Les freins au développement du paiement à l'usage
Quels sont les freins au développement de ce modèle ? Ce modèle n'est-il pas plus onéreux qu'un achat classique ?
Gregory Wanlin - Certains leviers qui étaient intéressants ne le sont plus en raison d'évolutions juridiques. La location opérationnelle est à présent une immobilisation. L'instabilité juridique est un frein.
La question des coûts est bien évidemment présente, mais puisque l'entreprise donne une partie de sa charge à l'extérieur et qu'elle achète du service, il est logique qu'elle le paie. Mais si on enlève le temps homme qu'il n'y a plus à consacrer au sujet, on arrive à une équation équivalente, sans parler du fait que l'entreprise réduit ainsi les risques, notamment sur la gestion de la fin de vie des produits.
La balance entre risque et coûts est universelle : il appartient à chaque entreprise de faire ses arbitrages. Oui, j'achète du service en plus mais je dois le mettre en regard de la performance accrue, de la création de valeur.
Natacha Tréhan - Il y a effectivement des freins financiers. Toutes les entreprises faisant appel à l'épargne publique, toutes les entreprises cotées sont soumises aux normes comptables internationales, les IFRS. L'IFRS 16 prévoit que pour tous les contrats de location et de prestations de services, il y a une obligation de les requalifier en actifs. Pour éviter cela, l'acheteur doit démontrer que le fournisseur garde le contrôle des actifs et peut faire valoir son droit de substitution sur l'actif.
Une autre limite concerne le fond de roulement énorme que cela demande aux fournisseurs. Ils ne pourront pas tous proposer ce modèle n'ayant pas la capacité d'immobiliser le matériel. C'est pour cela qu'apparaissent des tiers ; des financeurs. On voit alors la naissance de relations tripartites.
Une troisième limite est la peur de l'acheteur. Il craint que le rapport de force bascule du côté du fournisseur. Car c'est lui qui va avoir la data, et, on le sait, la data, c'est le pouvoir. Les acheteurs peuvent craindre que le fournisseur, qui détient l'information, décide demain de proposer sa solution et donc, d'empiéter sur le coeur de métier du client. Les acheteurs peuvent craindre qu'un pouvoir trop important s'installe chez leurs fournisseurs.
Franklin... comment lever ces craintes et que prévoir pour se prémunir de tout risque ?
Franklin Brousse - Tout s'écrit. Les fournisseurs ne peuvent pas faire n'importe quoi avec la data. Ils ne peuvent la traiter que pour votre compte et n'ont pas le droit de les exploiter pour une autre finalité
Dans certains cas, des fournisseurs peuvent proposer à leurs clients de mutualiser leurs données pour améliorer le service. A ce moment-là, les entreprises prévoient de partager la valeur. J'ai fait des contrats de ce type. Criteo, par exemple, a mis cela en place avec des clients qui ont mutualisé leurs datas (" coopérative de données ")
Il y a des warnings, certes, mais il suffit d'établir clairement la règle du jeu, de définir qui apporte quoi. On ne peut pas spolier la propriété. Cela s'encadre.
Mais comment encadrer des risques que l'on n'envisage peut être pas bien quand on se lance dans un nouveau modèle?
Franklin Brousse - Il y a une analyse de risques à faire en amont. Il faut bien envisager l'exploitation des datas et la dimension RGPD. Ensuite, on sait prendre les mesures de gestion des risques dans les contrats.
Lorsque nous avons partagé, sur les réseaux sociaux, le thème de cette table ronde, un acheteur s'est amusé en s'interrogeant sur le nom futur d'une fonction qui n'achètera plus mais qui louera... que lui suggéreriez-vous ?
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