Dispositifs anti-corruption : des progrès à faire
Grant Thornton a publié début octobre la 3e édition de son baromètre sur les dispositifs anti-corruption des entreprises. Axé cette année sur la maturité, il constate des progrès dans tous les domaines mais pointe également de nombreux retards.
Je m'abonnePrès de 4 ans après l'instauration de la loi Sapin 2, où en sont les entreprises en termes de dispositifs anti-corruption ? C'est la question à laquelle le Baromètre de Grant Thornton consacré au sujet essaie de répondre, pour la troisième année consécutive. "Le constat général est qu'il y a des progrès dans tous les domaines même si c'est parfois un peu poussif", résume Nicolas Guillaume, Business Risk Services & Forensic Lead Associé chez Grant Thornton qui a supervisé la réalisation de ce baromètre. Il reconnaît cependant que le baromètre Grant Thornton est exigeant puisque pour être jugé conforme en termes de dispositif anti-corruption, il faut être conforme à tout.
Difficile évaluation des tiers
Et force est de constater que peu d'entreprises sont en conformité : 90% des entreprises sont " non conformes ". Ce chiffre est certes un mieux par rapport à 2019 (seules 6% des entreprises étaient alors conformes) mais il y a encore de nets progrès à faire, notamment dans le domaine de l'évaluation des tiers : seules 19% d'entités sont conformes. "C'est opérationnellement très lourd de passer au peigne fin toute sa chaîne, d'autant plus quand le business est très éclaté, avec beaucoup de transactions", analyse Nicolas Guillaume.
Deux autres thèmes progressent doucement : le dispositif de suivi (44% d'entités conformes) et les contrôles comptables (46%). "Sur les contrôles comptables, les entreprises rencontrent des difficultés à identifier quels sont les points spécifiques à relever et comment s'organiser pour le faire. Quant au dispositif de suivi, ce n'est pas étonnant qu'il ne soit pas avancé : il faut d'abord progresser sur les autres sujets", explique Nicolas Guillaume.
Doublement de la maturité sur la cartographie des risques
Le Baromètre note par contre de gros progrès en matière de cartographie des risques : nous avons presque constaté un doublement de la maturité, les entreprises conformes étant passées de 40% en 2018 à 71% aujourd'hui", rapporte
L'associé Grant Thornton souligne également que si la proportion d'entités totalement conformes évolue lentement (10% contre 6 % précédemment), le taux de conformité moyen progresse quant à lui fortement, passant de de 57 % à 79 %.
Prévention des risques
Les progrès sont là mais les entreprises doivent mieux faire, ne serait-ce que pour éviter de se faire rattraper par le régulateur sur les questions d'anti-corruption. "Il y a également un aspect de responsabilité sociétale : les entreprises ont tout intérêt à utiliser leurs ressources dans d'autres sujets qu'en faveur d'intermédiaires véreux", souligne Nicolas Guillaume. Il insiste aussi sur la notion de risque : "Un dispositif efficace peut permettre d'éviter de se faire piéger par des gens peu scrupuleux et de protéger son activité".
C'est pourquoi la cartographie des risques est si importante : cela permet de prendre conscience de la nécessité d'agir sur certains sujets dans l'intérêt de son entreprise. "Les entreprises débutent leurs travaux pour des raisons réglementaires mais quand les dirigeants se rendent compte en avançant que des collaborateurs se sont retrouvés dans des situations compliquées le sujet devient moins technocratique et les intéresse davantage", observe Nicolas Guillaume.
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L'associé Grant Thornton rapporte par ailleurs que le panel du Baromètre est constitué d'entités non soumises aux exigences de la loi Sapin 2 mais qui ont décidé volontairement d'engager les démarches pour satisfaire aux exigences. "Ces entités évoluant majoritairement à l'international et ayant des clients soumis à Sapin 2 ont perçu l'enjeu commercial de se positionner comme un partenaire compliant", pense Nicolas Guillaume.
Identifier les enjeux
Nicolas Guillaume reconnaît cependant la complexité de certains sujets de la loi Sapin 2. "L'Agence française anticorruption (AFA) est en train de mettre à jour certaines de ses recommandations : elles seront plus explicites pour les entreprises", indique Nicolas Guillaume. Il entrevoit un autre problème à la mise en place des dispositifs anti-corruption dans les entreprises : le manque de temps et de ressources. "Dans la période actuelle, les entreprises ont de plus d'autres préoccupations".
Il conseille de débuter par une cartographie des risques établie avec sérieux afin d'identifier les sujets à enjeux pour l'entreprise. "Cela permet de ne pas adopter une approche monolythique : il s'agit non pas de faire tous les tiers ni tous les contrôles comptables à la fois mais de se concentrer sur les vraies zones d'enjeux", recommande-t-il.
Nicolas Guillaume insiste aussi sur la culture d'entreprise: "Les procédures sont importantes mais ce qui compte c'est la façon dont se comportent les collaborateurs face à une situation compliquée : il s'agit d'éduquer les gens, de leur faire prendre conscience de ces problématiques afin qu'ils acquièrent les bons réflexes". Les dispositifs anti-corruption comprennent donc un volet management et formation.