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Publié par Eve Mennesson le | Mis à jour le

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Nicolas Guillaume (Grant Thornton) invite quant à lui à consulter différentes bases de données et à ne pas faire confiance uniquement à une seule. "Elles sont souvent complémentaires", explique-t-il. Il rapporte également que les outils ne font pas toujours la différence entre une citation positive ou négative : par exemple, l'entreprise évaluée peut être plusieurs fois associée au mot corruption mais pour son comportement exemplaire dans ce domaine. "L'analyse humaine est encore nécessaire. D'où l'importance de se concentrer sur les fournisseurs à risque mais aussi d'envisager l'externalisation de cette tâche chronophage d'évaluation", conclut Nicolas Guillaume.

Il existe également des outils qui permettent de réaliser cette évaluation, comme la plateforme IndueD de Altares-D&B. S'outiller permet de plus de mettre en place des alertes en cas de modifications mais aussi de générer un rapport de conformité, qui est demandé par l'AFA en cas de contrôle. Quel que soit le moyen utilisé pour réaliser cette évaluation - interne, externalisation, logiciel - il s'agit d'être patient et méthodique. La gestion des "faux positifs" dont nous avons parlé plus haut, notamment, est très chronophage. Romain Maillard (BM&A) invite à étaler dans le temps l'évaluation des tiers afin d'avoir réalisé l'ensemble de l'évaluation dans les trois ans. "Tous les tiers doivent être évalués mais si lors d'un contrôle tout n'a pas été fait mais que c'est planifié, l'AFA se montrera indulgente", pense-t-il.

Quels sont les risques d'une non-conformité à la loi Sapin 2 ?

La loi Sapin 2 prévoit une sanction administrative d'un million d'euros pour les entreprises qui n'ont pas mis en place de mesures de prévention et de lutte contre la corruption. Par ailleurs, les entreprises peuvent être contraintes à se mettre en conformité avec la mise en place d'un monitoring dont le coût est assumé par l'entreprise condamnée. Surtout, les dirigeants peuvent personnellement être sanctionnés : l'amende administrative s'élève pour eux à 200 000 euros maximum. Ces sanctions seront rendues publiques et feront donc courir un fort risque d'image aux entreprises concernées.

Si, jusqu'à présent l'AFA s'est montrée clémente, elle a annoncé bientôt prononcer des sanctions auprès des entreprises qui n'auraient pas engagé de mesures de prévention et de lutte contre la corruption, à hauteur de leurs moyens. A savoir également que, si les injonctions de l'AFA restent infructueuses, les dirigeants peuvent être poursuivis pénalement.

Collaboration avec les autres directions

Dans cette évaluation des tiers, le rôle de la direction des achats est primordial. Elle peut en effet prendre en charge cette évaluation, notamment en recueillant des informations auprès des fournisseurs. En effet, comme l'observe Nicolas Guillaume (Grant Thornton), "les grandes entreprises n'hésitent pas à envoyer le questionnaire d'évaluation à leurs fournisseurs auquel ils doivent se conformer s'ils souhaitent garder leur client". Les recherches via des bases de données et des informations trouvées sur Internet peuvent donc être complétées par ce type de questionnaire.

Auprès des fournisseurs avec lesquels l'entreprise est déjà en relation mais aussi les nouveaux entrants. "Pour les nouveaux fournisseurs la question est de savoir quand intégrer l'évaluation dans les process. Faut-il évaluer tous les fournisseurs consultés ou vérifier seulement celui pressenti au moment de l'attribution au risque de devoir remettre en cause son choix ?", se questionne Nicolas Guillaume. Il conseille de prendre le sujet le plus en amont possible. "Jusqu'à présent, on posait à ses fournisseurs des questions sur la RSE et leur solidité financière. Il s'agit juste d'ajouter l'éthique et la corruption. Avec également le RGPD et le devoir de vigilance, la qualification de ses fournisseurs se fera désormais de manière approfondie", avance-t-il.

Cette évaluation approfondie doit d'ailleurs être vue comme une chance par la direction des achats : cela permet d'optimiser sa base fournisseurs, de la nettoyer des entreprises avec lesquels on ne travaille plus (car l'évaluation prend du temps) mais aussi de se poser la question de l'intérêt de continuer à faire des affaires avec tel ou tel acteur s'il s'avère risqué. Cependant, Jospeh Mocachen (Ellispère) met en garde: "Ces évaluations ne veulent pas dire qu'il faut stopper tout business avec une entreprise qui aurait rencontré des problèmes par le passé. Cela sert à prendre les bonnes décisions en s'aidant, pourquoi pas, d'indicateurs. Surtout, il faut être capable, en cas de contrôle, de dire pourquoi il a été décidé de continuer de traiter avec telle ou telle entreprise suite aux évaluations réalisées". Nicolas Guillaume souligne cependant la difficulté de sortir du côté manichéen de cette évaluation: "Soit il y a un problème, soit il n'y en a pas mais il est difficile d'attribuer un score", note-t-il.

Quoi qu'il en soit, si les achats sont importants dans cette évaluation des fournisseurs, ce ne sont pas eux qui prendront la décision de continuer avec tel ou tel fournisseur au vu du risque déterminé. C'est bien souvent au responsable conformité que revient cette tâche. Les achats, par contre, devront apporter une information claire, complète et fiable. Ce qui oblige donc la direction des achats à travailler avec d'autres directions. "L'évaluation des tiers oblige la direction achats à travailler en collaboration avec d'autres acteurs de l'entreprise comme la compliance, le juridique, le secrétaire général, etc...", observe Nicolas Guillaume. Encore un sujet qui nécessite de casser les silos !

 
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Journaliste économique depuis 2005, avec une forte appétence pour les sujets environnement/climat, j'ai fondé un Repair Café et suis [...]...

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