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DossierFaire de l'entretien annuel d'évaluation un outil de motivation

Publié par Bénédicte Gouttebroze le

1 - Un entretien réussi passe par une bonne préparation

L'entretien annuel d'évaluation est un exercice RH qui nécessite une bonne dose de préparation pour atteindre ses objectifs : dialoguer, motiver et fidéliser. Tour d'horizon des techniques à déployer de façon à être prêt le jour J.

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Faire un point formel sur les réalisations de l'année écoulée et fixer les objectifs pour celle à venir : c'est peu ou prou la vocation de l'entretien annuel d'évaluation, rituel phare dans la plupart des sociétés françaises. Ainsi, près de 80 % des entreprises privées, grands comptes comme PME, en seraient adeptes, selon l'Anact (Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail).

Cet outil, véritable pierre angulaire de la politique RH de l'entreprise, ne peut cependant être déployé à la légère. Pour le manier avec précaution, vous devez miser sur une préparation béton. " Tout repose sur l'élaboration du support d'évaluation propre à guider l'entretien, dont les critères, jugés trop nombreux, constituent l'un des premiers points d'achoppement avec les syndicats et salariés ", note Patrick Conjard, chargé de mission à l'Anact, en rappelant que ce support reste toutefois incontournable pour bien préparer un tel rendez-vous. Un avis partagé par Stéphane Lhermie, associé du cabinet & Changer et auteur du livre "L'Évaluation professionnelle : pour une pratique humaine et responsable". Celui-ci explique en effet que " la mise au point d'une grille d'évaluation est essentielle pour donner un fil rouge à l'entretien. Mais encore faut-il que le renseignement d'un tel questionnaire ne prenne pas le pas sur l'enjeu premier du rendez-vous : favoriser l'échange avec le collaborateur ".

Un questionnaire simple

Et c'est bien là que le bât blesse. " Dans nombre d'entreprises, PME comprises, les supports d'évaluation sont devenus de vraies usines à gaz ! Longs et sophistiqués, ils comportent un arsenal de règles fastidieuses pour le manager comme pour le collaborateur. Résultat : ce dernier a le sentiment de remplir un tableau de bord. L'exercice devient si machinal qu'il en perd tout son intérêt ", développe Gérard Reyre, sociologue du travail et enseignant-chercheur à l'université Paris-Est Marne-La-Vallée.

Vous l'aurez compris : mieux vaut miser sur la simplicité en fuyant les supports trop standardisés et aux multiples cases à cocher. " Le plus important est que le document soit lisible et surtout adapté aux besoins de l'entreprise ", détaille le sociologue. De deux pages maximum, le questionnaire doit généralement inclure " une partie dédiée au bilan de l'année passée, une autre axée sur les objectifs à venir et une dernière concernant l'évolution plus globale du collaborateur ", résume Philippe Burger, associé responsable Capital Humain du cabinet Deloitte.

Dans la partie bilan, soyez le plus concis possible. Si certains experts recommandent de revenir sur chaque compétence-clé relative au poste, d'autres conseillent de se concentrer sur les plus essentielles. " Ces compétences figurant d'ores et déjà dans la fiche de poste, le manager a tout intérêt à se munir simplement dudit document le jour de l'entretien et à s'appuyer dessus si besoin ", conseille Pascal Christin, formateur chez CSP Formation. Gare toutefois aux critères comportementaux, dont le caractère subjectif constitue l'une des premières causes de litiges portés devant les tribunaux. " Certaines valeurs, comme le courage ou l'empathie par exemple, sont difficiles à évaluer et pas toujours en lien direct avec l'emploi occupé ", note Patrick Conjard (Anact). Et face aux dérapages nombreux en la matière, le Commissariat général à la stratégie et à la prospective recommande, dans son rapport 2011, la plus grande vigilance quant à l'évaluation de la personnalité.

À ce titre, le Code du travail se veut très strict, en indiquant dans son article L. 1222-2 que "les informations demandées à un salarié ne peuvent avoir pour finalité que d'apprécier ses aptitudes professionnelles".

Une évaluation annuelle

Au-delà des compétences-clés à évaluer, le bilan doit porter sur l'ensemble du travail concret réalisé par le collaborateur au cours de l'année. Une analyse que seul un manager de proximité peut développer. " Pour ne rien oublier, il doit anticiper en prenant des notes sur le travail de ses équipes tout au long de l'année ", conseille Noëmie Cicurel, directrice de Robert Half France, cabinet de recrutement. Une manière d'éviter un écueil de taille : " Établir une évaluation sur les deux à trois derniers mois, et non sur toute la période écoulée ", complète cette dernière.

Pour se faire une meilleure idée du chemin parcouru au cours de l'année, le manager doit aussi " s'appuyer sur le bilan de l'année passée, support indispensable pour savoir quels objectifs ont été atteints ou non, indique Pascal Christin (CSP Formation). Même si cela est loin d'être suffisant, tant les salariés sont amenés à gérer de nouvelles tâches qui n'étaient pas prévues. " D'où la nécessité, pour procéder à un bilan pertinent, de se doter d'une vision globale du travail réalisé par le salarié.

Être exhaustif ne veut toutefois pas dire reprendre chaque point dans le détail. Pour Michel Lora, directeur du cabinet de conseil Gii et auteur du livre "Entretiens d'évaluation : guide pratique pour le manager efficace", les managers doivent avant tout miser sur le pragmatisme. Et ce, en identifiant " les trois principales réussites du collaborateur sur l'année, puis ses trois principaux "ratés", de manière à en tirer les enseignements nécessaires ". Un travail auquel les collaborateurs doivent être associés en amont. " En effet, en les invitant à préparer de leur côté leur entretien, ils deviennent acteurs du processus. C'est très positif car, le jour J, managers et collaborateurs peuvent alors confronter leurs points de vue sur le travail réalisé au travers d'un véritable échange, au-delà d'une logique purement scolaire ", développe Michel Lora.

Pour favoriser une telle autoévaluation, les managers doivent fixer le rendez-vous au moins 15 jours à l'avance de façon à ne pas prendre leur équipe au dépourvu. " C'est le temps nécessaire pour bien se préparer et réfléchir à son bilan ainsi qu'aux objectifs de l'année suivante ", précise Véronique Cadiou, responsable de Page Assessment, spécialiste du conseil RH. Si les objectifs seront, in fine, codéfinis avec le manager lors de l'entretien, il est toutefois à la charge de ce dernier de valider les plus judicieux, " afin qu'ils soient clairs, précis et sans ambiguïté d'une part, mais surtout ambitieux tout en restant réalistes, pour ne pas démotiver le salarié ", complète Pascal Christin (CSP Formation).

Levier de reconnaissance

L'autre gageure consiste à établir des objectifs spécifiques qui soient temporels, c'est-à-dire limités dans le temps. Et pour cause : " Dans un contexte économique incertain, fixer des objectifs précis à moyen/long terme est souvent illusoire, tant les entreprises, PME en tête, manquent de visibilité sur leur carnet de commandes pour les mois à venir. Une solution consiste alors à fixer quelques grandes orientations à long terme offrant plus de marge de manoeuvre aux salariés comme aux managers ", recommande l'enseignant Gérard Reyre, qui milite pour des entretiens " plus ouverts, dépassant le cadre purement prescriptif et bête et méchant ". Une manière de transformer cet outil en véritable levier de reconnaissance et de motivation.

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