FM et co-traitance : une (grande) histoire d'amour
La co-traitance est une pratique très répandue dans les prestations de Facility Management. Quels en sont les avantages et les inconvénients? Explications.
Je m'abonneQuels sont les avantages et les inconvénients de la co-traitance? Et comment co-traiter dans une relation gagnant-gagnant avec ses prescripteurs? Tel était le sujet d'une table ronde sur le salon Handicap, Emploi & Achats Responsables le 28 mai dernier au Palais des Congrès de Paris.
FM et co-traitance : une histoire d'amour
La co-traitance est une pratique très répandue dans les prestations de Facility Management. A l'image du groupe de luxe LVMH ou de la Société Générale. Ainsi, chez LVMH, la co-traitance est utilisée sur des prestations comme le standard téléphonique avec Phone Régie ou sur de la propreté avec GSF. "Depuis 2 ans, nous avons recours à la co-traitance car nous cherchons à intégrer les ESAT et les EA dans des contrats importants. Mais en raison du problème d'assise financière de ces entreprises du secteur protégé, nous permettons à nos partenaires prestataires d'intégrer un partenaire handicap comme Phone Régie qui emploie une personne en situation de handicap pour une mission d'accueil téléphonique sur son standard", explique Gregory Rouca, directeur des services généraux au sein de LVMH.
A l'exemple du groupe de luxe, un premier argument avancé par les acheteurs pour la mise en place d'un contrat de co-traitance est celui du manque d'assise financière des entreprises du secteur adapté. Un constat que partage Christine Auclair, directrice des opérations au sein de l'Association pour l'insertion et la réinsertion professionnelle et humaine des handicapés (ANRH) qui compte plus de 1800 collaborateurs, 20 EA et 4 ESAT : "Il existe deux freins majeurs dans le recours à la co-traitance : la surface financière des répondants qui n'est pas suffisante mais aussi le fait d'avoir une réponse nationale à un appel d'offres".
Pour une montée en compétence des salariés en situation de handicap
Pour elle, la co-traitance doit être un tremplin pour une montée en compétence des collaborateurs en situation de handicap. Et de citer l'exemple de la co-traitance dans un domaine comme l'éditique avec la possibilité de former les salariés en situation de handicap sur de a maintenance de premier niveau. Même son de cloche pour Gregory Rouca, directeur des services généraux chez LVMH : , "l'important est de faire évoluer les travailleurs handicapés au sein de LVMH mais aussi dans l'entreprise prestataire". Ainsi, sur 18 personnes travaillant dans le cadre de ce type de contrat de co-traitance, au final 4 collaborateurs ont été embauchés par LVMH ou l'entreprise prestataire sur des postes allant du magasinier à la secrétaire.
Pour traiter un sujet de co-traitance, différentes fonctions sont concernées. Ainsi, sur l'ensemble des appels d'offres, la direction juridique, la direction achats mais également la direction RSE sont impliquées. Et pour assurer la réussite d'une co-traitance, Christine Auclair de l'ANRH insiste sur le fait d'associer dès le montage de l'appel d'offres l'ESAT ou l'EA. "Car l'entreprise n'a pas toujours connaissance de ce que fait l'ESAT ou l'EA. Les travailleurs en situation de handicap ne sont pas que des gens qui tondent le gazon. Il faut aller plus loin sur des missions techniques".
Un même niveau d'exigence
D'autant que les grands comptes présents l'affirment : le niveau d'exigence attendu de la part d'un ESAT ou d'un EA est le même que pour un prestataire lambda. Un avis partagé par Alain Frouard, directeur de l'ESAT Berthier qui emploie 150 travailleurs handicapés sur des prestations aussi diverses que le détachement et mise à disposition dans les entreprises, le conditionnement ou la restauration, pour qui "la rigueur exigée par les entreprises est un facteur d'évolution et de montée en compétence".
Même si "c'est au FMer d'adapter le niveau de réponse de l'ESAT ou de l'EA comme par exemple sur le sujet de cadence des travailleurs, etc...", explique Bastien Gaudaire, acheteur FM au sein de la Société Générale. "Un des avantages de la réponse en co-traitance est de pouvoir se décharger de cette adaptation de la qualité de service sur le FMer".
Les dangers du délit de marchandage
Selon Christine Auclair de l'ANRH, les limites de la co-traitance sont celles du délit de marchandage. Soit le fait que les personnes employées le sont par l'employeur principal et non par l'entreprise cliente. "Il ne s'agit pas de mise à disposition de la main d'oeuvre. Mais souvent les entreprises confondent. Ce ne sont pas des personnes qui sont détachées mais c'est la prestation qui est détachée", insiste Christine Auclair de l'ANRH.
Pour rappel, le marchandage est un terme utilisé en droit du travail pour désigner un contrat par lequel un sous-entrepreneur fournit de la main-d'oeuvre qu'il paye lui-même à une entreprise. Le marchandage constitue un délit lorsqu'il est réalisé à but lucratif, et lorsqu'il cause un préjudice aux salariés de l'entreprise. Le délit de marchandage est régi par l'article L. 8231-1 du Code du travail.
Côté calcul des unités bénéficiaires (ou UB), "A la Société Générale, dans le TCO de l'appel d'offres, nous prenons en compte le bénéfice financier ce qui nous permet de faire appel à une entreprise plus chère mais qui a mis plus d'UB dans la co-traitance avec un EA", explique Bastien Gaudaire.
Enfin, pour Alain Masson, responsable diversité et inclusion chez Sodexo : " quand on a déjà le contrat, avoir recours à la co-traitance, c'est perdre du chiffre d'affaires donc il faut imaginer y avoir recours dans le cadre d'une prestation qui n'est pas déjà opérée". Une aubaine pour le secteur adapté qui n'est pas en reste en termes d'innovation selon les mots de la directrice des opérations de l'ANRH :" certaines EA sont en pointe sur les nouveaux métiers et la digitalisation comme par exemple sur le resétage de logiciels (tests avant la mise en ligne de logiciels) ou le montage de robots".