Compliance - Quatre sous-traitants de Dior placés sous administration juridiciaire
Le tribunal de Milan a placé le 10 juin dernier une entreprise détenue par la filiale italienne du groupe Christian Dior sous administration judiciaire. Cette affaire met en lumière les pratiques abusives de certains sous-traitants, qui auraient permis à Dior d'obtenir des produits à des coûts dérisoires. Les autorités italiennes enquêtent sur quatre sous-traitants chinois employant des travailleurs dans des conditions déplorables.
Je m'abonneSelon le rapport financier annuel de Christian Dior au 31 décembre 2024 : « Les Codes de conduite Fournisseurs de Christian Dior et de LVMH matérialisent les exigences du Groupe à l'égard de ses partenaires (fournisseurs, prestataires de services, distributeurs, artisans, bailleurs, tous tiers en relation d'affaires avec une entité du Groupe) et leurs sous-traitants dans différents domaines : la responsabilité sociale et le respect des droits humains (interdiction du travail forcé et du travail des enfants, prohibition du travail illégal ou non déclaré, du harcèlement, des discriminations, dispositions relatives aux salaires, aux horaires, à la liberté syndicale, à l'hygiène et à la sécurité, à la protection des communautés locales.) Cependant, le tribunal de Milan a placé le 10 juin une entreprise détenue par la filiale italienne du groupe Christian Dior sous administration judiciaire.
Christian Dior (filiale du groupe LVMH), est la troisième entreprise de luxe à être placé sous enquête par le Tribunal de Milan après Alviero Martini Spa et Giorgio Armani Operations Spa pour caporalato. Pour rappel, le caporalato est une forme d'exploitation extrême de la main-d'oeuvre qui s'apparente à de l'esclavage. Cette pratique est encore largement répandue dans le secteur agricole en Italie, en Espagne ou encore au Maroc. Ces méthodes de production auraient permis au sous-traitant de facturer à Dior des prix jusqu'à 50 fois inférieur au prix de vente. Par exemple le modèle PO312YKY vendu 2 600 euros dans les magasins Dior leur était facturé 53 euros par le sous-traitant.
Toujours selon ces documents, le tribunal de Milan a ordonné la mise sous administration judicaire de Manufactures Dior SRL, appartenant entièrement à Christian Dior Italia SRL pour exploitation et travail illégal.
Quatre sous-traitants dans le viseur de la justice italienne
L'enquête vise quatre sous-traitants chinois qui emploient 32 travailleurs dans des usines proches de la ville de Milan. Selon un document consulté par Reuters, deux des employés étaient des travailleurs clandestins et sept ne détenaient pas les documents nécessaires pour travailler. Toujours selon Reuters, les employés dormaient sur leur lieu de travail afin d'avoir " une main-d'oeuvre disponible 24 heures sur 24 heures" Une cartographie de la consommation énergétique aurait montré une " production continue de jour comme de nuit et ce même durant les fêtes." L'équipement de sécurité aurait également été retiré afin de permettre une production plus rapide toujours selon ces documents.
Selon le média italien Il Manifesto, entre mars et avril 2024, la police italienne a contrôlé les quatre ateliers. Dans les atelier Pelletterie Elisabetta Yang et New Leather Srl, les ouvriers travaillaient dans des "conditions de travail telles qu'elles constituent une exploitation illégale du travail", selon le rapport d'enquête.
Contacté par Reuters et BFM Business, LVMH n'a pas souhaité s'exprimer. Les enquêtes envers les producteurs de luxe en Italie sont de plus en plus fréquentes. Selon les documents consultés par Reuters, les procureurs prétendent que la violation des règles n'était pas un cas isolé parmi les entreprises de mode ayant une capacité de production en Italie, mais systématique en raison de la nécessité d'atteindre des profits importants "Ce n'est pas quelque chose de sporadique qui concerne des lots de production individuels, mais une méthode de fabrication généralisée et consolidée", indique le document consulté par Reuters. Avec cette décision, le tribunal espère que Dior réformera ses méthodes de sous-traitance et assurera des conditions de travail dignes et légales à tous les niveaux de sa chaîne de production.