Relations donneurs d'ordre/PME, l'union fait le (bon) business
Des notes pour rassurer ?
Si, pour les petites entreprises, émerger de la masse n'est pas aisé, inspirer confiance ne l'est pas plus. Les risques opérationnels et de défaillance peuvent freiner les ardeurs des grands groupes qui tentent parfois de les contrecarrer en instaurant des critères de sélection drastiques. "Ces règles tendent à s'assouplir mais le changement de mentalité est long et lent", déplore Marie-Christine Rieul (IE-Club). "Il existe toujours un risque à collaborer avec un nouveau fournisseur, reconnaît Jean-Louis Coudrillier, vice president group procurement d'Air Liquide. Nous avons élaboré une matrice de risques pour aider les acheteurs à évaluer le niveau de risque fournisseurs."
Chaque acheteur dispose par ailleurs d'un questionnaire pour évaluer ses futurs partenaires et EcoVadis, agence indépendante de notation extra-financière, audite leurs fournisseurs stratégiques. À cet égard, les PME peuvent, dans le cadre d'une démarche volontaire, faire évaluer leurs pratiques par cet organisme, pouvant ainsi montrer patte blanche.
D'autres entreprises se positionnent comme des tiers de confiance. À l'image d'Early Metrics, agence de notation de start-up et de PME innovantes. À ce jour, la start-up a référencé plus d'un millier d'entreprises. Chacune d'entre elles est notée selon 50 critères extra-financiers. Les petites entreprises peuvent demander à être évaluées gratuitement. Seules les grandes entreprises payent pour accéder à la base de données. IE-Club est aussi sur le créneau. D'ici l'été, il va lancer l'appli Innovadvisor, le "TripAdvisor des start-up". Les entreprises référencées seront notées par leurs clients sur leur capacité à travailler avec les autres. Le service sera gratuit pour les entreprises innovantes et payant pour celles qui consultent les appréciations.
Mais le tiers qui rassure peut tout simplement être un client. "Les références, c'est bien, encore faut-il pouvoir s'en servir ! s'exclame Jean-Noël de Galzain (Wallix). De manière tout à fait incompréhensible, certains grands comptes refusent d'être cités."
Des marges de progression...
La recommandation est l'un des leviers activés par la PME innovante Ardans, "le bouche-à-oreille naturel étant efficace mais lent", selon son dirigeant, Alain Berger. C'est pourquoi il n'hésite pas, quand c'est possible, à mettre en relation ses clients avec ses prospects.
La mise en relation, c'est notamment l'un des principaux axes sur lesquels les grands comptes peuvent s'améliorer, selon le baromètre Pacte PME 2016. Air Liquide mise sur une base de données interne où sont référencés ses fournisseurs innovants : un outil de recommandation des acheteurs pour tous les acheteurs français du groupe. Air Liquide est d'ailleurs en train de mondialiser cette base de données. Et il n'hésite pas non plus à parrainer certaines petites entreprises afin qu'elles ne restent pas dans une situation de dépendance économique.
"Malgré toutes les marques de confiance que l'on peut apporter, on peut parfois regretter le manque d'ouverture de certains grands groupes pour intégrer des PME dans leur panel de fournisseurs, déplore Josselin Noire (La Conciergerie Solidaire). Ils ne prennent pas forcément le temps d'imaginer ou d'examiner des solutions créatives, comme les groupements d'entreprises qui pourtant sont une réponse pertinente." D'autant que l'allotissement, souvent présenté comme un bon moyen de favoriser l'accès des PME aux marchés, n'est entré dans les moeurs que des entreprises publiques (87 % selon le Baromètre des achats responsables 2017, contre 17 % dans le secteur privé).
Société Générale fait ainsi figure d'exception en pratiquant régulièrement l'allotissement dans ses appels d'offres et en encourageant le groupement d'entreprises. Pour l'entretien des enseignes de son réseau, la banque a incité des petites entreprises locales à se positionner via un groupement temporaire d'activité. Elles ont ainsi remporté l'appel d'offres mais également d'autres marchés. "C'est une solution compliquée sur le plan contractuel, mais c'est un passage obligé si l'on souhaite faire travailler des PME locales alors que nos marchés sont nationaux, témoigne Françoise Guillaume, directrice des achats du groupe Société Générale, qui a pour ambition d'augmenter de 20 % ses volumes d'achats auprès des PME d'ici 2019, les portant à 38 % du volume total. C'est un engagement fort mais surtout très challengeant pour nos acheteurs, qui doivent faire évoluer leurs pratiques."
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