Gestion de flotte : comment faire face à la flambée des coûts d'énergie ?
Entre l'explosion du prix du carburant et la hausse des coûts de gestion, dûe l'inflation subie chez les prestataires, les fleet managers doivent trouver de nouvelles sources d'optimisation des dépenses.
Je m'abonneLe prix de revient kilométrique moyen (ou PRK) moyen des véhicules particuliers affiche une hausse de 12,2 % en 2022 par rapport à 2021 d'après l'édition 2023 du TCO Scope d'Arval Mobility Observatory. Soit le plus haut niveau jamais atteint par cet indicateur depuis sa création en 2012. Après des années de baisse, l'inflation impacte en cascade le carburant, les tarifs des véhicules neufs, le prix des pièces détachées et celui des réparations, mais aussi des primes d'assurance... « Le sujet du PRK qui était passé au second plan après les questions environnementales et les services aux collaborateurs, redevient prioritaire avec une augmentation des dépenses de 20 à 30 % cette année », analyse Laurent Hauducoeur, président d'aFleet, association qui regroupe les gestionnaires de flottes indépendants. Les gestionnaires de flotte doivent désormais identifier d'autres leviers d'économies.
Trois types d'économies restent possibles
Parmi les gisements d'économies potentielles, les renouvellements de véhicules sont l'occasion privilégiée de reconsidérer l'adéquation entre les types de véhicules et les usages, les durées et les kilométrages, le choix de l'énergie sans oublier la remise en cause des fournisseurs, jusqu'aux loueurs longue durée. « Statistiquement, la mise en concurrence des loueurs permet de faire 5 à 7 % d'économie sur les loyers », estime Laurent Hauducoeur. Se pencher sur les contrats existants permet également d'identifier des surcoûts liés à des dérives de kilométrage, des consommations de carburant ou encore des factures d'entretien. Les entreprises peuvent s'interroger en amont sur certains coûts évitables. Par exemple en travaillant sur la grille de fluidité des contrats de LLD afin que des écarts par rapport au couple durée-kilométrage prévu dans les contrats ne soient pas facturés au prix fort. Même approche en ce qui concerne les frais de restitution des véhicules en fin de contrat.
Étayer le diagnostic
Pour trancher, les entreprises ont besoin d'outils tels que la télématique qui aide à cerner les dérives tout en permettant de récupérer des marges de manoeuvre. Avec une solution télématique complète, les gains d'exploitation avoisineraient 15 % selon Olivier Picard, directeur général d'Océan, spécialiste de la télématique au sein d'Orange Business Services, « à iso-technologies, mais beaucoup plus en cas de passage au véhicule électrique ». Toujours selon lui, « On pense toujours à la consommation au coût de l'essence et du gasoil, mais il y a d'autres leviers ». Ainsi, une mauvaise affectation d'un collaborateur à une mission, un entretien défaillant ou encore une utilisation abusive du véhicule à des fins privées, sont autant de dépenses superflues à débusquer. Depuis quelques temps, Océan constate un triplement des demandes de ses clients pour accompagner la mise en oeuvre de l'écoconduite et de l'électrification des parcs ainsi qu'un retour en force de l'autopartage.
Miser sur l'exploitation des données
Une exploitation intelligente des données motive également le choix de logiciels de gestion de flotte. Chez Gac Technology, la solution, Gac Car Fleet, s'enrichit régulièrement de fonctionnalités. Ainsi « Hub Gac » désigne une architecture capable de collecter une mine d'informations provenant des multiples fournisseurs sous contrat avec une entreprise. Le logiciel qualifie ces données avant d'envoyer au gestionnaire des rapports d'analyse qu'il peut paramétrer. Il déclenche également des alertes en cas d'anomalie détectée. Récemment, cet éditeur a développé des modules destinés à affiner le pilotage des dépenses. « Notre module de calcul du TCO prédictif permet d'estimer le coût d'un véhicule avant de le commander », évoque Marion Achour, responsable marketing chez Gac Technology. A partir du catalogue établi par une entreprise, le logiciel compare les coûts entre les différents loueurs. « Ce module permet également de comparer les véhicules thermiques avec les hybrides rechargeables par exemple et d'en maîtriser les coûts avant même de les intégrer dans la flotte. Certains clients peuvent ainsi choisir des modèles en fonction d'une limite de TCO mensuel », ajoute la responsable. Un autre module de commande des véhicules compare les offres des loueurs pour un même modèle mais également les délais de livraison affichés. Une donnée clé dans la mesure où ces délais se sont allongés de 3 à 7 mois depuis 2019. « Par ailleurs, un indicateur fait remonter les véhicules dont les contrats arriveront à échéance dans six mois par exemple, pour anticiper », ajoute Marion Achour. Ainsi Gac Car Fleet signale au gestionnaire les contrats de LLD à optimiser en fonction du roulage réellement constaté.
