Grande distribution : la fin des négociations commerciales annuelles pour les produits alimentaires
L'amendement Moreau prévoit de changer les règles du jeu en matière de négociations commerciales. Bonne ou mauvaise nouvelle?
Je m'abonneC'en est peut-être fini des négociations commerciales annuelles en tous cas en ce qui concerne les produits alimentaires. En effet, Bercy semble prêt à changer les règles entre acheteurs et fournisseurs dans le secteur de la grande distribution. Un amendement porté par le député LREM Jean-Baptiste Moreau propose d'abolir les négociations commerciales annuelles pour tous les produits agricoles et alimentaires soit plus de trois-quart des produits de grande consommation. L'objectif? Sortir du carcan rigide et conflictuel des contrats annuels et éviter les situations de blocage en fin de négociation et les déréférencements de produits.
Depuis 2008 et la Loi de modernisation de l'économie (LME) les négociations de la grande distribution étaient encadrées et tenues de se dérouler entre octobre et mars. Par cet amendement le député LREM propose d'en finir avec cette période de tensions "à l'origine de conséquences économiques déplorables pour l'ensemble de la chaîne alimentaire" et entend amener au compromis des acteurs qui chaque année s'accusent de tous les maux. Certes, mais quel sera le nouveau cadre? Pour le moment les acteurs sont dans le flou. Se dirige-t-on vers des négociations pluriannuelles ou au fil de l'eau tout au long de l'année référence par référence? Cela va-t-il permettre de réellement sortir de l'affrontement pour aller vers la coopération ou juste déstabiliser le secteur. D'ici l'examen final prévu le 22 mai prochain, enseignes et industriels pourront être force de proposition pour établir un nouveau mode de fonctionnement plus sain.
Ainsi, l'Ania qui fédère les 15 000 industriels de l'alimentaire en France y voit un "signal politique fort" et la FNSEA, principal syndicat agricole, semble voir d'un bon oeil ce changement de règles. Quant à la Feef qui représente les fournisseurs PME de la distribution, elle estime que la mesure va dans le bon sens mais doit être associée à la mise en place de contrats pluriannuels. Enfin, l'Ilec, qui représente les géant de l'agroalimentaire, fait preuve de circonspection.
Pour le moment les acteurs semblent partagés entre l'envie de voir dans cet amendement une opportunité de revoir un modèle et d'en finir avec la guerre des prix, et un sentiment d'appréhension lié à la perte d'un cadre malgré tout protecteur. Richard Panquiault, représentant de l'Ilec confiait au Figaro sa sensation "d'un grand saut dans le vide". Et d'ajouter : "enlever la date buttoir ne changera rien au fait que l'industriel a perdu la main sur son tarif." Sur ce point la Feef semble le rejoindre puisque dans un communiqué elle estime nécessaire de "rendre obligatoire l'application du tarif commercial du fournisseur de produits agricoles ou transformés auprès des distributeurs", rappelant que seules les conditions de développement des ventes sont négociables.