[Tribune] Fabien Voisin (Inria) : "Sans volonté politique, point de maturité pour les achats publics"
Le code doit devenir une donnée à intégrer dans la démarche
Dans cette approche, le code des marchés publics n'est plus le fondement de la légitimité de l'acheteur public, il n'est qu'une donnée environnementale (certes contraignante) à intégrer dans la démarche. C'est la différence principale avec les achats privés, l'autre différence étant l'intégration dans les achats publics des objectifs de politiques publiques (d'où, parfois, la schizophrénie de l'acheteur public soumis à des injonctions paradoxales (économies vs allotissement ou achats responsables), du moins lorsqu'il n'est pas encore parvenu à un niveau de maturité achat suffisant.
Instrument de la confiance aussi pour les opérateurs économiques qui savent que l'acheteur public n'est pas autorisé à prendre les mêmes libertés que dans le privé et qu'il doit en permanence garantir l'équilibre du contrat entre les parties. Ce qui permet aussi à l'acheteur public de prévoir des plans de progrès dans ses contrats et d'utiliser les clauses incitatives pour faire vivre le marché via des stipulations innovantes (RFA, partage des économies en cas de réalisation de gains de productivité,..).
Professionnalisation des achats à l'Inria
Cette prise en compte de la vie du contrat dans le cadre d'une démarche achat performante, ne peut être réalisée que par une démarche initiée bien en amont de la consultation et destinée, à partir de l'analyse du marché fournisseur, à établir un cahier des charges (fonctionnel, idéalement) cohérent avec le secteur économique adressé.
L'acheteur public, s'il se professionnalise, peut redonner du sens à son travail en participant à la création de valeur dès lors qu'il agit selon une orientation et des objectifs cohérents avec la stratégie de son entité.
Chez Inria, nous avons mis en oeuvre un parcours de professionnalisation des achats certifiant (accompagnés par le cabinet CKS public). L'organisation achat a été réformée pour s'articuler autour d'un système de management national des achats, dans lequel chaque acheteur, y compris ceux qui sont dans les 8 centres de recherche de l'institut, devient lead buyer sur une famille d'achat, en binôme avec un prescripteur.
Leur mission est de proposer des stratégies d'achat nationales sur leur famille et, si elles sont validées par le comité national des achats, de déployer les dispositifs contractuels d'approvisionnement pour l'ensemble des sites lorsque cette stratégie est pertinente. Libérés d'une partie des achats transversaux (convertis en simples approvisionnements au niveau des centres), en plus de leur mission nationale sur leur famille d'achat, ils restent en parallèle acheteurs pour les achats spécifiques de leur centre, notamment les achats scientifiques pour lequel ils ont une plus forte valeur ajoutée.
Il est générateur de gains achats pour l'Inria, c'est aussi une plus grande garantie concernant l'avenir professionnel des acheteurs dont le niveau d'employabilité augmente considérablement. Non seulement pour exporter ce modèle auprès d'entités publiques qui souhaiteraient s'inscrire dans une démarche similaire et accroitre leur maturité achat. Ce qui devrait être une évidence pour tous, lorsque l'on sait que le levier achat, actionné par des " vrais " acheteurs publics - rompus aux techniques d'achat via le perfectionnement individuel et experts en matière de marchés publics - permet d'optimiser souvent le 2ème poste de dépenses d'une entité (après les dépenses de personnel).
Ils deviennent aussi des profils susceptibles d'intéresser des entreprises privées, parfois à la recherche d'un peu plus de rigueur dans leur procédure d'achat.
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