouvernance d'entreprise à tous les échelons et dans toutes les filiales du groupe.
Un plan éthique précis
Ainsi, des cycles de formations sur l'éthique et l'approche RSE ont lieu tous les deux ans et sont obligatoires pour l'ensemble des collaborateurs du groupe quel que soit leur niveau hiérarchique. Adaptées aux fonctions et à l'activité de chacun, ces formations bénéficient d'une granulométrie importante jusqu'à faire des focus poussés sur le travail forcé et le trafic d'êtres humains par exemple. En 2016, le groupe a également conçu et publié un nouveau code de responsabilités fournisseurs diffusé au fur et à mesure des renouvellement de contrats (en priorité concernant les achats de matières premières présentant un risque santé sécurité employés fort). Ce code s'appuie sur deux piliers : l'éthique et la gouvernance. Ce qui permet à 3M de bien comprendre la façon dont travaille un fournisseur et de travailler avec eux en amélioration continue.
"C'est une démarche volontariste de l'entreprise, ancrée chez nous au plus haut niveau du board stratégique, qui souhaite capitaliser sur ces valeurs. Tout le monde est impliqué sur ces questions et informé des process à suivre", explique Bertrand de la Fouchardière, en charge des affaires publiques et marchés gouvernementaux chez 3M France. Chez 3M ces problématiques sont traitées par trois divisions de façon conjointe : les achats, la RSE et les affaires publiques. "De même, il n'y a pas un prise de parole de nos dirigeants qui n'intègre pas un rappel des engagements éthiques et RSE du groupe. Tout est ouvert pour poser les questions sereinement", ajoute Bertrand de la Fouchardière. Un système de lanceurs d'alerte en interne complète ce dispositif de prévention de corruption et de conflits d'intérêt.
Un process achats plus contraignant mais sécurisé
Au niveau des achats, avant tout contrat et avant même de parler coûts, les fournisseurs doivent se soumettre à un pré-process amont pour évaluer le risque société. "C'est le premier filtre de l'éligibilité d'un fournisseur", déclare James Murison, directeur achats France et responsable achats généraux Europe chez 3M. Il y a ensuite une démarche spécifique suivant l'achat concerné, rallongeant le process d'appel d'offres et de contractualisation et créant parfois quelques tensions avec les clients internes. "Cet allongement de procédure est géré et intégré dans les plannings. De plus, tous les clients internes étant formés aux problématiques éthiques et aux process, ils savent que c'est une figure imposée. Enfin, les process sont adaptés en fonction de la valeur du risque. Si tous les voyants sont verts cela peut être relativement court", souligne James Murison.
Mais si un risque potentiel est détecté toute une procédure de levée de doutes se met en branle, peut remonter jusqu'au plus haut niveau de l'entreprise et aboutir à la non contractualisation. Le processus de surveillance tourné autant vers l'interne que vers l'externe permet de détecter mais aussi de sanctionner en cas de corruption avérée. "Les sanctions sont immédiates, en général cela ne prend pas 24h, et appliquées fermement!" prévient James Murison.
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Un coût qui vaut le coup
Tout cela représente bien sûr un investissement conséquent. 3M France c'est 2 500 personnes et 40 unités métier et au niveau groupe on parle de plus de 90 000 employés dans le monde qu'il faut former tous les deux ans. Mais cela a des impacts bénéfiques à plusieurs niveaux : la durée de vie de la société en premier lieu et l'activité. "La démarche a un coût mais c'est une obligation aujourd'hui, la croissance de l'entreprise est étroitement liée à ces questions éthiques. Il n'y a pas un client qui ne nous évaluent sur nos pratiques en matières d'éthique", raconte Bertrand de la Fouchardière. Pour James Murison c'est aussi "un levier important pour sécuriser nos achats et donc aussi nos chaînes d'approvisionnement et un moyen d'améliorer nos services en termes de contribution interne."
Dans le contexte actuel, la gouvernance de politiques RSE et éthique doit donc devenir la priorité de toute entreprise. "Il n'y a qu'à voir le poids du critère RSE (35% NDLR) dans le process de sélection des fournisseurs aux JO de Paris, estime Bertrand de la Fouchardière. Ce n'est plus seulement une tendance c'est une réalité!".
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