Délais de paiements: le privé ne s'améliore pas. Le public, si
Le rapport de l'Observatoire des délais de paiement montre que, dans le secteur public, le délai de paiement des services de l'État s'améliore de 2 jours pour se situer en moyenne à 19,4 jours, contrairement au privé où les retards de paiements ne se réduisent plus.
Je m'abonneLe rapport annuel de l'Observatoire des délais de paiement, remis à Alain Griset, ministre délégué auprès du ministre de l'Economie, des Finances et de la Relance chargé des Petites et Moyennes Entreprises, montre que les retards de paiements ne se réduisent plus : un tiers des entreprises paient leurs fournisseurs avec un retard qui oscille autour de 11 jours.
Les paiements interentreprises sont installés en dessous des 60 jours
Le rapport 2019, qui traite de l'évolution des délais de paiement sur la période 2018-2019 et ne couvre pas l'impact de la crise de la Covid 19, "montre que les acquis de la loi de modernisation de l'économie de 2008 pour réduire les délais de paiement sont solides", selon le ministère de l'Economie. "Ainsi, les paiements interentreprises sont désormais bien installés en dessous des 60 jours : 44 jours pour les délais clients et 51 jours pour les délais fournisseurs en 2018. La situation est par ailleurs relativement stable s'agissant des comportements de paiements par secteurs. L'industrie et les transports ont vu leur situation s'améliorer alors que le secteur de la construction continue de souffrir de mauvais comportements de paiements."
Toutefois, l'Observatoire constate, sur la base d'indicateurs convergents, que les retards de paiements ne se réduisent plus : un tiers des entreprises paient leurs fournisseurs avec un retard qui oscille autour de 11 jours. À titre indicatif, en l'absence de retards, les PME récupéreraient 19 milliards d'euros et les ETI 7 milliards d'euros, dont 11 milliards d'euros dus par les grandes entreprises et 15 milliards d'euros par les autres agents économiques (secteur public, étranger...)." Cela montre l'importance de maintenir les efforts engagés depuis plusieurs années pour faire respecter les délais de paiement légaux. La proportion de grandes entreprises réglant leurs fournisseurs sans retard est significativement plus faible que celle des entreprises de taille plus modeste."
Dans ce contexte, "la politique de contrôle conduite par la DGCCRF confirme son importance", commente le ministère. En 2019, 1 517 établissements ont été contrôlés avec un taux d'anomalie de 31 %, grâce à un ciblage efficace des contrôles. En 2019, 209 décisions de sanction ont été notifiées aux entreprises contrôlées, représentant un montant total d'amendes de 22,4 millions d'euros. De plus, 62 procédures de sanction ont également été initiées pour un montant total d'amendes envisagées de 11,4 millions d'euros.
Les dix premières amendes d'un montant supérieur à l'ancien plafond de 375 000 euros ont été prononcées en 2019, dont quatre supérieures à 1 million d'euros :
-1 230 000 € à l'encontre de XPO Distribution France,
-1 600 000 € à l'encontre de GEFCO,
-1 800 000 € à l'encontre d'EDF,
-3 700 000 € à l'encontre de SFR.
Dans le secteur public, le délai de paiement des services de l'État s'améliore de 2 jours pour se situer en moyenne à 19,4 jours. S'agissant des collectivités locales et des établissements publics locaux et hospitaliers, s'ils demeurent en moyenne en deçà du délai réglementaire, leur délai de paiement se dégrade un peu, passant de 26,8 jours à 27,4 jours en 2019. L'Observatoire relève la situation préoccupante de certaines collectivités, en particulier de grandes tailles : un quart, voire près de la moitié d'entre elles effectuent des paiements au-delà du délai réglementaire de 30 jours.
Un autre point de vue...
Si cette étude révèle que le nombre de jours de retard moyen est apparemment resté stable pendant la crise, selon Sidetrade, la part des paiement en retard a, en revanche, bel et bien explosé, en France et en Europe.
Sidetrade publie, depuis le 22 avril, en partenariat avec BFM Business, un tracker sur les retards de paiement des entreprises. Cet indicateur calcule l'évolution des comportements de paiement de plus de 3,7 millions d'entreprises au sein de six pays européens (France, Royaume-Uni, Espagne, Italie, Belgique, Pays-Bas) et restitue, semaine après semaine, la réalité de leurs facturations. Ainsi, Sidetrade a analysé depuis le 1er janvier 2020, plus de 26 millions de factures totalisant 54 milliards d'euros de transactions inter-entreprises. Grâce à cette base de données unique, Sidetrade a la possibilité de se baser sur des factures réelles, et non sur du déclaratif. Il ressort que :
- Alors que le taux de retard de paiement en France était de 19% avant la pandémie, ce taux a atteint 38% le 18 mai 2020.
- Selon le dernier relevé du tracker (au 28 septembre 2020), il était à 25%.
Un secteur comme le commerce de détail accuse une hausse de près de 100% de ses impayés.
Les chiffres pour l'ensemble des pays et des secteurs sont disponibles à cette adresse : https://invoice-tracker.sidetrade.com/
Côté Europe
-Dans un contexte de baisse générale en Europe, seule la France et l'Espagne sont encore au-dessus de leur niveau d'impayés pré-pandémique
Avec 25% de factures impayées chacun, le Royaume-Uni et la France sont au coude à coude en tête de classement. A ceci près que le RU est désormais à -17% par rapport à sa situation pré-Covid.
L'Italie (-15%), la Belgique (-12%) et les Pays-Bas (-11%) affichent également une situation très favorable.
Au 28/9, la France est toujours, et de très loin, le pays ayant enregistré la plus forte dégradation de ses impayés suite à la crise (+31%), le second, l'Espagne, n'affiche qu'un différentiel de 8% par rapport à sa moyenne pré-pandémique.
- Les retards de paiement sont néanmoins à nouveau à la baisse en France
Après avoir atteint 30% en août, le taux d'impayés en France alterne baisses et hausses depuis la rentrée. Ainsi après une nouvelle poussée à 31% la semaine précédente, il retombe à 25% la semaine du 28 septembre. On estime désormais l'impact de la crise (depuis le 13 avril) à 46 milliards d'Euros sur la trésorerie des entreprises, soit 22Mrd€ de moins que la semaine précédente*.
- Le commerce de détail reste le secteur le plus impacté en France avec une dégradation se chiffrant à +97%. A titre de comparaison, la dégradation des impayés de l'agroalimentaire, secteur pourtant le plus touché (46% d'impayés) n'est que de +19%. Les retards de paiement sont analysés secteur par secteur dans le tableau ci-dessous.
* Le calcul utilise le taux d'impayés observés en France avant le confinement - période du 1er janvier au 11 mars 2020 (19%) et celui constaté au 28 septembre 2020 (25%). Il se base sur les 722 Mds€ de crédit inter-entreprises en France (évalué dans le rapport annuel de l'Observatoire des délais de paiement, publication Banque de France, 2018), et porte sur la différence du montant des impayés entre les deux périodes.