Réduction des coûts, décarbonation et digitalisation : les 3 défis achats 2024 décryptés par Deloitte, CKS Consulting et EY
Si ces dernières années, la pandémie et les enjeux géopolitiques (guerre en Ukraine, ...) ont recentré les achats sur leur stratégie de livraison et d'approvisionnement reléguant au second plan la réduction des coûts, l'année 2024 signe le retour en force de celle-ci. Sans oublier la réglementation sur la décarbonation et l'accélération de la digitalisation.
Je m'abonneLes priorités des directions achats pour 2024 sont nombreuses. « L'agenda des départements Achats est très dépendant de leurs capacités à lancer des chantiers de fond tout en gérant les urgences opérationnelles liées notamment au contexte actuel », explique Olivier Bonneau, associé responsable des activités Supply Chain, Achats et Manufacturing pour la France au sein du cabinet Deloitte. Cependant, la réduction des coûts, la décarbonation ou encore la digitalisation semblent s'imposer en 2024.
Une réduction des coûts expliquée par une baisse de la croissance
« Une des questions centrales en 2024 sera comment mieux maîtriser ses coûts en raison de la pression croissante sur les marges avec des ventes qui soit stagnent soit sont en baisse. Les coûts et donc les achats doivent suivre a minima la trajectoire des ventes pour maintenir un niveau acceptable de rentabilité », avance Philippe Dulou, associé EY Consulting sur les sujets achats, supplychain. Un avis partagé par Olivier Bonneau du cabinet Deloitte. « Dans ce contexte de polycrises que nous connaissons depuis la crise COVID, la guerre Ukraine Russie, l'inflation et les tensions géopolitiques, tous les secteurs industriels doivent contrôler leurs coûts sur l'ensemble de la chaîne de valeur pour maintenir leurs marges. ». Pour mieux maîtriser leurs coûts, les CPO disposent de plusieurs leviers tels que le sourcing avec les category managers. « Mais cela peut prendre prendre du temps. De façon complémentaire, des leviers plus disruptifs peuvent être enclenchés comme le stop buying, la negotiation factory, ou le long tail spend management, poursuit Philippe Dulou, associé chez EY Consulting.
Ainsi, en raison d'une croissance en berne et de marges plus faibles, les achats doivent réduire leurs coûts et par conséquent cela impacte les relations fournisseurs. En somme, « La pression concurrentielle et les relations fournisseurs vont donc se tendre. On voit de plus en plus des arbitrages volumes / prix pour conserver ou développer ses positions ; on revient progressivement à des relations fournisseurs plus traditionnelles », selon Philippe Dulou de chez EY.
Lire aussi : Les nouveaux contours de la travel policy
En route vers la décarbonation !
Avec les récentes obligations réglementaires (directive CSRD, ...), la décarbonation des achats et du scope 3 s'impose aux directions achats en 2024. Et si les « acheteurs savent décomposer le coût d'un bien ou d'un service, isoler la part du transport, celle des matières premières ou de la marge, ils doivent s'outiller et de se former sur le sujet pour le prendre la main », précise Arnaud Salomon, associé au sein du cabinet CKS Consulting. L'enjeu de la décarbonation repose sur le fait de pouvoir visualiser l'ensemble de sa chaîne de valeur à commencer par les fournisseurs. Or, le problème du manque de visibilité de la chaîne au niveau des fournisseurs de rangs 2 à N reste prégnant. « Pour vérifier que l'ensemble des fournisseurs ne mettent pas à mal des engagements RSE, il convient d'illuminer la chaîne de valeur jusqu'au rang N. Deloitte a notamment développé un outil baptisé « SupplyHorizon » pour identifier et visualiser les fournisseurs des fournisseurs sur une carte du monde et faire remonter les alertes opérationnelles et/ou risques géostratégiques afin d'établir des plans de gestion de risques. Une technologie renforcée par l'IA générative », précise Olivier Bonneau de Deloitte.
Les promesses de l'IA générative
La digitalisation reste un des chantiers prioritaires en 2024. Si les directions achats recourent davantage aux outils IA, leur marge de progression semble encore gigantesque. « Il existe déjà des use cases très convaincants en AI et la Gen AI appliqués aux achats, notamment sur la gestion intelligente des contrats et l'accélération du processus de sourcing. Nous prévoyons un déploiement plus large en 2024, en passant de la phase d'expérimentation à l'industrialisation », explique Philippe Dulou d'EY. Mais si l'émergence de nouvelles technologies offre des opportunités, elles présentent aussi des risques. « Quid de l'origine et de la qualité des sources d'information si usage d'une IA générative pour proposer les clauses d'un contrat ? Comment conduire le changement et former mes équipes ? », s'interroge Arnaud Salomon de CKS Consulting. Pour d'autres, l'IA générative permettrait également une meilleure rétention et attraction des talents dans les fonctions achats en « palliant le manque de ressources si elle est déployée sur les processus transactionnels et en aide à la décision sur des domaines à forte valeur ajoutée comme l'analyse du sourcing, des coûts et des scénarios alternatifs. Mais ceci ne pourra se faire qu'en repensant les modèles opérationnels des organisations et en mettant en place des plans de formation sur l'utilisation de ces nouvelles technologies dans les processus Achats. », conclut l'expert de chez Deloitte.