Les achats doivent devenir un vecteur de l'innovation collaborative
"Concrètement, les démarches d'innovation sont souvent portées par les directions de la stratégie, de l'innovation et du digital et ne sont pas suffisamment à l'initiative des directions achats qui jouent pourtant un rôle clé en matière d'interface avec les acteurs extérieurs."
Je m'abonneMieux faire entrer l'innovation dans l'entreprise. Si cet objectif est partagé par de nombreux décideurs, la méthode employée pour y parvenir n'a rien d'une évidence. C'est pourquoi le Club des Acheteurs a organisé, le jeudi 22 mars dernier, un petit déjeuner thématique sur ce thème. "Les dispositifs classiques de R&D mises en oeuvre pour conduire à l'innovation ont tendance à s'essouffler. Les entreprises cherchent aujourd'hui de nouveaux relais de croissance sur ce plan. Les pratiques consistent désormais à utiliser au maximum l'innovation là où elle se trouve, c'est-à-dire à l'extérieur de l'entreprise, mais aussi au sein même de ses propres équipes", a souligné Flavien Besset, cofondateur et président de NextStart, une société spécialisée dans l'accompagnement en matière d'innovation collaborative. Le défi est alors de dénicher l'innovation en rapport avec les enjeux de ses clients, de trouver les acteurs qui vont la porter, puis de les incuber, les expérimenter et les déployer dans l'organisation, en impliquant la direction des achats et du juridique.
"Lorsque les démarches de recherche et de management de l'innovation existent, elles sont trop souvent cantonnées à une ou deux parties prenantes externes et ne couvrent pas l'ensemble des possibilités qu'offre l'Open Innovation, à l'image du marché émergent des outils et plateformes d'innovation encore très segmenté. Or, il existe de multiples manières d'embarquer l'innovation dans son organisation et de partenaires innovants à mobiliser pour se tourner vers une innovation plus collaborative et plus ouverte", indique Flavien Besset.
Une entreprise doit vivre en osmose avec les acteurs environnants de son écosystème afin de mettre sur pied des projets de co-création et de co-développement aux côtés de start-ups, d'universités, de fournisseurs innovants, de clients, d'experts-chercheurs, d'étudiants, ou encore de salariés de sa propre entreprise. Le groupe Michelin est allé encore plus loin, en fédérant autour de lui, via son Open Lab Mobility, toute une filière positionnée sur les questions liées à la mobilité de demain.
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Une succession d'étapes essentielles
Certaines grandes entreprises mettent en place des programmes d'intrapreneuriat afin de mobiliser et d'engager leurs collaborateurs autour de leur stratégie de renouvellement et d'aider le passage du concept innovant au marché face aux fortes résistances internes du statut quo. D'autres préfèrent collaborer avec l'externe, en commençant par des POCs pour ensuite les expérimenter par une confrontation au marché et déployer les plus probants au sein de leur organisation. "Mais concrètement, les démarches d'innovation sont souvent portées par les directions de la stratégie, de l'innovation et du digital et ne sont pas suffisamment à l'initiative des directions achats qui jouent pourtant un rôle clé en matière d'interface avec les acteurs extérieurs", estime Flavien Besset.
Pour être pleinement efficace, il importe d'intégrer les achats en amont de la collaboration, dès la phase de sourcing au cours de laquelle les entreprises cherchent à identifier les partenaires innovants externes. A cette étape, des outils peuvent les aider à répertorier toutes les rencontres de son organisation, à superviser le suivi de la relation (les rendez-vous et leur bilan, les collaborations imaginées, conclues, les POC mis en place, les contrats signés...) afin d'identifier avec quels acteurs les métiers souhaitent le plus travailler pour répondre à un enjeu client. L'objectif est de se doter d'une meilleure gouvernance de l'innovation, en mêlant direction des achats et direction de l'innovation et du digital.
La contribution des achats se poursuit ensuite dans les phases d'expérimentation et d'implémentation afin de se prémunir du risque de dépendances économiques et mettre en place un cadre contractuel simplifié (CGA et CGV simplifiés ou exonération des clauses particulières aux fournisseurs standards). "Certaines directions achats trouvent de l'aide auprès des agences de notation de partenaires innovants pour vérifier le sérieux, la valeur de l'offre concernée, la qualité de ses brevets ou de ses actifs, afin de maximiser les probabilités de réussite et donc de la collaboration", indique Flavien Besset.
Les achats ont donc un rôle central à jouer dans la mise en place et la gestion de l'innovation collaborative et ouverte, "et sont invités à être davantage un moteur de cette transformation."