Multitechnique : un marché sous tension
De nouvelles réponses
Première réponse des prestataires : l'élaboration en cours, d'une nouvelle génération de contrats qui sera plus précise en ce qui concerne les formules de révision de prix ainsi que les délais de paiement. Ces documents intégreront également des clauses définissant les obligations du donneur d'ordres en termes de sécurité. En attendant, le marché s'adapte par une tendance à la concentration des entreprises pour rester rentable. Les marges unitaires par contrat ayant fondu, il est nécessaire de faire du volume pour maintenir la tête hors de l'eau.
Autre tendance, le regroupement des prestations. "Nous pouvons réaliser des économies d'échelle grâce à des lots regroupés en mutualisant des ressources sur un périmètre plus large", explique Éric Lamendour, directeur marché tertiaire de Cofely services. Par ailleurs, ce prestataire mise sur l'accompagnement de ses clients vers une meilleure efficacité énergétique (par exemple avec "D'Effi", une prestation d'accompagnement des utilisateurs vers les bons comportements) associée à la maintenance multitechnique.
En réponse à la disparition progressive de l'expertise technique du côté des donneurs d'ordres, les entreprises de multitechnique développent une offre de pilotage sous forme de prestation distincte. Plus que sur les prix des prestations de maintenance, déjà tirés au maximum, c'est sur ce type de prestations que se situent aujourd'hui les véritables marges. Certes la prestation a un coût (20 à 25 % du prix de la redevance versée au mainteneur), mais l'équation mérite d'être posée : "Il convient de raisonner en termes de TCO et non en dépense pure", insiste Éric Lamendour. "Les entreprises doivent évaluer ce que représente cette dépense par rapport à une gestion réalisée en interne avec des contrats souscrits auprès de différents fournisseurs."
Réactivité et proximité
D'autres acteurs du marché ont misé sur une maîtrise en interne d'une gamme complète de prestations. Au sein du groupe Atalian, MTO Eurogem mise sur la "variabilisation", comme l'explique son p-dg, Antoine Terzikhan : "Nous pouvons adapter tous nos contrats en cas de variation de la surface, par exemple, tout en répercutant ce changement sur d'autres prestataires multiservices du groupe." Malgré des contrats de plus en plus normés, la société essaie de faire preuve de souplesse: lorsqu'un de ses clients dans l'aéronautique a dû stopper sa production dans une de ses usines, MTO Eurogem a adapté ses moyens sans rien réclamer. Un effort commercial qui a rassuré le client et permis d'obtenir d'autres prestations par la suite. "Nous restons un métier de dépannage et le client apprécie d'avoir un prestataire capable de régler ses problèmes", martèle Antoine Terzikhan.
Enfin, les relations contractuelles évoluent vers l'intégration de prestations à plus forte valeur ajoutée. Au-delà de la maîtrise des consommations énergétiques et du développement durable, les nouvelles technologies ouvrent des perspectives en termes de gestion et de reporting. Un créneau sur lequel Spie s'est positionné en intégrant le pilotage d'un ensemble d'équipements via le réseau IP. "Avec la mutation numérique, que nous appelons "smartification", nous ne nous contentons pas de régler techniquement une installation", explique Alfredo Zarowsky, directeur général adjoint en charge et la stratégie et du développement. "Nous sommes capables de la gérer et de la manager avec un engagement de performance."
A la communauté d'agglomération de Saint-Étienne le marché passé avec Spie en 2010 pour le musée d'art moderne démontre qu'une utilisation ciblée de l'expertise du donneur d'ordres peut être efficace et surtout rentable. La collectivité a signé un contrat de performance énergétique à l'occasion du remplacement d'un groupe chaud/froid qui était vétuste. Comme elle possède une expertise technique, l'agglomération a conservé la fonction pilotage et elle a également réalisé elle-même l'investissement (514 000 €).
Spie a été chargée des travaux et de la maintenance avec un engagement de performance : diminuer de 46 % les consommations d'électricité et de gaz de cette installation d'ici 2014. En 2013, première année d'exploitation complète, la réduction effectivement réalisée a été de plus de 56 %. "L'économie sur nos dépenses d'énergie a représenté 39 952 € en 2013", se félicite Marc Gallet, chargé du patrimoine à Saint-Étienne Métropole. Une performance qui couvre largement la rémunération accordée au prestataire (15 500 € de redevance annuelle) et contribue à sa motivation grâce à un mécanisme de bonus (7 141 € en 2013). Preuve qu'avec un cahier des charges techniques bien construit (ici avec l'aide d'une assistance à maîtrise d'ouvrage), la relation entre donneur d'ordres et prestataire multitechnique peut être profitable aux deux parties.
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