Portrait du leader 2.0
Comment l'essor du numérique fait-il évoluer le leadership ? C'était l'objet d'un colloque organisé début octobre à Paris par l'Institut Mines-Telecom, qui regroupe des écoles d'ingénieur et de management. Google et d'autres entreprises ont apporté leur témoignage. Morceaux choisis.
Je m'abonneMeneur d'hommes, extraverti, visionnaire, parfois autoritaire, ou encore isolé... Voilà comment est ordinairement décrit le leader. Mais ça... c'était avant. Avant l'essor du numérique et des réseaux sociaux qui obligent les tenants du leadership en entreprise à se repositionner. " Le numérique change le rapport à l'information. La création de valeur réside dans la circulation de cette information ", observe Carine Dartiguepeyrou, directrice du programme " Transformation numérique de l'entreprise " de la Fondation Telecom attachée à l'Institut. Autrement dit, pas (ou plus) dans le contrôle de ce qui est dit. Le numérique change, en effet, les lieux de pouvoir, tout en favorisant les conditions de l'émergence de contre-pouvoirs et même en faisant évoluer le sens de cette notion. De fait, le leader d'aujourd'hui n'est plus celui d'hier...
Le leader 2.0 communique
L'essor du numérique et des réseaux sociaux démultiplie l'importance de la communication au sein de l'entreprise. Les leaders n'échappent à la règle. " Le leadership est un art, pas un programme informatique. Le numérique ne change pas les leaders mais change leur capacité à communiquer ", explique Guillaume Peters, responsable expérience client chez SFR. Pour autant, il ne suffit pas d'envoyer des mails pour être compris et entendu de ses collaborateurs. Les nouveaux canaux digitaux ne remplaceront jamais le terrain et les échanges de vive voix. " Aujourd'hui le leader doit s'assurer que le message a été bien compris et cela passe par une attention accrue à l'autre ", souligne Carine Dartiguepeyrou (Fondation Telecom). Même si pour lui cela ne va pas sans risque : exposition à la critique, gestion de la pression et de l'important VS l'urgent, obligation de réactivité et de transparence, préservation de la confidentialité sur certains projets...
Le leader 2.0 orchestre l'intelligence collective
A l'ère du numérique, le leader n'est plus tout seul dans sa tour d'ivoire, à exercer un pouvoir top/down. Le pouvoir est plus dilué et le leader apprend à s'appuyer sur l'ensemble des personnes de l'entreprise pour avancer. Il favorise les initiatives collectives, l'expérimentation. De fait, les anciennes logiques hiérarchiques s'en trouvent complètement bouleversées. Les sociétés fonctionnent davantage en mode collaboratif et en mode projet. Une logique mal accordée avec le système d'éducation à l'occidentale... et qui oblige par ailleurs les entreprises, françaises notamment, à repenser leur rapport à l'échec, généralement très mal accepté. " Le plus grave n'est pas de faire des erreurs, c'est qu'une personne fasse deux fois la même erreur ", affirme Jean-Michel Orozco, président de Cassidian Security, spécialisé en cybersécurité (groupe EADS).
Par ailleurs, cette responsabilisation des collaborateurs va de pair avec une capacité à accorder de l'autonomie à ses équipes et à développer leur créativité pour favoriser l'innovation. Ainsi, au sein de Google, les salariés ont du temps pour réfléchir à des projets qui leur tiennent à coeur, en lien avec leurs missions. " Cette initiative est née d'un constat : les collaborateurs travaillaient déjà comme cela en interne. Nous avons alors mis en place un système de compte rendus pour valider l'efficacité de cette pratique et les résultats obtenus ", témoigne Dorothée Burkel, DRH chez Google pour la zone SEEMEA (Southern Eastern Europe Middle East Africa).