3 clés pour mieux manager ses équipes
Si les attentes en matière de management évoluent très rapidement, les managers sont parfois déboussolés. Lors du second Hackathon du Management, trois conférenciers ont identifiés des valeurs et des comportements à adopter par les managers pour mieux accompagner leurs équipes.
Je m'abonne1. Développer l'audace
Un manager a besoin non seulement d'avoir de l'audace, mais surtout d'être capable de la transmettre à ses équipes. "Dire que le travail suffit à la réussite est exagéré, estime Philippe Gabilliet, professeur de management et de psychologie à l'ESCP Europe. Dans un monde compétitif, il faut être capable de se créer des opportunités, mais aussi de saisir celles qui se présentent."
Le spécialiste en management définit d'ailleurs l'audace comme une valeur presque inverse au courage. Alors que ce dernier est la capacité à combattre l'adversité, la première consiste à délibérément se mettre dans une situation risquée, hors de sa zone de confort, en repoussant ses limites pour obtenir une situation plus plaisante, mais sans savoir exactement ce que l'on va gagner. Elle passe aussi par l'acceptation de l'échec : "l'audace, c'est oser se relever encore et toujours", explique Philippe Gabilliet, citant Clémenceau qui affirmait que "la seule façon d'échouer est d'abandonner avant d'avoir réussi".
Pour autant, elle ne doit pas devenir de la témérité. Philippe Gabilliet identifie deux limites à l'audace :
- elle ne doit pas faire encourir de risque vital aux autres ou à soi-même
- il ne faut pas manquer entièrement de maîtrise sur ce qu'il se passe
Avant de se lancer dans un projet qui sorte des sentiers battus et dont le résultat n'est pas assuré, mieux vaut faire le bilan de ses expériences acquises et des ressources à sa disposition. Le but ? Bien orienter son projet et savoir quel est l'objectif final recherché, tout en ayant conscience que même un échec apporte quelque chose. Il s'agit d'un premier pas pour la suite, d''une action qui apportera toujours plus de résultats qu'une position attentiste.
Il est possible de réaliser, et de faire réaliser à ses équipes, un test pour déterminer le quotient d'opportunités de chacun. Et savoir à quel point chacun est frileux ou proactif. S'il est possible de faire monter ses équipes d'un cran en termes de prise de risque, l'enseignant de l'ESCP Europe enjoint à "se méfier des injonctions" : un manager ne transformera pas une personne très prudente en champion de l'audace et de la prise de risque.
La première condition pour améliorer l'audace de son équipe est d'être soi-même audacieux. Il faut aussi permettre l'application de solutions temporaires, imparfaites et incomplètes mais fonctionnelles, et non pas attendre un rendu parfait dès le début, en l'assortissant d'un "devoir d'essayer". Enfin, manager comme équipe doivent toujours rester à l'affut d'opportunités inattendues.
2. Retenir l'attention
Comment bien faire travailler ses équipes si on ne leur porte pas attention ? Et surtout, si on n'arrive pas à capter leur attention ? Christian Fauré, manager chez Octo Technology, est revenu sur la nature même de l'attention : nous sommes attentif à un événement parce que nous mémorisons, et lions entre eux, les différents éléments qui le composent. Surtout, une personne est attentive parce qu'elle a des attentes vis-à-vis de ce qui est en train de se passer. Les managers doivent donc créer des attentes auprès de leurs équipes pour capter leur attention, en les faisant par exemple s'interroger sur le sens de leurs discours.
Par ailleurs, plusieurs chercheurs ont démontré que l'attention évoluait au fil des générations. Ainsi, les personnes qui ont grandi avec le numérique ont tendance à utiliser "l'hyper attention", qui nécessite une stimulation incessante, et pas "l'attention profonde", durant laquelle un objet peut être étudié en profondeur.
De nombreuses industries culturelles, dont celle du jeu vidéo, ont donc développé des oeuvres basées sur des sollicitations et des défis permanents, dans lesquelles l'attention du public est obtenue en trouvant l'équilibre entre l'anxiété de l'échec, qui décourage l'action, et l'ennui de défis trop faciles, qui ne sont pas assez stimulants. C'est en s'inspirant de ces schémas que de nombreuses pratiques, en management ou ailleurs, utilisent des techniques de ludification, ou gamification, pour intéresser les collaborateurs à des activités plutôt ennuyeuses au départ.
3. Considérer ses équipes
Pour susciter l'adhésion de ses équipes, la considération est une attitude absolument indispensable. Pourtant, très peu de managers prennent le temps d'y réfléchir. "Montrer son estime à quelqu'un et le traiter avec égards revient pourtant à respecter son ipséité, c'est-à-dire son identité propre", explique Isabelle Rey-Millet, directrice générale d'EthiKonsulting.
Or, explique-t-elle, le manque de considération est de plus en plus présent dans tous les aspects de notre vie. Dans une structure, elle peut aussi bien venir des individus que des habitudes et de la culture d'entreprise. En ne se sentant pas considérées, les équipes peuvent ressentir une sensation de malaise, d'incompréhension, d'injustice, voire de la colère et de la révolte. Ou, au contraire, de la soumission et de la résignation quand ils s'y habituent.
Comment montrer à ses équipes qu'on éprouve de la considération pour elles ? Pour la coach, c'est rarement une démonstration spectaculaire. Plus que les signaux forts, ce sont les signaux faibles qui manifestent la considération : détails, pensées immédiates, gestes instinctifs, regards... Surtout, elle se démontre indépendamment du niveau hiérarchique, quel que soit son interlocuteur.
Il est possible de travailler sur certains points pour montrer plus de considération à ses équipes. Tout d'abord, gérer son ego et celui des autres : l'important est de trouver l'équilibre entre une approche individualiste, dans laquelle chacun puisse se développer, et altruiste, où chacun pense aux autres et à l'équipe.
Le management doit ensuite avoir conscience de son attitude, être présent physiquement et intellectuellement pour les autres, chercher à illuminer leurs journées et avoir une approche ludique des choses.
Il doit également faire comprendre à tous les membres d'une équipe que ce sont en partie les actes des autres qui déterminent qui nous sommes. D'où la nécessité de leur montrer de la considération pour qu'ils nous en montrent également.
Enfin, les managers doivent développer la confiance de leur équipeen eux, notamment en se préoccupant d'eux et en tenant leurs engagements. "Plus le monde est complexe, plus les évolutions technologiques sont fortes, plus le lien humain devient important. Et les êtres humains doivent être forts ensemble", conclut Isabelle Rey-Millet, directrice générale d'EthiKonsulting.