Économie circulaire : acheteurs, devenez des acteurs du monde de demain !
Économies financières mais aussi sauvegarde de matière première ou encore création d'emplois... L'économie circulaire ne peut plus être ignorée des acheteurs. Notamment de ceux qui souhaite être des acteurs créateurs de valeur au sein de l'entreprise. Mais aussi au sein de la société en général.
Je m'abonneAcheteurs, si vous vous mettiez à l'économie circulaire ? Thème de l'une des tables rondes du 10e Forum des achats responsables qui s'est tenu le 7 mars dernier, ce sujet mérite en effet que l'on s'y intéresse. L'objectif étant de réutiliser ses ressources plutôt que de les jeter, l'économie circulaire offre en effet de nombreux avantages, notamment économiques. Surtout, s'impliquer dans l'économie circulaire peut permettre à la direction achats de préempter un nouveau rôle, créateur de valeur.
Réutiliser plutôt que jeter
A la SNCF, le spectre d'action de l'économie circulaire est plutôt large : rails, poteaux caténaires mais également bâtiments, papiers... Si bien qu'un poste de responsable de l'économie circulaire a récemment été créé, occupé par Benoît Depoutot. Il donne des exemples d'actions déjà réalisés : "Jusqu'à présent, nous ferraillions les engins de chantier. Désormais, nous les vendons pour pièce ou pour réemploi, leur durée de vie étant plus longue que celle que l'on imaginait", décrit-il. Une action qui a permis de générer un chiffre d'affaire de 50 à 100% supérieur.
Chez Air France, ce sont les costumes qui sont recyclés, via un partenariat avec le fournisseur de vêtements professionnels Cepovett. Ils étaient auparavant recyclés en matériau d'isolation pour l'automobile et une réflexion est aujourd'hui menée pour en refaire d'autres uniformes. Par ailleurs, les écouteurs jetables distribués autrefois en classe économique ont été remplacés par des casques plus robustes et donc réutilisables. "Cela nous a fait économiser 400 tonnes de cuivre par an, que l'on faisait de plus venir par bateau", rapporte Thierry Bellon, directeur général achats du groupe Air France.
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De plus cela a permis de créer 50 emplois au sein d'une structure adaptée à Amiens qui emploie des personnes handicapées. "Quand on recycle, on crée 4 fois plus d'emplois qu'en ayant recours à l'incinération et 11 fois plus qu'en réalisant un stockage de ses déchets", poursuit Florence Collot, directrice déléguée au sein du réseau de recyclage Praxy.
Création de valeur
En effet, si la question des coûts peut être une des façons de sensibiliser les acheteurs à l'économie circulaire, ce ne doit pas être la seule raison. "L'économie circulaire soulève également la question de la création de valeur par les achats qui contribue ainsi à la stratégie développement durable de l'entreprise", note Thierry Bellon.
Au sein de la SNCF, un fascicule a été créé à destination des achats afin de les sensibiliser à l'économie circulaire et à les emmener à s'intéresser à la question. Dans cette petite lettre sont notamment abordées les questions d'enjeux et de mise en oeuvre opérationnelle. Des exemples externes sont également cités afin de donner des pistes de réflexion. "La formation des acheteurs est importante car ils n'ont pas forcément la vision de ce qu'est l'économie circulaire et de ce qu'on peut faire", estime Benoît Depoutot. François-Michel Lambert, président de l'Institut de l'économie circulaire, pense d'ailleurs que les formations initiales d'acheteurs, dans les écoles de commerce, devraient intégrer cette notion.
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Économie de fonctionnalité
"Ce qui est important, c'est le dialogue entre acheteurs et prescripteurs, qui peut conduire à la mise en place d'une économie de fonctionnalités", ajoute Gérard Bruno, délégué général de l'Observatoire des achats responsables (Obsar). Chez Air France, par exemple, les pneus des avions sont loués auprès de Michelin plutôt qu'achetés."Ce contrat date d'il y a 5/6 ans et était novateur à l'époque mais c'est la façon dont les entreprises doivent évoluer : il faut accepter de lâcher prise en interne quand des personnes font mieux que nous à l'extérieur", complète Thierry Bellon.
Car l'économie circulaire ne saurait se réduire au recyclage. L'économie de fonctionnalité peut en effet en faire partie, de par la réflexion qu'elle oblige à mener entre les donneurs d'ordre et leurs fournisseurs. "L'économie circulaire est intéressante si toutes les parties prenantes sont interfacées ", pointe Arnaud Humbert-Droz, président exécutif chez Valdelia, éco-organisme qui prend en charge la gestion des mobiliers professionnels usagés. Les fabricants, par exemple, sont importants car c'est eux qui décident d'utiliser ou non de la matière recyclée dans leurs nouveaux produits. Et les acheteurs ont leur rôle à jouer en exigeant de leurs fournisseurs des produits contenant un certain pourcentage de matériaux recyclés. Ou en refusant de signer des contrats d'enfouissement de leurs déchets. "La notion de déchets est petit à petit abandonnée pour parler de ressources. Car la matière première se raréfie et coûte de plus en plus cher", remarque Arnaud Humbert-Droz. L'acheteur devient donc un acteur du monde de demain de par les achats qu'il effectue.