Achats/Finance: "Chez Grimaud, notre projet commun: lutter contre l'envolée des céréales"

Pourquoi cette collaboration sur le contrôle des prix des matières premières?

Olivier Gerry, Daf de Grimaud: Les variations des cours des céréales impactent fortement sur les résultats de Grimaud puisque les achats d'aliments constituent le deuxième poste de dépenses après les frais de personnel. Ces envolées peuvent atteindre 50 € par tonne. Or avec un volume d'achat de 140 000 tonnes d'aliments par an, cela correspond à des pertes culminant à 7 millions d'euros! Après avoir subi une envolée des prix des céréales en 2007, puis en 2010, répercutées par nos fournisseurs de produits alimentaires transformés, nous avons décidé de ne plus être passifs. La solution? Couvrir nous-mêmes nos achats d'aliments sur les marchés financiers, à partir d'instruments basés directement sur les céréales. Avec Laurent, le directeur achats, nous avons fait appel au cabinet Mazars et l'étude menée a confirmé les gains à la clé: des économies de l'ordre de 3 % et surtout un effet de lissage des cours en cas d'envolée des matières premières!

Laurent Rineau, directeur achats de Grimaud

"Contrôler les prix des matières premières était le premier projet collaboratif entre nos deux fonctions et engageait toutes les filiales de l'entreprise".

Laurent Rineau, directeur achats de Grimaud: L'appui d'un partenaire s'avérait essentiel tant le déploiement d'un tel chantier était nouveau pour Grimaud. C'était le premier projet engageant toutes les filiales de l'entreprise. C'était aussi la première fois que les directions financière et achats, toutes deux sous l'autorité du p-dg, Frédéric Grimaud, étaient amenées à collaborer. Avec Olivier Gerry, nous avons donc procédé avec méthode en analysant en amont les tenants et aboutissants de ce projet d'un point de vue comptable, social, etc. Après un long travail de benchmark, nous avons sélectionné un cabinet de courtage, en l'occurrence Plantureux, à même de nous accompagner sur les outils ad hoc pour prendre les positions sur Euronext et le Chicago Mercantile Exchange.

Quels rôles respectifs jouez-vous au quotidien pour réussir le pilotage d'un tel chantier ?

Olivier Gerry: Nos rôles sont très complémentaires. Laurent gère le front-office, étant en première ligne dans les prises de positions, je me charge du back-office. Aussi, je m'assure que chaque opération financière réalisée s'inscrit dans le cadre de gestion défini au préalable.

Olivier Gerry, Daf de Grimaud

" J'ai rédigé une convention en interne, validée par le Codir, précisant notre refus de surfer sur la spéculation tous azimuts sur les matières premières."

Avant de nous lancer dans un tel projet, j'ai rédigé une convention en interne, validée par le Codir, précisant les différentes modalités. À savoir, le refus de surfer sur la spéculation tous azimuts sur les matières premières, un système que nous dénonçons par ailleurs. La philosophie de notre démarche est d'anticiper l'envolée des prix de nos achats d'aliments, en se positionnant -sur les marchés financiers- sur un nombre de lots équivalents aux volumes annuels contractés auprès de nos fournisseurs.

Laurent Rineau: Grâce à ce système de couverture sur les marchés financiers, je peux non seulement suivre au jour le jour les variations précises des prix, mais surtout acheter des options sur le marché des céréales en cas de baisse des cours. En outre, c'est une possibilité d'empocher une plus-value à la revente, si les cours repartent à la hausse. Ces gains servent alors à couvrir in fine les augmentations de prix qui nous sont imposées par nos fournisseurs.

L'autre avantage de cette parade est son caractère peu risqué. En effet, l'achat d'option (call) permet de limiter la perte au seul paiement d'une prime de 15 euros par lot. L'année dernière, les cours ont baissé, ainsi nous avons dû payer 200 000 euros de primes! Un montant toutefois dérisoire face aux 2,5 millions d'euros économisés grâce à la baisse des prix des aliments finalement consentie par nos fournisseurs.