Recours au secteur adapté: l'acheteur est agitateur de motivations
Six responsables achat nous parlent de leur façon de promouvoir le recours au secteur du travail adapté et protégé au sein de leurs entreprise, dans le cadre d'un nouveau baromètre sur les "Leviers de motivation des prescripteurs vers le secteur du travail adapté et protégé" réalisé par Handiréseau.
Je m'abonneIl est bien loin le temps où la direction générale chérissait l'acheteur dans son rôle de cost killer. Notre acheteur nouveau devient vecteur des valeurs de l'entreprise qui se doit être plus que parfaite sinon rien. Chacun veut se hisser sur le podium du Prix de la Vertu, c'est obsessionnel ; les rapports RSE sont parfois les albums de la surenchère aux bonnes actions. Le CODIR, quand à lui, se cherche... et il faut le comprendre. Il est pris entre le développement de sa marge et l'enclume de la bouillie grumeleuse d'une RSE qui flotte dans l'air du temps. Entre choisir et tout prendre, il est facile de se perdre.
Heureusement pour lui, l'acheteur devient, par le biais du secteur du travail protégé et adapté, un vecteur stratégique du projet insertion de l'entreprise. Le CODIR doit s'en saisir.
Un vecteur inattendu de la stratégie
Pour mieux comprendre les "Leviers de motivation des prescripteurs vers le secteur du travail adapté et protégé (STPA)", Handiréseau, en partenariat avec Décision Achats, a réalisé un baromètre qui montre que l'acheteur doit redoubler d'efforts et d'ingéniosité pour parvenir à ses fins ! Shiva de la performance, mobilisateur et poil à gratter du prescripteur, il doit convaincre et engager. Transmetteur de bonnes pratiques, celles qui font briller les yeux. Il s'acharne à susciter la convoitise du pari gagné. Il en attend cependant les moyens et les outils, ce qui n'est pas encore gagné.
Florilège de témoignages:
Des acteurs du baromètre témoignent
Témoignage de Dominique Etourneau, directeur des achats du Groupe ADP: "Certains de nos prescripteurs sont nos meilleurs ambassadeurs ; une de nos belles réussites avec le STPA a été réalisée dans un contexte à part, au sein d'un environnement d'aérogare, complexe et technique. Un prescripteur qui ne connaissait pas ce secteur a souhaité relever le défi ; résultat : 150 K€ d'achats en un an par le biais d'un marché à bons de commande, sur des prestations liées à la peinture et aux petits travaux de bâtiment. L'implication de toutes les parties prenantes a été déterminante dans notre succès. Il y a eu beaucoup d'échanges et de communication tout au long de la démarche : de l'expression du besoin à l'exécution des prestations. L'ouverture d'esprit et le dialogue entre l'équipe achats, les fournisseurs et le prescripteur, la volonté d'adaptation aux contraintes et aux exigences réciproques, toute cette dynamique a fait fonctionner le challenge. Ce qui n'était pas gagné car le monde aéroportuaire est excessivement contraignant dans son organisation sécuritaire".
Chez Vinci Energies, on délègue très largement. "Notre processus organisationnel est un peu singulier. Toutes nos entreprises doivent présenter chaque année un projet stratégique partagé et ce, sur trois ans. On travaille ensemble sur des objectifs financiers, d'exploitation pure, sur la sécurité et un volet RH. Dans ce volet RH, l'aspect lié à l'insertion est très important. Nous incitons chaque entreprise à se fixer notamment des objectifs sur la sous-traitance avec le STPA. Un des principaux leviers de motivation chez nous, est lié à la responsabilisation des acteurs de terrain. On s'appuie sur l'autonomie de chacun de nos chefs d'entreprises ; cette organisation fait partie de notre ADN et ça marche", s'enthousiasme François Guilbaud, directeur des richesses humaines pour l'Ile-de-France.
Florence Déchelette, responsable insertion et marque employeur chez Generali France nous confie que "ce sont bien les prescripteurs qui ont la main. Le décideur achats qui est partant pour développer le STPA n'est pas le payeur et les économies générées par ces achats ESAT/EA ne sont pas répercutées vers chaque service. La remontée des Unités Bénéficiaires serait un véritable booster de motivation pour nos services prescripteurs".
Chez Allianz France, la direction des achats s'appuie sur la Mission handicap. "C'est une collaboration de chaque jour. Nous travaillons ensemble sur le sourcing et les meilleurs process de collaborations à mettre en oeuvre avec le STPA. Nous sommes très complémentaires dans notre approche ; c'est cette complémentarité qui doit rassurer nos prescripteurs", expliquent Jean-Luc Durand, référent achats responsables et Juliette Phuong, de la mission handicap.
Pour Vincent Leroux-Lefebvre, acheteur et référent RSE chez SAGE, "il faut combattre beaucoup d'apriori chez les prescripteurs". "L'acheteur doit rester humble et force de proposition. Nous sommes là pour faciliter et non pour contraindre".
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Par Dominique du Paty de Clam, présidente fondatrice de Handiréseau