Absorber la hausse des taux d'intérêt
Outre l'inflation, les gestionnaires de flottes subissent une remontée des taux d'intérêt qui impacte les contrats de LLD. Un coût « caché » puisqu'il est une des composantes du loyer souvent peu visible car certains contrats se contentent d'afficher un montant de loyer global. Pour en connaître le détail, Holson, conseil en performance et gestionnaire de flotte, a conçu un simulateur d'analyse de l'augmentation des loyers. En se connectant sur holson.fr, tout gestionnaire de flotte peut comprendre pourquoi le coût de la LLD augmente. « En ce moment, nous assistons à une explosion des coûts or celui du financement des véhicules a pris 50 % contre 15 à 30 % pour le carburant », tranche Philippe Ambon, directeur associé de Holson. Comme le financement représente un tiers du loyer, son augmentation suffit à expliquer que les montants réglés aux loueurs s'envolent. Et ce n'est qu'un début car les flottes se renouvellent par quart ou par tiers chaque année. En 2023, les véhicules remplacés seront ceux mis à la route en 2018 ou 2019, à une époque où les taux d'intérêt étaient encore de 2 à 3 %. « Comme il s'agit des taux, la marge de négociation est très faible » , avertit ce expert. Seule parade pour les gestionnaires : allonger la période de détention. « Les hausses de loyer seront lissées car la décote de la valeur des véhicules est forte dans les douze premiers mois », glisse Philippe Ambon qui préconise de simuler des financements jusqu'à 72 mois.
Faire réparer moins cher
L'inflation touche aussi les réseaux de réparation automobile avec, de surcroît, une volatilité des prix. « Dans les 45 jours suivant un chiffrage, les prix peuvent avoir augmenté de 20 %. Même avec de la pièce adaptable, ce n'est pas maîtrisé », témoigne Franck Keller, président et fondateur d'Autogriff. Ce réseau de carrosseries en ligne privilégie la réparation, autrement dit, de la main-d'oeuvre plutôt que de l'achat de pièces. Un autre moyen de réduire les coûts de réparation consiste à utiliser de la pièce de remploi. « Plus on monte des pièces neuves, plus on est exposé à l'inflation car le prix des pièces a augmenté de 9 à 10 % en un an, contre 2 à 3 % pour la main-d'oeuvre », constate Benoît Lamarsaude, directeur pilotage & performances de BCA Conseil. Autant de pistes qui conduisent les fleet managers à penser davantage RSE et croissance durable.
Face à l'explosion des tarifs de l'électricité, faut-il revenir aux motorisations thermiques ?
C'est certain, l'époque de la recharge des batteries pour quelques euros est révolue mais les tarifs varient selon de multiples paramètres. D'abord, les TPE PME et les collectivités sont éligibles au bouclier tarifaire et à l'amortisseur électrique mis en place par l'État. Pas les grandes (sauf exceptions). Ensuite, si l'on considère l'offre d'EDF entreprises, le kWh de base débute à 0,3676 €. Prenons l'exemple d'une batterie de 60 kWh, sa recharge au bureau coûtera 22 €. Malgré la baisse récente du gasoil, un même trajet en diesel coûtera environ 30 €. Il est possible de rendre la recharge électrique encore plus compétitive si elle a lieu au domicile du collaborateur car celui-ci bénéficie du bouclier tarifaire. Au tarif réglementé, le prix du kWh descend à 0,2228 €, voire 0,1615 en rechargeant la nuit, aux heures creuses. En revanche, gare à la recharge en itinérance. Les tarifs varient selon les lieux et les opérateurs mais ils sont bien supérieurs. Dans le Grand Lyon, par exemple, l'opérateur Izivia facture une recharge en 50 kW au prix de 0,55 €/kWh (abaissable à 0,35 € avec un abonnement), plus une majoration de 0,20 cts/mn au-delà de 45 mn. Dans ce cas, une recharge complète (ce qui reste évidemment une hypothèse théorique) coûterait plus de 30 €, soit légèrement plus qu'une prise de gasoil pour couvrir la même distance.