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"Achetons", cela ne rime pas avec "innovons"...pas encore !

L'Observatoire des Achats et de l'Innovation, dirigé par le Dr. HDR Romaric Servajean-Hilst de KEDGE Business School, livre en ce début d'année une cinquième analyse des pratiques et de l'implication des services achats dans l'innovation. Cette étude annuelle met en lumière les tendances et les freins qui limitent encore la contribution des achats à la création de valeur au sein des organisations.

Publié par Geoffroy Framery le - mis à jour à
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'Achetons', cela ne rime pas avec 'innovons'...pas encore !

La ligne de mire achats n'a pas l'innovation au centre de son viseur. C'est du moins le principal enseignement du dernier baromètre réalisé par Kedge Business School, sous la houlette du Directeur du MAI Executive Education, Romaric Servajean-Hilst. Les départements achats restent majoritairement concentrés sur l'optimisation financière, avec 77% d'entre eux qui privilégient la réduction des coûts et la limitation des hausses tarifaires. La gestion des relations fournisseurs arrive en seconde position avec 57% des services qui la placent parmi leurs priorités, suivie du respect des règlements et normes, qui atteint 47%. La continuité des approvisionnements demeure une préoccupation majeure pour 46% des services achats, mais l'innovation peine encore à s'imposer comme un axe stratégique. Rien de vraiment neuf sous le soleil. Mais qu'en est-il réellement du rapport contrarié entre les achats et l'innovation. Le directeur académique et chercheur met en perspective: « Ce que j'ai trouvé intéressant cette année, c'est le côté réducteur des priorités : on a énormément focalisé de nouveau sur la réduction des coûts. Par contre, toutes les autres priorités se sont diluées, ce qui fait que l'innovation s'est retrouvée mécaniquement en arrière. »

Des blocages mentaux et environnementaux plus qu'organisationnels ?

Lorsqu'ils participent aux projets innovants, ils interviennent dès la phase initiale dans 62% des cas, un chiffre stable depuis cinq ans. Pourtant, seuls 20% à 25% des organisations disposent d'une fonction achats spécifiquement dédiée à l'innovation. Cette implication varie peu selon le secteur d'activité, qu'il s'agisse d'achats directs ou indirects. Plusieurs freins majeurs entravent l'innovation au sein des services achats. Sans surprise, le manque de ressources humaines et de temps est le principal obstacle identifié. Autre frein, celui des biais cognitifs métiers. Romaric Servajean-Hilst précise: "Un modèle mental traditionnel, où le rôle des achats est perçu avant tout sous l'angle de la gestion financière plutôt que comme un moteur d'innovation, contribue également à ce blocage". Last but not least, le climat de travail au sein des directions achats n'encourage pas toujours la prise d'initiative et le risque.

Les IA sauvages... à la mode dans les achats ?

L'étude 2024 met en évidence l'adoption croissante des intelligences artificielles génératives dans les achats. Aujourd'hui, 53% des acheteurs déclarent les utiliser, qu'elles soient fournies par leur entreprise (33%) ou non autorisées (32%). Ces technologies sont principalement employées pour rechercher des informations internes, structurer des données et rédiger des documents. Cependant, les acheteurs ne perçoivent pas encore l'IA comme un véritable levier d'innovation, mais plutôt comme un outil facilitateur pour leurs tâches quotidiennes. "Les professionnels qui utilisent une IA non autorisée sont 32 % et finalement pour des usages somme toute limités. L'innovation dans les achats demande une gestion rigoureuse des processus, des risques et des performances. Il y a toujours une difficulté, c'est que très souvent, une partie des IA génératives sont utilisées pour faire le métier sans avoir un regard critique sur ce qu'est et ce que fait vraiment le métier », regrette Romaric Servajean-Hilst.

Créer un GPT et le voir décider ... C'est possible !

Face à ces constats, plusieurs axes d'amélioration émergent pour renforcer l'innovation dans les achats. Adopter une posture plus proactive, en développant la collaboration avec les autres départements et les fournisseurs, apparaît comme une nécessité. Renforcer le leadership des achats sur le terrain permettrait également d'identifier de nouvelles opportunités innovantes. L'obtention de ressources dédiées, à travers la structuration d'unités spécifiques ou la réallocation de moyens existants, favoriserait in fine une meilleure intégration de l'innovation dans la fonction achats. Enfin, un accompagnement plus poussé des usages de l'IA générative permettrait d'en maximiser les bénéfices tout en minimisant les risques associés. Romaric Servajean-Hilst illustre sur un cas d'usage d'IA prometteur: « Avec un schéma ou un arbre de décision, tu peux demander à un GPT spécialisé de simuler une prise de décision en impliquant plusieurs parties prenantes comme un acheteur, un financier et un directeur général. Mais il faut ici comprendre parfaitement le processus achat et bâtir une base de connaissances suffisamment robuste pour que le GPT puisse nous challenger dans nos idées et nos projets ».

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