Management de transition dans les achats : une mission doublement gagnante
Le management de transition progresse dans l'Hexagone et séduit particulièrement les achats pour des missions allant de la mise en place d'un ERP à un projet plus global de digitalisation du métier. Quelles sont les qualités d'un bon manager achats de transition? Et comment faire de ce type de contrat un partenariat gagnant-gagnant avec l'entreprise?
Je m'abonneLe management de transition n'est plus réservé à la gestion de crise comme cela a pu être le cas au début des années 2000. Le baromètre 2023 du Management de transition en France réalisé par Adequancy, plateforme spécialisée dans le management de transition nous apprend qu'en 2020, les missions de redressement ou de restructuration représentaient 21 % du volume total des missions. Et si 61 % des missions concernaient des transformations ou du management relais, 23 % étaient liées au développement de la croissance de l'entreprise.
Une forte demande dans les achats
Dans le domaine des achats, l'intérêt que suscite le manager de transition est en constante augmentation. « Cela a explosé il y a 7 ans, exceptés peut-être dans les secteurs à cycle lent où la demande se fait moins prégnante », synthétise Olivier Wajnsztok, directeur associé d'AgileBuyer. Il est vrai que ce format répond parfaitement au besoin de flexibilité attendu par le marché du travail. « Les entreprises peuvent bénéficier d'une main-d'oeuvre hautement qualifiée, dotée de compétences managériale avérées et disponible en une semaine », souligne Olivier Wajnsztok. De leur côté, les candidats sont résolument plus nombreux à tenter l'expérience au cours de leur carrière et à la renouveler. Ce type de mission peut aussi déboucher sur un CDI, « dans un cas sur cinq », estime Anthony Baron, dirigeant d'Adequancy. D'après le baromètre précédemment évoqué, le profil-type du candidat serait un homme (78%), ayant en moyenne 54 ans avec près de 28 ans d'expérience. Depuis 2016, Stéphane Ragoucy cumule ainsi les missions de manager de transition, après avoir acquis une solide expérience de 27 ans dans les achats industriels. Aujourd'hui, il n'envisage pas de retrouver un CDI, préférant pour le moment ce mode de travail. « C'est un rythme, une qualité et une variété qui me correspond pleinement. Cela évite de s'enfermer dans une routine professionnelle, nous frottant à des univers et des ambiances de travail différents. C'est très valorisant d'apporter sa pierre à l'édifice. Toutefois, il faut aimer être acteur du changement, savoir se remettre en question et être rapidement opérationnel ».
Une myriade de missions
Le manager de transition vient souvent pallier un manque d'effectif ou de compétences pour gérer un projet ou une équipe sur une durée de mission de neuf à douze mois, lI peut également être sollicité pour remplacer un départ soudain, maintenir une activité, gérer la structuration des dépenses, impulser un changement durable, comme la digitalisation d'un process achats par exemple. « Depuis la crise du Covid-19, nous recevons de nombreuses demandes ayant trait au sourcing, les entreprises ayant compris la nécessité de réduire leurs dépendances vis-à-vis des fournisseurs asiatiques notamment. Elles demandent aussi de plus en plus fréquemment une mise sous contrôle des prix de l'énergie pour mieux maitriser le budget énergétique », constate Anthony Baron. Stéphane Ragoucy a déjà accompli six missions transitoires pour le compte d'AgileBuyer dans les secteurs du nucléaire, de la pharmacie, de la chimie fine et de l'industrie du luxe, la plus courte avoisinant les trois mois, la plus longue dépassant les dix-huit mois. « J'ai par exemple redémarré la dynamique des achats dans une entreprise en difficulté rachetée par un fonds de pension. J'ai aussi mené un projet dans l'industrie de la santé. J'ai été durant dix-huit mois prestataire Contract Manager pour l'industrie nucléaire, organisant le suivi, les renégociations et les clôtures des contrats dans le domaine des installations pour accompagner les équipes terrain et m'assurer que les prestataires mettaient à leur disposition les ressources nécessaires. Depuis un an, je réalise un projet de construction d'une ligne de production au sein d'une unité existante dans l'industrie pharmaceutique, gérant la totalité des achats industriels ». Dans la pratique, ce type de mission démarre par un état des lieux. Puis, par la définition d'objectifs concrets et précis.
Un collaborateur pas tout à fait comme les autres ?
En amont, le manager de transition doit être en mesure de récolter dans un court laps de temps des informations quantitatives et qualitatives sur l'entreprise. « Dans un cas sur deux, il est difficile de les obtenir car elles peuvent être diffuses ou complexes à agréger. D'où la nécessité d'être en capacité de prendre des décisions en ayant connaissance que d'une partie des données », avance Olivier Wajnsztok. Il doit faire preuve d'agilité et d'adaptabilité, mettant à profit son expérience et son regard neuf sur l'entreprise. La phase d'intégration est une étape décisive qui conditionne la réussite du projet. « Il faut que la greffe prenne avec les équipes, surtout si des transformations de process sont à prévoir », met en avant Anthony Baron. La légitimité du candidat joue en sa faveur dans son acceptabilité interne. « Les managers de transitions bénéficient d'un à-priori favorable et sont également bien moins exposés que les salariés de l'entreprise aux jeux de pouvoir, comme ils ne sont que temporairement présents », met en avant Olivier Wajnsztok. Les Soft skills qu'ils maitrisent influent également sur son intégration. « Cela fait partie de notre rôle de savoir nous faire accepter et de composer avec des résistances qui peuvent être plus ou moins fortes et inhérentes aux changements de fonctionnement présentés. Il faut réussir à comprendre la culture de l'entreprise tout en gardant un oeil critique afin d'être capable d'impulser une nouvelle dynamique positive », argumente Stéphane Ragoucy. La mission étant temporaire, le manager de transition doit se montrer particulièrement réactif et flexible. La méthodologie agile peut, selon le contexte, être employée, et notamment dans le cadre de plans de développement et de transformation, divisant les projets en phases dynamiques plus communément appelées « sprints ». « Les freins au changement peuvent de cette manière se révéler moins nombreux, les équipes adhérant plus naturellement au projet », précise Anthony Baron. Enfin, lorsque le manager de transaction quitte ses fonctions, la phase de passation n'est pas à négliger ; d'autant plus si ce dernier est remplacé et que la portée de son action doit être durable. En bref, cette alternative au CDI exige de la rigueur et un esprit persuasif. Parfaitement calibrée et menée, elle se révèle un procédé largement gagnant-gagnant ; les deux parties s'enrichissant au contact l'une de l'autre.