L'expérience collaborateur au carrefour des priorités RH
Offrir aux talents des perspectives et conditions de travail à la hauteur de leurs attentes devient incontournable pour les fidéliser. Au-delà des dispositifs attractifs à mettre en place, l'implication de toutes les strates du management s'avère nécessaire.
Je m'abonneGuerre des talents, tension sur les recrutements, rétention des salariés... On ne compte plus les expressions qui traduisent les difficultés actuelles des entreprises à se doter durablement de compétences à la hauteur de leurs besoins. L'expérience collaborateur fait figure de remède, de levier d'action essentiel, avec la difficulté d'être en phase avec des demandes en constante évolution. Un contexte où le manager devient un rouage clé entre l'entreprise et sa culture d'un côté, et le collaborateur et ses aspirations de l'autre côté.
Pour Karim Cherif, manager et responsable de la practice RH chez Magellan partners, « le manager est la première vitrine, le premier guichet pour le salarié. Il est une clé qui va capter les signaux faibles comme les signaux forts. On lui demande d'innover, mais aussi d'assurer le déroulement classique des règles en vigueur, ce qui suppose des injonctions parfois contradictoires. »
Le début des relations au coeur des attentions
La présentation des valeurs et de l'environnement de l'entreprise dès l'entame des échanges est mentionnée comme une amorce essentielle de l'expérience collaborateur. « Nous travaillons en association avec Welcome to the Jungle auprès de qui les collaborateurs peuvent découvrir notre organisation en vidéo. Nous privilégions parfois des échanges autour d'un déjeuner avant de recevoir la personne dans le cadre d'un entretien formel », illustre Christine Durand, DRH de Mega International. À l'occasion de l'onboarding, le manager se fait le relais des premières discussions « en expliquant qui fait quoi à tous les échelons de l'organisation. »
Camille Chenuil, cofondateur de la start-up Hestiia spécialisée dans les systèmes de chauffage innovants pour les particuliers et les entreprises, et en charge des RH au sein de l'entreprise, souligne lui aussi l'importance de cette phase d'approche : « En plus des valeurs, de l'environnement, et de la structure de l'entreprise qui sont évoqués dès le premier entretien, nous proposons à ce stade des questionnaires sur ce plan. Mais au-delà des discours, il s'agit de pouvoir incarner concrètement ces éléments au quotidien par la suite, en les intégrant à l'accompagnement au long cours. »
Hicham Al Bouhali, People Director Talent Acquisition chez l'éditeur de solutions de paie et RH SD Worx, estime que la première expérience est déterminante car elle va conditionner la suite du vécu. « Si le premier jour, le collaborateur n'a pas de PC à disposition, c'est un très mauvais début. Il en va de même s'il ne sait pas quel est son contact au sein des RH. L'enjeu est de veiller à ce que l'expérience des premiers instants soit unique. L'accès à des bureaux lumineux, le rapport aux autres collègues, l'expérience digitale avec des outils de travail adaptés aux réalités quotidiennes doivent être à la hauteur des attentes.
Miser sur l'humain au long cours
Obtenir de la reconnaissance au travail, être acteur de la construction de l'entreprise, pouvoir communiquer de façon fluide avec toutes les parties prenantes... Ces quelques demandes sont fréquentes, si l'on en croit les retours d'expert. Tenir compte des souhaits tout au long du parcours professionnel fait partie des missions que le manager doit aider à concrétiser. « Nous menons des échanges une fois par mois sur les ressentis, les évolutions souhaitées, les points à revoir. Cette démarche rencontre un écho très positif », se réjouit Camille Chenuil.
La culture du feedback prend une place centrale. Contrairement à un ancien modèle où les retours collaborateurs se font une fois par an, « nous utilisons depuis septembre 2022 un outil dédié aux remontées d'information. Le feedback continu permet aux collaborateurs de parler avec le manager bien plus rapidement de ce qui ne leur convient pas. Il est intéressant aussi pour la valorisation des compétences. Mais l'outil ne fait pas tout bien sûr : il doit être accompagné d'une réelle volonté d'échanges continus », témoigne Hicham Al Bouhali. Être prêt des collaborateurs signifie également bien comprendre que chacun a des spécificités différentes, liées aussi à sa vie privée. « Vivre en couple ou non, avoir des enfants ou non sont des critères qui vont conditionner les préférences horaires, de calendrier. »
Pour Christine Durand, la collecte des avis est « par ailleurs importante pour que l'entreprise puisse améliorer son « employeurabilité » et la façon dont elle va convaincre les futures recrues. »
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Se montrer à l'écoute peut être un moyen de privilégier de nouveaux choix au quotidien. « Nous travaillons par projets, et ce sont ces derniers qui vont en conséquence faire appel à des besoins. Ce sont eux qui justifient l'achat de matériels ou de solutions et non pas le fait d'appartenir à tel ou tel département dans l'entreprise », illustre Camille Chenuil.
La volonté de proximité à l'égard des collaborateurs a également conduit SD Worx à lancer un grand programme de flexibilité, pour définir pays par pays, quels besoins existaient à ce niveau. La possibilité pour tous les collaborateurs de travailler 4 semaines par an à l'étranger, dans une autre filiale, a ainsi vu le jour, pour les aider à évoluer. Une initiative qui a rapidement rencontré un vif succès.
Soigner le parcours collaborateurs de bout en bout
Cinq étapes s'avèrent cruciales tout au long de la vie du collaborateur dans une organisation : le recrutement, l'onboarding, le développement, la rétention et l'offboarding. La marque employeur, la culture d'entreprise et l'évolution des compétences constituent le fil rouge des relations entre le salarié et son manager. Mais encore faut-il pouvoir mesurer leur avancement, valoriser les informations issues des feedbacks et être très au clair sur le stade auquel on se situe. « Sans un outil approprié, il peut être difficile d'être pertinent au long cours sur la gestion des parcours », explique Hicham Al Bouhali. Une cartographie est nécessaire, pour segmenter les salariés selon leur fonction, leur positionnement dans le cycle de vie de la relation à l'entreprise, ou encore pour déterminer les actions à prioriser.
À l'opposé des étapes de recrutement et d'onboarding au cours desquelles il convient de conférer aux échanges un caractère unique, focalisé sur l'humain et les attentes du collaborateur, le processus d'offboarding joue lui aussi un rôle déterminant. Un départ en mauvais termes ou dans un contexte terni peut se traduire une mauvaise réputation que le collaborateur risque d'alimenter. La transparence quant aux raisons de la fin de contrat et la communication doivent être maintenues avec la même exigence que lors des autres étapes du parcours. La présence du manager lors du dernier jour du salarié en question, les remerciements ainsi qu'une récompense appropriée sont dans tous les cas incontournables.