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[Energie] Entre un pragmatisme court terme et une durabilité aux investissements plus lourds, quels arbitrages pour une décarbonation réussie ?

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[Energie] Entre un pragmatisme court terme et une durabilité aux investissements plus lourds, quels arbitrages pour une décarbonation réussie ?

La décarbonation des entreprises, notamment dans le cadre du Scope 2, impose de nombreux arbitrages entre achats énergétiques à court terme et stratégies à long terme. Si les contrats d'approvisionnement flexible permettent de s'adapter à la volatilité des prix, ils ne garantissent pas toujours la compétitivité à long terme. Comment les entreprises peuvent-elles équilibrer ces pratiques pour concilier efficacité économique et engagement environnemental durable ?

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Le congrès Gazelec avec qui Décision Achats fut partenaire a donné la part belle à la question de la décarbonation. Les entreprises sont donc de plus en plus tenues de réduire leurs émissions de CO2, notamment celles liées à leur consommation d'énergie, dite "Scope 2". Cela implique des choix décisifs quant à leurs pratiques d'achats énergétiques. D'un côté, les achats à court terme permettent de profiter des fluctuations du marché, mais ils peuvent exposer les entreprises à une volatilité qui compromet leur stabilité financière. De l'autre, une stratégie d'approvisionnement à long terme assure une meilleure prévisibilité des coûts, mais demande des investissements initiaux importants et engage les entreprises sur des périodes plus longues. Face à ce dilemme, les entreprises doivent adopter des approches équilibrées entre opportunisme à court terme et stratégie de décarbonation à long terme, tout en restant compétitives.

Une flexibilité nécessaire face à la volatilité des prix

Les achats opportunistes à court terme, basés sur les prix spot de l'énergie, offrent une flexibilité indispensable aux entreprises confrontées à une demande et des prix fluctuants. Dans un contexte d'incertitude géopolitique et de volatilité des prix du gaz et de l'électricité, cette approche permet aux entreprises de s'adapter rapidement. Selon Yoann Cornet, directeur achats d'YNSECT " la flexibilité est essentielle, notamment pour gérer les coûts énergétiques en période de démarrage industriel ".

En effet, l'exemple de l'usine de production d'YNSECT, leader dans la production d'ingrédients à base d'insectes pour les animaux, montre bien cette dynamique. Avec une consommation énergétique prévue de 130 gigawattheures, la stratégie actuelle repose sur des contrats à court terme d'un an pour l'électricité et le gaz. Cela donne à l'entreprise l'opportunité de conserver une marge de manoeuvre face à l'évolution des prix tout en ajustant son approvisionnement en fonction de ses besoins réels.

Cependant, cette flexibilité a un prix : les entreprises qui ne sécurisent pas leurs approvisionnements à long terme prennent le risque de subir une hausse des prix imprévisible, et donc de compromettre leur rentabilité future. Jérôme Wolff, directeur commercial chez GazelEnergie, souligne à ce sujet que " beaucoup d'industriels ont déjà vendu des produits pour 2026 sans avoir sécurisé leurs achats d'énergie pour cette période, ce qui représente un risque important ".

Sécurisation de la compétitivité par des engagements durables

Si les achats à court terme présentent des avantages en termes de flexibilité, de nombreuses entreprises reconnaissent la nécessité de sécuriser une partie de leur approvisionnement sur le long terme, afin de stabiliser leurs coûts et réduire leur exposition aux fluctuations des marchés énergétiques. En particulier, dans un contexte de décarbonation où les entreprises cherchent à réduire leur empreinte carbone tout en préservant leur compétitivité, cette stratégie apparaît comme indispensable.

Anaïs Voy-Gillis, directrice de la stratégie RSE chez HUMENS, témoigne de cette réalité " si on ne garantit pas la compétitivité de l'industrie européenne, alors la réindustrialisation du continent sera compromise ". Sa société a mis en place une approche mixte, répartissant son approvisionnement énergétique entre la biomasse, le gaz et le charbon. Ce type de diversification, combiné à des contrats à long terme pour certaines énergies comme la biomasse, permet non seulement de réduire l'empreinte carbone de l'entreprise, mais aussi d'assurer une meilleure prévisibilité des coûts.

Les contrats à long terme, comme les PPA (Power Purchase Agreements) pour les énergies renouvelables, commencent à être adoptés plus largement. Ils favorisent la stabilisation des prix sur plusieurs années ainsi qu'une transition énergétique durable. Toutefois, leur mise en place nécessite des investissements initiaux importants, que toutes les entreprises ne sont pas prêtes à engager.

Comment trouver l'équilibre pour une transition énergétique réussie ?

Le défi pour les entreprises réside donc dans la capacité à concilier flexibilité à court terme et sécurisation à long terme, tout en assurant leur transition énergétique. La Commission de Régulation de l'Énergie (CRE) a mis en place un cadre pour permettre aux acteurs du marché de choisir des stratégies d'approvisionnement adaptées à leurs besoins, tout en garantissant une concurrence saine. Selon Anne-Sophie Dessillon, directrice des marchés de la CRE, " nous travaillons à stabiliser le cadre pour permettre une meilleure prévisibilité à moyen et long terme ".

En parallèle, les entreprises doivent gérer les risques liés à cette transition. Certaines industries, notamment dans industries lourdes, investissent massivement dans des technologies pour réduire leur empreinte carbone, comme le captage et la réutilisation du CO2. D'autres, à l'image de l'usine évoquée plus tôt, privilégient une transition progressive, en remplaçant par exemple les chaudières à gaz par des alternatives électriques.

La réussite de cette transition repose également sur l'innovation. Les entreprises qui parviennent à intégrer des technologies de rupture, tout en maintenant une flexibilité dans leurs achats d'énergie, seront mieux positionnées pour affronter les défis à venir. Comme l'a affirmé l'experte d'HUMENS : " La décarbonation doit aller de pair avec l'innovation. Nous devons être à l'avant-garde et nous appuyer sur des start-up pour faire émerger les technologies de demain ".

 
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