Achats de prestation de services : vers une gestion du risque optimisée
L'acquisition de services entre dans une catégorie spécifique d'achats, à l'inverse des produits. La fonction achats est alors soumise à la gestion de nombreuses contraintes. Un domaine dans lequel la technologie apporte de nouvelles réponses.
Je m'abonne "On n'achète pas une prestation de services comme on achète une tonne de matière première. Dans cette famille d'achats, il y a de l'humain, des spécificités métiers, une manière propre à chacun d'aborder les choses", décrit Patrick Chabannes, senior strategist pour l'éditeur de solutions e-achats Determine. Une description qui montre bien que certains achats doivent être gérés avec beaucoup de précautions. L'externalisation de tâches ne cesse de gagner en importance dans les entreprises et, en conséquence, la question de l'optimisation de la fonction achats associée hante toujours plus les esprits, en particulier en ce qui concerne la pierre angulaire du domaine : la gestion du risque.
Dans ce genre de démarche, les modalités réglementaires, les spécificités métiers compliquent les traitements. "Il y a une obligation de vigilance de la part des donneurs d'ordre lorsqu'on achète une prestation de services, pour s'assurer que le fournisseur est bien en règle au regard de ses cotisations sociales. Le risque de fraude au travail dissimulé est réel, bien plus fréquent qu'il n'y paraît. Cette vérification à mener par le donneur d'ordre doit être faite tous les six mois", rappelle Rémi Lenthéric, responsable du Club des acheteurs de prestations intellectuelles et directeur de Provigis, société spécialisée dans la gestion du devoir de vigilance et la certification de documents légaux, filiale de Freelance.com.
Dans un contexte où ce devoir de vigilance demande toujours plus d'attention, l'automatisation de certains contrôles est accueillie avec enthousiasme au sein des directions achats. La vérification de documents comme, par exemple, les attestations Urssaf est désormais une tâche en passe d'être industrialisée. "Pendant longtemps, des opérateurs étaient en charge de ces activités qui, dans les grandes organisations, peuvent être extrêmement chronophages. Aujourd'hui, ce sont des robots équipés de technologies OCR [reconnaissance optique de caractères, NDLR] qui prennent à leur compte ces travaux", poursuit Rémi Lenthéric. Et l'arrivée de solutions innovantes pour gérer plus rapidement le risque associé aux achats de prestation de services ne semble pas prête à s'estomper. Des dispositifs de chatbots sont déjà testés dans le but d'industrialiser davantage ces activités. L'objectif est de se doter d'une plus forte capacité de traitement, à moindre coût, sur des questions qui restent relativement basiques. "L'innovation logicielle est bien utile dans ce domaine. Mais l'expertise humaine s'avère indispensable dans de nombreux cas", relativise le directeur de Progivis.
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Les limites de la technologie
Le donneur d'ordre doit également demander au prestataire la liste des salariés étrangers qu'il emploie et qui sont soumis à une autorisation de travail, en plus de l'attestation de cotisations sociales et l'extrait Kbis. "Les situations peuvent être très variables. Ce point de gestion du risque n'est pas facilement automatisable", ajoute Rémi Lenthéric.
L'apport d'une solution sur mesure est parfois nécessaire pour bien interpréter un document ou une donnée, et surtout pour fournir une réponse de l'outil adaptée à la criticité de la prestation. Si on prend par exemple une prestation de services réalisée pour le compte d'une grande entreprise établie, cotée en bourse, délivrée par un acteur du marché reconnu qui ne représente en aucun cas un risque stratégique particulier et qui, de surcroît, ne concerne pas un domaine stratégique, le risque estimé sera plutôt faible. À l'inverse, si on prend en exemple une start-up qui n'est pas encore rentable, qui met sur pied une solution innovante métier à très forte valeur ajoutée et hautement stratégique, et pour qui la prestation joue un rôle beaucoup plus central, la situation est très différente.
"Dans les deux cas, l'appréhension du risque ne se trouve pas du tout au même niveau, compte tenu de la nature de la prestation et du fournisseur qui va la délivrer. La limite de l'outil est de ne pas forcément contextualiser la dépense et de ne pas mener à bien tous les contrôles nécessaires en rapport avec le degré de risque que représente la prestation", souligne Rémi Lenthéric. L'approche que bon nombre de spécialistes recommandent est celle adoptée par les grands groupes, le BPO (Business Process Outsourcing). Au-delà de l'outil technologique, les données remontées peuvent être vérifiées par des juristes, des spécialistes, pour être en mesure de proposer un service beaucoup plus ciblé et complémentaire.
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