(Fiche pratique) Le devoir de vigilance : un outil juridique et stratégique pour les acheteurs
Le devoir de vigilance est une obligation légale qui s'applique aux grandes entreprises multinationales. Il vise à prévenir et à réparer les atteintes aux droits humains et à l'environnement causées par leurs activités ou celles de leurs filiales, sous-traitants ou fournisseurs. Il s'agit d'un enjeu majeur pour les acheteurs publics, qui doivent intégrer des critères sociaux et environnementaux dans leurs marchés publics. Dans quel cadre juridique s'inscrit le devoir de vigilance ? Comment peut-il être mis en oeuvre dans les pratiques d'achats publics ?
Je m'abonneQu'est-ce que le devoir de vigilance ?
Le devoir de vigilance est un concept qui renvoie à la responsabilité des entreprises en matière de respect des droits de l'homme et de l'environnement tout au long de leur chaîne de valeur, autrement dit toutes les activités liées à la conception, à la production, à la distribution et à la consommation des biens ou des services qu'elles proposent.
Le devoir de vigilance impose aux entreprises d'identifier, de prévenir et d'atténuer les risques de violation des droits de l'homme et de l'environnement pouvant résulter de leurs activités ou de celles de leurs filiales, de leurs sous-traitants ou de leurs fournisseurs. Il suppose également que les entreprises doivent réparer les dommages causés en cas de violation des droits humains ou de dégradation environnementale.
Le devoir de vigilance vise donc à renforcer la responsabilité sociale et environnementale des entreprises, ainsi qu'à protéger les droits des personnes affectées par leurs activités. Il s'inscrit dans une tendance mondiale à réguler le comportement des entreprises multinationales, qui peuvent avoir un impact considérable sur la société et la planète.
Dans quel cadre juridique s'inscrit le devoir de vigilance en France ?
En France, le devoir de vigilance s'inscrit dans le cadre de la loi sur le devoir de vigilance des sociétés mères et entreprises donneuses d'ordre, adoptée en 2017. Cette loi fait obligation aux grandes entreprises françaises et à leurs filiales, sous-traitants et fournisseurs de garantir que leurs activités se déroulent dans le respect des droits de l'homme et de l'environnement.
Elle impose aux entreprises concernées d'élaborer, de publier et de mettre en oeuvre un plan de vigilance contenant des mesures d'identification, de prévention et de correction des risques. Cette loi prévoit également des sanctions civiles en cas de non-respect de l'obligation de vigilance, ou de dommages causés par un manquement à ce devoir.
Comment mettre en oeuvre le devoir de vigilance dans les achats publics ?
Pour mettre en oeuvre le devoir de vigilance dans les achats publics, les acheteurs publics doivent adopter une démarche proactive et participative, qui implique plusieurs étapes :
Identifier les fournisseurs ou sous-traitants concernés par le devoir de vigilance
Il s'agit des fournisseurs qui emploient plus de 5 000 salariés en France, ou qui sont soumis à des normes internationales ou nationales similaires. Pour cela, les acheteurs publics peuvent se référer aux informations publiques disponibles, comme les rapports annuels, les documents de référence ou les registres du commerce. Ils peuvent aussi consulter des sources externes, comme le site plan-vigilance.org, qui propose une liste indicative des entreprises concernées par la loi française sur le devoir de vigilance.
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Vérifier l'existence et la qualité du plan de vigilance des fournisseurs ou sous-traitants concernés par le devoir de vigilance
Pour cela, les acheteurs publics peuvent demander aux entreprises de leur fournir leur plan de vigilance, ou de le publier sur leur site web. Ils doivent s'assurer que les plans de vigilance contiennent des mesures pertinentes et efficaces pour identifier, prévenir et atténuer les risques d'atteintes aux droits humains et à l'environnement liés aux marchés publics qu'ils passent.
Intégrer des clauses contractuelles relatives au respect des droits humains et à l'environnement dans les marchés publics
Pour cela, les acheteurs publics peuvent utiliser les outils juridiques existants, comme les clauses sociales et environnementales, les labels ou les certifications, qui permettent d'introduire des critères sociaux et environnementaux dans les marchés publics. Ils peuvent aussi créer des clauses spécifiques au devoir de vigilance, qui exigent que les fournisseurs ou sous-traitants respectent leur plan de vigilance, qu'ils communiquent sur leurs actions et leurs résultats, ou qu'ils s'engagent à réparer les dommages causés en cas de violation des droits humains ou de dégradation environnementale.
Mettre en place un suivi et un dialogue avec les parties prenantes
Pour cela, les acheteurs publics doivent établir des mécanismes de contrôle et d'évaluation du respect du devoir de vigilance par les fournisseurs ou sous-traitants. Ils doivent aussi favoriser la participation et la consultation des parties prenantes, comme les représentants du personnel, les syndicats, les associations, les ONG, ou encore les autorités publiques. Ils doivent également prévoir des voies de recours internes ou externes pour traiter les éventuelles plaintes ou réclamations liées au respect du devoir de vigilance.
À noter : Le respect du devoir de vigilance par les acheteurs publics nécessite donc une démarche volontaire et collaborative, qui implique une adaptation permanente aux évolutions du cadre juridique et des pratiques.
Pour en savoir plus, lisez également :
- https://www.decision-achats.fr/Thematique/strategie-achats-1236/conseils-2257/Breves/Vers-un-nouveau-chapitre-pour-le-devoir-de-vigilance-383044.htm
- https://www.decision-achats.fr/Thematique/hub-dedie-1267/breve/le-devoir-de-vigilance-des-entreprises-bientot-en-europe-ce-quil-faut-retenir-363411.htm