Les achats responsables, "entrés dans la stratégie des entreprises"
Pierre Pelouzet, président de l'ObsAR, y croit : si les achats responsables progressent dans les entreprises, comme en témoigne le dernier baromètre, c'est grâce à " une implication globale des organisations et de leurs directions, en particulier " .
Je m'abonneSelon le baromètre 2019 de l'Observatoire des achats responsables, dont les résultats ont été dévoilées en fin de semaine dernière, 9 organisations sur 10 * ont mis en place une politique d'achats responsables, dont près de la moitié depuis plus de 5 ans. Et pour près de 50 % des organisations interrogées, sa mise en oeuvre ou son approfondissement est une priorité. "Tout le monde perçoit l'importance d'une telle démarche, sans pour autant toujours savoir comment l'appliquer", commente Pierre Pelouzet, président de l'ObsAR, précisant que le think tank ObsAR peut intervenir en support des organisations.
En une décennie, une gouvernance des achats responsables s'est peu à peu construite dans les entreprises, comme en témoignent les différentes étapes aujourd'hui franchies par plus de 80 % d'entre elles : l'intégration de critères RSE dans le cahier des charges, la formalisation des objectifs, le pilotage de la démarche, la validation par les directions générales et la diffusion en interne. La communication externe, pratiquée par plus de trois organisations sur quatre, a, quant à elle, gagné 30 points par rapport à 2012.
"De telles évolutions ne peuvent aboutir qu'avec une implication globale des organisations et de leurs directions, en particulier. Ce qui montre que les achats responsables sont sortis des départements achats et sont pleinement entrés dans la stratégie des entreprises", se réjouit Pierre Pelouzet. "Cela constitue un moteur formidable."
De la complexité du coût global
Selon le baromètre, 64 % des organisations ayant mis en place une politique d'achats durables appréhendent "parfois" (43 %) ou "systématiquement" (21 %) les coûts globaux des produits. Cette progression de 5 points par rapport à 2018 prouve que les achats responsables sont bien considérés comme un facteur de performance. En revanche, la prise en compte des coûts complémentaires, tels que les coûts d'utilisation, les coûts des risques ou encore la valorisation de la création de valeur, est en forte baisse. "L'appréhension du coût global reste un sujet complexe à maîtriser", estime Annie Sorel, vice-présidente de l'ObsAR. D'autant qu'il intègre, depuis quelques années, de nouveaux critères avec lesquels les entreprises doivent se familiariser. Plus de 40 % des répondants ne prennent pas en compte les coûts de fin de vie des produits. "Les acheteurs gèrent peut-être les déchets dans le cadre d'un processus spécifique, qui n'est pas forcément en relation avec leurs achats, avance Annie Sorel. Et, surtout, je pense qu'ils n'ont pas conscience que la réglementation sur ce point est en pleine évolution."
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* Méthodologie : sondage réalisé en ligne auprès de 185 décisionnaires dans les achats responsables : 131 issus de sociétés privées (71 % des répondants), 48 des organismes publics (26 % des répondants) et 6 "autres" (associations, syndicats...). Le panel est extrait du fichier de contacts de l'ObsAR, et il est pondéré par rapport aux secteurs d'activité. Il ne s'agit donc pas d'un échantillon national représentatif des entreprises françaises.
Le témoignage du ministère des Armées
Le Plan national d'action pour des achats publics durables (PNAAPD) fixe, comme objectif pour 2020, qu'au moins 25 % des marchés publics de plus de 25 000 € HT passés au cours de l'année comprennent au moins une disposition sociale. "Notre objectif de 20 % d'achats durables en matière d'environnement en 2018 a été atteint, voire dépassé", confie Jean-Marie Le Montréer, administrateur de l'ObsAR et chef de la mission Achats au Pôle immobilier, énergie et achats responsables du ministère des Armées.
"Cependant, tous les marchés ne se prêtent pas à des achats responsables en termes d'environnement, comme le gardiennage, l'entretien de climatiseurs ou le contrôle d'installations électriques", souligne-t-il. L'objectif de 15 % d'achats sociaux en 2018 n'a, en revanche, pas été rempli. Ils ont plafonné à 8 %. "Il est plus complexe de réaliser des achats sociaux qu'environnementaux. Nous collaborons avec des facilitateurs pour identifier les prestataires employant des personnes éloignées de l'emploi avec lesquels nous pourrions travailler. Ils nous font part de la difficulté à mettre en place des politiques d'insertion sur de petits marchés", note Jean-Marie Le Montréer.