Les délais de paiement fournisseurs battent de bien mauvais records en 2015
13,6 jours de retard c'est en moyenne le délai de paiement fournisseurs dans l'Hexagone révélé par Altares dans son étude trimestrielle. Soit la pire valeur depuis 10 ans.
Je m'abonne"L'économie a redémarré depuis de nombreux mois. La preuve, les comportements de paiement dérapent à nouveau", souligne Thierry Millon, directeur des études Altares, réseau international d'informations BtoB, à la lecture de l'étude trimestrielle du cabinet sur les comportements de paiement des entreprises en France et en Europe au cours du 2ème trimestre 2015.
13,6 jours : la pire valeur depuis 10 ans
13,6 jours de retard c'est en moyenne le délai de paiement fournisseurs dans l'Hexagone révélé par Altares. Soit la pire valeur depuis 10 ans. En 2014, le délai de paiement était de 12 jours.
Autres chiffres : seulement 36,5% des entreprises françaises payent toutes leurs factures à l'heure. De plus, 8% décalent le règlement de plus de 30 jours contre 6,2% en 2014.
"Cette recrudescence des longs retards est significatif d'un défaut de trésorerie. Altares observe en effet sur un cycle long, que lorsqu'un client décale ses paiements de plus de trente jours cela multiplie par six le risque qu'il dépose le bilan dans les mois qui suivent. Les commandes reviennent donc, mais par manque de cash, certaines entreprises, notamment les TPE, pourraient ne pas avoir les moyens de les honorer", s'alarme le directeur des études Altares.
Dans le domaine des retards de paiement, le secteur public est souvent montré du doigt car loin d'être exemplaire. Mais dans le détail, en comparant le secteur public avec celui du privé, les collectivités territoriales font mieux que les entreprises privées.
L'Etat reste le mauvais élève
Au niveau de l'Etat, les ministères et leurs services, le retard moyen est le plus élevé avec 16 jours et un taux de longs retards là encore le plus haut (9% en moyenne).
16 jours de retard en moyenne pour l'Etat et des Ministères
Seuls 6,5 % des EPIC (Etablissement Public industriel et commercial) décalent leurs paiements au-delà de trente jours après la date prévue sur la facture. Un clivage fort est observé entre les EPIC de 50 à 200 salariés et ceux de 200 à 500 salariés. Les premiers ont davantage de difficultés à honorer le paiement des factures dans les délais ; ils sont plus de 8% à payer avec des retards supérieurs à trente jours contre moins de 3% pour les seconds.
De leur côté, les Etablissements Publics Administratifs (EPA) se révèlent meilleurs payeurs que le privé. Le retard moyen de règlements est inférieur à 11 jours pour les EPA de moins de 50 agents, de 12 à 13 jours jusqu'à 200 agents et au-delà de 15 jours pour les EPA de plus de 200 agents. Les retards de plus de trente jours varient peu selon la taille et se situent sous les 4%, un taux deux fois inférieur à celui constaté dans les sociétés du privé (7,6%).
Le taux des longs retards est encore plus bas pour les collectivités territoriales (6,6%) qui peuvent aussi s'enorgueillir de faire tomber le retard moyen sous le seuil des 10 jours (9,8 jours), une valeur là-aussi bien inférieure à celui du secteur privé.
Enfin, du côté du privé, le retard moyen de paiement des sociétés de plus de 500 salariés est de 14,8 jours contre 13,7 pour les sociétés plus petites. Toutefois cet écart se réduit ce trimestre, les petites sociétés payant moins bien tandis que les grandes maintiennent leurs conditions, voire tentent de les améliorer. Plus que sur le retard moyen, c'est sur les grands retards que les différences sont les plus flagrantes. Toute taille confondue, les sociétés sont en moyenne 7,6% à différer leur paiements de plus d'un mois.
"Le dépassement de la date de facture peut être dû à une problématique technique ou structurelle, de type litige commercial ou conformité data. Mais l'allongement des délais de paiement semble d'autre nature depuis quelques mois. Il demeure souvent la seule alternative retenue pour améliorer son besoin en fonds de roulement (BFR). Le fournisseur est actuellement fortement sollicité par un allongement des délais de règlements alors que les stocks ne débordent pas et le poste client s'accroit modérément. Qu'adviendra-t-il dans un schéma de reprise plus rapide, un contexte énergétique moins favorable et un environnement financier moins accommodant ? Les BFR pourraient avoir de sérieux motifs de s'alourdir dans les mois à venir", conclut Thierry Millon d'Altares.
Lire en page 2 : la France championne d'Europe des petits retards
En Europe, les comportements de paiement s'améliorent très légèrement mais à 14,6 jours de retard en moyenne et 9,7% d'entreprises au-delà de trente jours, la situation demeure tendue, détaille l'étude.
La France championne d'Europe des petits retards
En France, la proportion d'entreprises réglant leurs factures à l'heure demeure sous la moyenne européenne. Ainsi, 36,5% des structures françaises payent leurs fournisseurs sans retard contre 41% en Europe. Cependant, les entreprises françaises se distinguent par la fréquence des petits retards de paiement.
Le pays est champion d'Europe des décalages de règlements de moins de 15 jours : 32,1% des sociétés françaises contre 27,1% en Europe. Mais c'est sans conteste, sur les grands retards que les tendances sont davantage à surveiller. 8% des structures françaises décalent le paiement des factures de plus de trente jours contre 6,2% au 2ème trimestre 2014.
Au Royaume-Uni, le retard moyen est de 18,5 jours. Mais depuis 2013, le pourcentage d'entreprises réglant leurs fournisseurs à l'heure n'a cessé de se réduire tombant de 30% à désormais 22,6%. A l'inverse les retards de 15 à 30 jours sont de plus en plus fréquents. 28,2% des entreprises britanniques décalaient leurs règlements de trois à quatre semaines début 2013, elles sont 37,2% désormais, un record en Europe dont la moyenne se situe à 22,3%. Sur le front des grands retards, la situation s'améliore mais encore 11,8% des entreprises britanniques reportent leurs règlements de plus de trente jours, un taux de deux points supérieur à la moyenne européenne.
Une Allemagne exemplaire avec une moyenne de 6,1 jours
L'Allemagne tire la performance européenne avec 73,1% d'entreprises ponctuelles. Et un délai de paiement moyen de 6,1 jours contre 5,8 début 2015. Si le pays reste vertueux, des signes de tensions apparaissent. La proportion d'entreprises retardant leurs paiements de 15 à 30 jours ne cesse de croître depuis début 2013. Il y a deux ans et demi, 5% des sociétés allemandes affichaient de tels retards, elles sont 7,3% désormais. Les grands retards sont beaucoup plus rares et concernent 1,1% des entreprises.
En Belgique, les comportements de paiement "se détendent légèrement" avec une moyenne de 12,2 jours.
Au contraire, les retards de paiement se tendent en Espagne (16,6 jours) où plus d'une entreprise sur dix (11,3%) reportent ses règlements d'au moins trente jours. S'il est encore haut, ce taux est toutefois jugé "en amélioration très sensible depuis cinq ans".
En Italie, les comportements de paiement des entreprises semblent s'améliorer ce trimestre au regard du précèdent. Toutefois la situation est encore loin d'être satisfaisante pour les fournisseurs car 16,3% des entreprises reportent leurs règlements de plus de trente jours. Et le Le retard moyen de règlement reste au-delà de 20 jours.
Enfin, le Portugal demeure l'élève le moins discipliné. Après 2 ans à afficher un retard moyen de plus de 30 jours, celui-ci demeure aujourd'hui très haut avec 29,6 jours.