Le papier : halte aux idées reçues !
Le papier a mauvaise presse. Considéré comme une source de gaspillage contribuant à la déforestation, le papier ne rime pas avec écologie. Mais beaucoup d'idées fausses circulent sur le sujet. Quelle est la véritable empreinte écologique de votre papier ? Quelles sont les politiques responsables mises en place par le secteur papetier ? Analyse.
Je m'abonneEn France, 200 milliards de feuilles sont imprimées chaque année (soit 40 000 par minute) et un employé de bureau consomme 94 kg/an de papier. Sachant que pour fabriquer une seule ramette de papier issu de fibres vierges, il faut 7 kg de bois, 130 litres d'eau et émettre 3,5 kg de CO2, le calcul en terme de responsabilité écologique est vite fait. " Le papier a une mauvaise image écologique. Cette image de coupeur d'arbres, de gaspillage est très difficile à porter. C'est bien un produit symbole quand ce n'est pas un bouc émissaire ", souligne Jean-Marie Nusse, président de la Commission image de l'Union française des industries des cartons, papiers et celluloses (Copacel).
Le papier ne nuit pas à la forêt
Contrairement aux idées reçues, la forêt française sert peu à fabriquer du papier. Ainsi, l'industrie papetière consomme 18,5 % de la récolte annuelle de la forêt française, ce qui représente 34 % du bois issu des forêts françaises commercialisé en France.
Selon l'association Culture Papier, créée en janvier 2010, dont la vocation est de promouvoir le développement responsable du papier et de l'imprimé, l'industrie papetière ne nuit pas à la gestion et au développement des forêts. " Au contraire, la consommation de papier favorise le développement de la forêt, affirme Laurence Hulin , directrice développement responsable et pilotage de Mediapost Communication, trésorière au sein de l'association Culture Papier. D'ailleurs, l'industrie papetière travaille avec l'Office national des forêts (ONF). " Ainsi, près de 70 % des fibres vierges utilisées dans la fabrication de la pâte à papier proviennent des bois de coupes d'éclaircies nécessaires à la croissance de la forêt et 30 % des résidus de la scierie. Et en France, la forêt a gagné près de 500 000 hectares, soit l'équivalent d'un département comme les Bouches-du-Rhône, au cours de ces dix dernières années, selon l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe).
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Le papier est recyclable jusqu'à cinq fois
Le papier a une durée de vie importante. Ainsi, les spécialistes affirment que ce matériau est recyclable jusqu'à cinq fois. Et le recyclage du papier permet de fournir une matière première de qualité alternative à la pâte de fibres vierges pour la production papetière. Par exemple, une tonne de papier permet de produire 900 kg de papier recyclé. " Aujourd'hui, la quantité de papier recyclé mobilisée n'est pas suffisante dans l'industrie du recyclage ", explique Mickaël Martin , responsable des adhérents au sein de l'éco-organisme Ecofolio, agréé par les pouvoirs publics et chargé de la collecte et du recyclage des papiers en France. Le papier est aujourd'hui le premier déchet traité dans les centres de tri (60 %). " Nous avons pour ambition d'augmenter le taux de recyclage à 55 % à l'horizon 2016. Aujourd'hui, le taux de recyclage avoisine les 47 % ", détaille Michaël Martin. L'éco-contribution versée par les entités privées et publiques émettrices de papier est basée sur un prix de 48 euros HT la tonne de papier au-delà de cinq tonnes par an. Depuis le 1er janvier 2013, pour une déclaration en 2014, le barème de l'éco-contribution tient compte de la composition du papier. Ainsi, grâce à ce barème dit éco-différencié, l'éco-contribution diminue de 10 % si le papier utilisé contient au moins 50 % de fibres recyclées.
Des papetiers de plus en plus responsables
Ces 20 dernières années, les investissements massifs réalisés par l'ensemble de la filière dans des procédés industriels moins polluants auraient généré une diminution de 80 % des rejets dans l'eau, de plusde 30 % des consommations d'énergies et de 50 % des émissions de CO2 fossiles par tonne produite, estime Copacel. Ainsi, le groupe américain International Paper, spécialisé dans le papier et l'emballage, possède une usine dans la région du Limousin à Saillat-sur-Vienne. Ce site est la seule usine dite intégrée en France, c'est-à-dire qu'elle produit à la fois la pâte à papier et les ramettes pour la France, mais également l'Italie, l'Espagne ou encore le Royaume-Uni. " Nous travaillons avec l'antenne locale des comptoirs du Bois de Brive, qui nous fournit notre bois certifié PEFC. L'usine utilise aussi des résidus de scieries situées à proximité ", explique Pascal Péquin, directeur commercial France et Benelux chez International Paper. Cette dernière a travaillé avec l'Ademe pour réaliser son bilan en CO2. " L'usine est autosuffisante. Elle produit 85 % de son énergie dite de biomasse grâce à la combustion des résidus du processus de fabrication de pâte à papier (écorce, liqueur noire, etc.) ", souligne le directeur commercial. Certifiée ISO 9001 et ISO 14001, l'usine vient d'obtenir le label Origine France Garantie en 2012, après un audit mené par Bureau Veritas.
De même, les fabricants de papier mettent la main à la pâte. Et aujourd'hui, le papier recyclé a fait des progrès. Ainsi, le papier Curious Matter, dernière invention née de l'esprit des créateurs Arjowiggings et distribuée par Antalis, est réalisé... à base d'amidon contenu dans les déchets de pomme de terre.
Près de 9 % des dirigeants ne connaissent pas les impacts du papier de bureau sur l'environnement selon une enquête(1) de l'observatoire de l'éco-responsabilité du tertiaire de Riposte Verte, association au service de l'environnement. Une organisation sur trois (31 %) n'analyse pas l'évolution de ses achats de papier. Enfin, 36 % des dirigeants ne semblent pas informés sur le papier utilisé par leur imprimeur et 49 % ignorent le grammage, l'encre (végétale ou non), le traitement des déchets, etc.
Pour connaître l'empreinte écologique de son papier, il existe différents outils, comme Paper Profile ou Paper Calculator. Ainsi, Paper Profile se présente comme un formulaire de déclaration qui prend en compte toute la chaîne d'approvisionnement et fournit aux acheteurs de papier une source d'informations permettant de faire un choix conscient. Cette fiche d'informations précise la gestion environnementale (ISO 14001 et/ou le système Eco-Management and Audit Scheme (EMAS)), mais également les paramètres environnementaux (certification PEFC/FSC, émissions dans l'atmosphère, rejets d'effluents dans les milieux aquatiques, déchets solides mis en décharge et la consommation d'électricité). Enfin, la composition du papier est représentée sous forme de camembert (taux de pigment et charges, fibres vierges et/ou à partir de fibres recyclées).
(1) Étude "Papier, quelles éco-pratiques au bureau ?" réalisée en mars 2012 avec un total de 1 025 réponses. Sur le panel, 45 % des répondants travaillent dans le secteur privé, 39 % dans le public et 16 % dans l'économie sociale et solidaire. www.paperprofile.com