Le premier collège "public privé" retoqué dans le Loiret
Le tribunal administratif d'Orléans a rejeté le caractère "urgent" de la procédure pour ce partenariat public-privé (PPP). Le département a fait appel. Les plaignants sont des PME du bâtiment.
Je m'abonnePas d'urgence, pas de PPP. Dans un jugement rendu le 29 avril, le tribunal administratif d’Orléans a annulé le premier partenariat public-privé français signé pour la construction et l'exploitation d'un collège public à Villemandeur (Loiret). Le tribunal juge que le caractère urgent du projet, invoqué par le conseil général, ne pouvait être justifié en l'espèce : "L'atteinte portée au fonctionnement du service public par le retard affectant la réalisation du collège de Villemandeur ne présentait pas (...) un caractère de gravité suffisant" permettant de déroger au droit commun de la commande publique. Créé par une ordonnance de juin 2004, le PPP est un contrat permettant à des opérateurs privés de concevoir et gérer des équipements publics en échange de loyers versés par la personne publique. Le conseil général a fait appel du jugement.
Double appel d'offres infructueux
La décision contestée avait été adoptée en 2005 pour la réalisation du collège, en faisant valoir l'urgence de la construction de l'établissement, à la suite d'un double appel d'offres infructueux. Le recours à ce partenariat a permis d'accélérer les démarches administratives. Le collège a été construit en urgence pour parer à une situation provisoire liée aux difficultés d'un autre collège accueillant 900 élèves alors qu'il avait été construit pour n'en accueillir que 600, selon le conseil général. L'assemblée départementale, où la droite est majoritaire, rappelle que cette procédure a permis de raccourcir de deux ans la réalisation du collège et de bénéficier d'un coût d'investissement inférieur de 25% par rapport à une procédure classique. Son montant, comprenant la construction et la gestion du collège pour dix ans, s'élève à 21,7 millions d'euros, dont 13,3 millions d'euros de travaux. Le contrat de partenariat avait été conclu pour une durée de dix ans avec la société Auxifip, filiale du Crédit Agricole. Le recours a été déposé par le Syndicat national des entreprises de second oeuvre du bâtiment (SNSO), qui regroupe des PME du bâtiment. Pour ce syndicat, "les PPP traduisent un abandon des prérogatives publiques, conduisent à une extinction de la concurrence (…) et privent les entreprises locales d’un accès direct à la commande publique au profit d’un quarteron de majors".
Le conseil général persiste
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Après ce jugement, le conseil général a réitéré l’urgence de réaliser ce collège sous contrat de partenariat à la suite des appels d’offres infructueux et de l’accueil de 900 élèves dans un collège prévu pour 600. Eric Doligé président du conseil général a notamment déclaré que "ce PPP a répondu à une urgence véritable, à un besoin de sécurité et a donc réduit les délais mais aussi les coûts d’investissements de 25%". Ce dernier critère devrait correspondre à la nouvelle voie de recours qu'ouvrira la loi qui réformera les PPP dès cet été : celle de "l’efficience”. Il suffira de démontrer que les PPP se font dans des délais plus courts ou sont globalement moins coûteux qu’un marché public ou une DSP pour avoir le droit d’en lancer. En attendant, la cour d'appel va devoir rejuger ce cas de figure inédit en France.
Pour aller plus loin : tout le détail de la réforme des PPP dans le numéro de "Décision Achats" de juin. Vous pouvez également consulter le projet de loi sur le site du ministère de l'Economie et des finances.